Wie haben sie ihr Projekt durchgeführt? Erfahrungsaustausch ist unersetzlich. Auf allen schulischen und außerschulischen Ebenen, in allen Künsten, geschieht etwas Ausgezeichnetes und Innovatives in der Kunst- und Kulturerziehung.
1.DRIFT, le commissariat d'exposition et le lycée viticole
Amandine Pierné accompagne les élèves de 1ères du lycée viticole de Montagne, en Gironde, avec le FRAC Nouvelle-Aquitaine MECA.
Dans l'entretien qu'elle nous a accordé, elle aborde son parcours professionnel, sa rencontre du projet DRIFT, l'idée et l'objectif du projet, ses enjeux, les raisons de son choix, l'aspect financier. Elle raconte ses premières interventions, comment elle les a préparées. Elle dévoile le programme de la seconde partie du projet et ce qu'elle attend de cette dernière étape.
Amandine Pierné, quel est votre parcours professionnel ?
Amandine Pierné : J’ai fait les Beaux-Arts à l’Ecole supérieure de l’image à Angoulême et suis titulaire du DNSEP. Ensuite, j’ai déménagé à Bordeaux où j’ai intégré une galerie allemande pendant sept ans. J’ai exposé régulièrement des œuvres dans cette galerie, participé à des foires d’art contemporain, à des expositions collectives et j'y ai montré des expositions personnelles une fois par an.
Et puis j’ai fait partie du collectif « La Mobylette », à l’origine un groupe d’anciens étudiants de l’Ecole de l’image d’Angoulême. Ce collectif sans port d’attache, très mobile, reposait beaucoup sur un travail de commissariat qui visait à se faire croiser exposants, expositions et lieu d’exposition, ce qui donnait des manifestations « de forme » plastique elles-mêmes, adaptées et flexibles.
Les expériences d'enseignement ponctuent et enrichissent ma pratique personnelle.
Un peu plus tard, j’ai fait quelques résidences, notamment avec l’association Pollen de Montflanquin (Lot-et-Garonne), avec une sélection d’œuvres déjà réalisées, pour faire de la médiation auprès du public et, en parallèle, une série d’interventions sous la forme de résidences de création dans trois lycées de la région. Ce furent mes premières expériences d’Education Artistique et Culturelle.
Ensuite, j’ai continué à mener des expériences semblables. J’imagine que de bons retours de temps en temps ont fait écho. Une certaine manière de travailler qui se révèle adaptée à certains types de projets, c’est recherché.
J’ai beaucoup apprécié d’être contactée pour un remplacement au pied levé à l’école des Beaux-Arts de Pau, pour enseigner la couleur et la peinture contemporaine, en 1ère année, c’est-à-dire du côté de l’initiation, des bases, jusqu'en 5ème année, pour l’accompagnement du projet des élèves et l’aide au diplôme.
Ces expériences d’enseignement permettent de sortir de l’entre soi inévitable des artistes. Elles mettent en perspective un savoir-faire, elles font partager aussi un passé et des compétences à des élèves et à tous les publics. Toutes ces expériences ponctuent et enrichissent ma pratique personnelle.
Le principe de DRIFT, en quelques mots :
Après une rencontre directe avec les œuvres et les métiers d’art dans les FRAC de leur territoire et dans leur lycée, trois classes de 1ère de trois établissements, chacune accompagnée par un artiste, mettent en place un commissariat d’exposition à partir de leurs intérêts et références culturelles.
Lors de la deuxième année du projet, les trois expositions conçues et mises en place par les lycéens sont exposées dans les trois FRAC ainsi que dans les trois établissements scolaires.
Comment avez-vous rencontré le projet « Drift » ?
J’ai été contactée par une personne du FRAC Nouvelle-Aquitaine MECA, Nathalie Bourgès, qui depuis, suite à une redistribution des fonctions et au déménagement du FRAC, a été remplacée par Iloé Lafond, chargée des projets scolaires et de l’enseignement supérieur.
Quelle est l’idée du projet, quel est son objectif ?
Le projet Drift est un projet d’exposition et surtout de commissariat d’exposition, menés avec les élèves d’une classe de lycée technique (ici un lycée agricole et une 1ère STAV – Sciences et technologies de l’agronomie et du vivant).
Il s’agit d’accompagner cette classe dans ce travail pendant deux ans, de manière pédagogique, pratique et très progressive.
C’est un projet de sensibilisation à l’art : découvrir ce que c’est qu’une œuvre d’art en cherchant comment l'exposer dans un espace pour un public.
