Parle-nous un peu de ton parcours…
J’ai toujours aimé jouer, m’exprimer. Mais dans la vie, mon bégaiement a été un obstacle, pas à cause de moi, mais à cause des autres. J’ai été harcelé du CP à la 5e : on se moquait de ma manière de parler, de ma différence. C’était vraiment très dur. À 13 ans, j’ai pris la parole devant 1 000 personnes à l’occasion du concours « L’Éloquence du Bégaiement » pour raconter le harcèlement que j’ai subi. Cela a changé ma vie de voir toutes ces personnes m’écouter et m’applaudir.
Le film raconte l’histoire d’un professeur qui monte la célèbre pièce d’Edmond Rostand et qui te confie le rôle malgré ton handicap. Qu’as-tu ressenti en tournant ce film ?
C’était très fort. Ce film parle de confiance en soi, de dépassement. Mon personnage trouve sa voix grâce au jeu de comédien, et c’est quelque chose que j’ai vécu moi aussi. Devant une caméra, je suis très à l'aise et je bégaye beaucoup moins, voire pas du tout. C’est comme si le jeu me libérait. Jouer avec José Garcia était incroyable. Il m’a soutenu, m’a encouragé à oser et à prendre toute ma place.
La parole est au cœur du film et de ton parcours. Qu’est-ce que cela signifie pour toi « prendre la parole » ?
C’est exister et affirmer qui on est. Quand on est bègue, les gens veulent souvent parler à notre place, finir nos phrases. Mais non, on doit pouvoir dire ce qu’on a à dire, à notre rythme. Pour moi, un débat, c’est écouter et être écouté. Parler, ça m'a vraiment aidé à sociabiliser, à m'entourer de bonnes personnes et à sortir du cercle vicieux de la souffrance.
Dans une interview, tu as dit : « Parler, c’est comme courir. Certains vont vite, d’autres marchent. » Que veux-tu dire ?
Dans une conversation, les gens qui parlent normalement, c’est comme s’ils couraient. Moi, avec mon bégaiement, je marche. Parfois, ils ralentissent pour moi, parfois ils courent sans moi. Mais maintenant, j’arrête d’essayer de les rattraper. Je leur dis : « Revenez, écoutez-moi. » Ceux qui tiennent à moi et me respectent restent.
Tu es passé dans plusieurs médias, notamment à la télévision, et tu dégages une vraie aisance. D’où te vient ce « panache » ?
J’ai toujours été bavard ! (rires) Je parle tout le temps. Ma famille en a marre parfois ! Mais plus jeune, personne ne m’écoutait. Quand on me remarquait, c’était pour se moquer. Alors aujourd’hui, j’ai envie de parler, de débattre, de rencontrer des gens, de communiquer avec eux. C’est une revanche, mais surtout un plaisir. En tant qu’acteur, j’espère jouer beaucoup d’autres rôles, et pas seulement des bègues.
Tu dis souvent que ton bégaiement te rend différent. Aujourd’hui, en es-tu fier ?
Fier, je ne sais pas, mais je l’accepte. Cela fait partie de mon charme. Et finalement, c’est ma force. Grâce à ça, j’ai appris à m’imposer, à ne pas laisser les autres parler à ma place. Dans « Le Panache », mon personnage trouve sa voix. Moi aussi, je l’ai trouvée.
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