L’angle d’attaque de cette sensibilisation "concrète" à l’art, c’est donc le projet de concevoir et réaliser l’exposition d'œuvres sur lesquelles on a conduit une réflexion. On souhaite par là favoriser une plus grande implication pratique des élèves.
Il s’agit donc de mettre ces œuvres en relation, de les mettre en espace et de considérer tout l’aspect technique du montage de cette exposition.
Le désir de tester des formes et d’oser les mettre en scène.
A quels enjeux cherchez-vous à sensibiliser les élèves?
DRIFT, comme son nom l'indique aux anglophones, est un projet qui a pour vocation de détourner. A ce titre, DRIFT se fonde sur un concept fondateur de l’art contemporain et se projette vers une pratique récurrente des cultures adolescentes: le détournement.
Amener ailleurs, déplacer hors les murs du centre d'art.
A partir de là il revient aux élèves que j’accompagne de créer une expo originale. Pour cela, il me faut leur trouver les meilleures conditions de réflexion et de créativité, afin qu’ils puissent assumer eux-mêmes leurs propres choix.
L’enjeu auquel je cherche à les sensibiliser est un enjeu d’autorité, pour ainsi dire : il faut qu’ils deviennent effectivement les commissaires de cette exposition qu’ils vont organiser pendant la seconde année du projet.
Pour y parvenir, mon rôle, par-delà la direction des interventions et des visites méthodiques que nous faisons, est de mettre en valeur leur travail. Ce travail, je peux clairement le légitimer du fait de ma propre expérience de commissariat.
En ce sens, mon but est qu’ils soient contents des choix qu’ils font. Là il ne s’agit plus de les diriger mais de susciter leur désir de s’approprier l’exercice. En leur montrant notamment des expos intéressantes en terme d’espaces, de titres, et d’audace.
Le choix des artistes qui seront exposés est donc très important, puisque que dans le cadre du thème du détournement, le désir de tester des formes et d’oser des mises en scène est au cœur du projet. Or, cet intérêt pour la problématique de l'exposition des œuvres, qui ne veut plus se contenter d'un simple "accrochage", on le retrouve comme un principe récurrent de l'art contemporain. Si donc les élèves se saisissent d’une interrogation intéressante (par exemple : quelle scénographie détournée pour exposer le détournement ?), c’est gagné.
Ainsi se donnent-ils les moyens de pratiquer un accrochage des œuvres de type « contemporain », qui joue avec l’espace, qui joue avec le fait même d’exposer des choses et qui y intègre le traitement de toutes les contraintes (y compris les contraintes scolaires).
L’exposition devient une œuvre à part entière composée d’autres œuvres.
Pourquoi avoir choisi ce projet ?
D’abord parce que j’aime beaucoup le commissariat d’exposition.
Un lieu d’exposition c’est un espace-temps de visite. Comme beaucoup d’artistes, j’apporte un très grand soin à la scénographie de mes propres travaux et j’apprécie beaucoup toute cette étape de travail.
Au travers de mes propres expériences de créations, d’expositions et de commissariats, je me suis rendu compte que ce sont des choses qui me passionnent. Idéalement, j’aimerais plus tard disposer d’un lieu à moi pour montrer les travaux d’artistes que j’aime bien.
Ensuite parce que DRIFT est un tout nouveau projet, dont nous n’avons accompli que la 1ère année.
Si bien qu’on travaille autant à sa conception qu’à sa mise en œuvre. Il y a un côté expérimental dans son organisation qui demande beaucoup de disponibilités et de capacités d’adaptation – par exemple dans la répartition des heures, ou dans le choix des pôles de travail à développer, dans la rédaction du calendrier, etc.
En bref, cette proposition d’EAC est un travail évolutif, conduit en collaboration avec la chargée de projet du FRAC Nouvelle-Aquitaine MECA et la professeure du lycée agricole, qui de plus se trouve au cœur de mes préoccupations artistiques elles-mêmes. Cet effort de transmission, de travail avec le public est digne d’intérêt ; il enrichit mon projet artistique.
Côté financier, comment ça se passe ?
Pour la première année, le budget était déjà établi : un forfait (600 €) de 10 heures d’interventions et un forfait (400 €) pour les préparations. Il y a en effet un gros travail en amont, dans mon atelier, en réunions, etc. Avec un micro-budget supplémentaire de 100 euros pour faire des impressions. J’aime laisser des traces aux élèves, pour qu’ils voient que les choses deviennent concrètes assez rapidement. Cela permet de les impliquer plus facilement.
Pour lancer la deuxième année, nous avons eu une réunion en mai qui nous a permis d’établir le planning de la nouvelle année à partir de septembre, de déterminer le nombre d’interventions, de s’entendre sur leurs formes, afin de pouvoir budgétiser un nombre d’heures.
Ainsi n’ai-je pas eu vraiment besoin de renégocier les enveloppes prévues. Le taux horaire était correct. Il fallait juste être réaliste quant au décompte des heures réelles consacrées à la préparation et prendre en compte le fait qu’il y aura plus d’interventions dans le lycée cette année.
Nous nous sommes expliqués avec la notion de "commissariat d'exposition".
Comment s’est déroulée cette première partie du projet ?
Le programme de cette première année était très simple. Il s’agissait de deux rendez-vous d’une journée avec les élèves. Le premier au lycée même de Montagne ; le second, quinze jours plus tard, au FRAC Poitou-Charentes.
Avec deux journées ponctuelles espacés de quinze jours, la difficulté est de trouver une bonne manière de travailler. Il ne faut pas perdre le fil de la progression des élèves, surtout après une césure de quinze jours. Cela demande beaucoup de soin et d’attention.
Quant à la première intervention – journée complète au lycée – il convenait en effet que je fasse connaissance des élèves chez eux.
Le matin, je leur ai proposé une partie « théorique », avec un support vidéo et un support images photographiques. Nous nous sommes expliqués avec la notion de « commissariat d’exposition », ainsi qu’avec les différents types d’exposition (monographies, expo collectives, expo en duo, expo thématiques, chronologiques, formelles), au moyen d’exemples compréhensibles et originaux.
L’après-midi, afin de manifester un peu la sensibilité des différents élèves, pour mesurer aussi la réceptivité de la classe et pour pouvoir ensuite m’y adapter, j’ai proposé un atelier. La contrainte d’y consacrer une seule après-midi rend la réflexion assez dense et intense. Il s’agissait de créer une série d’affiches d’expositions fictives sur le thème des plantes.
Ce thème étant familier aux élèves de ce lycée agricole et l’exercice étant libéré de toute pression scolaire (il fallait trouver un titre, des images, une illustration et créer une mise en page qui soit l’expression intéressante d’une exposition imaginaire) ils ont pu se laisser guider par leurs envies et découvrir un peu de leur créativité. Ils étaient répartis par équipes de deux ou trois élèves, afin de les amener à échanger leurs points de vue et d’articuler leurs découvertes.
Enfin, avec le budget alloué j’ai pu faire tirer les affiches produites par les élèves lors de la première journée. Une série d’affiches de format 60x90, que nous avons accompagnée d’un petit objet « catalogue », avec un texte. Le FRAC et le lycée ont reçu ainsi un kit d’exposition, c’est-à-dire tout le nécessaire pour monter une petite expo. Celle-ci a eu lieu au CDI du lycée.
Créer le titre, les images, l'illustration et l'expression en affiches d'une expo imaginaire.
Pour la seconde intervention, nous sommes allés au FRAC Poitou-Charentes suivre une visite commentée de l’exposition qui s’y trouvait programmée. Par chance la thématique de cette exposition était vraiment une thématique de commissariat. Il y avait un commissaire et un artiste invité. Ils avaient fait une sélection de photographies dans les collections des trois FRAC (Limousin, Aquitaine et Poitou-Charentes). Ils avaient mis ces photos en relation, par associations d’idées ou associations de formes. Grâce à cet excellent support, nous nous sommes très vite recentrés sur notre sujet, le « commissariat » d’exposition.
L’après-midi, dans le Centre de ressource du FRAC, les élèves ont monté une exposition de type « pop up » (= éphémère) et produit en parallèle une petite édition « fanzine » réalisée avec la photocopieuse de la bibliothèque. Je leur ai expliqué le cheminement intellectuel et le principe de cette intervention semi-improvisée et "in situ" pour qu'ils se rendent compte de l'importance d'un contexte et d'un lieu dans un commissariat. C’était un deuxième travail pratique, un peu plus sophistiqué que le premier, où je souhaitais les voir utiliser les acquis de nos petites expériences.
Comment aviez-vous préparé ces deux journées ?
Au moyen de réunions avec les différents acteurs, hors de la présence des élèves. Nous sommes trois artistes, trois FRAC et trois responsables de FRAC à monter ce nouveau projet en se concertant mutuellement. En ce qui me concerne, mes partenaires proches sont Iloé Lafond du FRAC Nouvelle-Aquitaine MECA, chargée des projets scolaires et universitaires, et Isabelle Lafargue, professeur d’éducation socio-culturelle au lycée agricole de Montagne.
Iloé s’occupe de monter les projets : elle les met en forme, elle fait le lien avec les établissements auxquels elle les propose. Ensuite elle suit avec soin la bonne marche de la réalisation du projet, depuis les interventions jusqu’aux visites, sous tous leurs aspects, y compris les aspects techniques. Elle organise nos relations avec le FRAC Nouvelle-Aquitaine MECA dans l’optique de l’expo de mars 2020 qui repose sur une sélection d’œuvres de cette collection, lesquelles seront prêtées au lycée. Elle supervise l’organisation de ce prêt. C’est elle qui permet que toutes ces opérations se déroulent de manière fluide.
Avec Isabelle nous avons aussi beaucoup échangé par mails. Je voulais d’abord cerner un peu ses attentes et savoir si elle avait des souhaits particuliers. Puis je lui ai fait une première proposition sur l’aspect théorique (la première demi-journée de mes interventions). Ensuite une seconde concernant l’aspect pratique. Nous n’avons cessé d’échanger et cela d’ailleurs se poursuit encore aujourd’hui, en incluant Iloé, par téléphone, par visio-conférences, par mails.
Quel est le programme de la seconde partie du projet ?
Avec une personne de la régie du FRAC Nouvelle-Aquitaine MECA, Isabelle, Iloé et moi-même avons d’abord fait des repérages quant aux lieux qui sont viables pour une exposition. Les contraintes regardent l’hygrométrie, la lumière, la conservation, les conditions qu’imposent les assurances et la sécurité.
Pendant l’été nous faisons une pré-sélection des œuvres dans la collection qui en comptent plus de 1200. Une pré-sélection toutefois très large qui nous empêche de deviner ce que les élèves en feront.
En septembre, nous irons en visite au FRAC Nouvelle-Aquitaine MECA. Je commenterai l’exposition en fonction de sa mise en espace et de tout ce qui regarde notre projet.
Deux grosses sessions de travail auront lieu ensuite, en octobre au Lycée, pendant deux jours consécutifs. Les élèves travailleront sur la sélection et sur les lieux d’exposition que nous avons repérés.
Il est impératif qu’au terme de la seconde journée le choix des œuvres ait été fait de manière définitive.
Ce choix sera soumis ensuite aux chargés de collection du FRAC Nouvelle-Aquitaine MECA, qui le valideront ou pas, en fonction des contraintes que nous avons évoquées : disponibilité, sécurité etc. Puis l’exposition se tiendra au mois de mars.
Une pré-sélection très large nous empêche de deviner ce que les élèves en feront.
Qu'attendez-vous de cette dernière étape ?
C’est ici que nous retrouverons les enjeux dont nous avons parlé.
Les élèves devront construire la sélection et la scénographie. Ils seront accompagnés, le travail se fera de manière collégiale. L’intérêt sera de les impliquer, de les rendre actifs. J’espère les faire entrer en réflexion ouverte et les voir organiser une espèce de négociation collective.
La thématique choisie reste celle du végétal, mais je souhaite que les élèves aperçoivent et fassent percevoir au public que leurs choix et leur conception scénographique porteront plusieurs aspects interprétatifs (politique, poétique…).
S'ils comprennent qu'aucun de leur choix n'est neutre, s'ils se demandent tout à coup : "mais qu'est-ce qu'on raconte, en fait ?", s'ils sont pris au jeu de l'expression, au moyen de ce geste même de l'exposition, alors ce projet aura réussi quelque chose.
Ainsi, on part d’un programme du FRAC, avec une forte volonté de médiation, de pédagogie, d’accessibilité à la culture, on construit un projet avec un angle d’attaque très précis (le commissariat d’exposition), on montre les coulisses de l’art (les contraintes matérielles et économiques), et avec un peu de réussite on offre aux élèves une expérience riche et pleine de sens. Pour toutes ces raisons, c’est vraiment un très beau projet.
DRIFT est un projet porté par le Lycée de la Mer et du Littoral de Bourcefranc (Charente-Maritime), le Lycée viticole de Libourne-Montagne (Gironde) et le Lycée agricole La Faye de St-Yrieix la-Perche (Haute Vienne), les trois Fonds régionaux d’art contemporain (FRAC) de Nouvelle-Aquitaine et les artistes curateurs. La collaboration tripartite entre les lycées, les artistes et les FRAC bénéficie du soutien de la Région Nouvelle-Aquitaine, de la DRAC Nouvelle-Aquitaine et de la DRAAF Nouvelle-Aquitaine, ainsi que de l’encadrement pédagogique du réseau des Professeurs d’Education Socioculturelle de Nouvelle-Aquitaine.