Le passage au numérique a ouvert le champ des possibles en matière de lecture. Lire, désormais, n’implique pas nécessairement de tenir un ouvrage papier entre ses mains : il est possible de dévorer un livre sur ordinateur, sur tablette, voire même de l’écouter à partir d’une application de podcasts. Ce changement de support, qui modifie également l’acte de lire, signe le début d’une nouvelle ère du livre, dans laquelle les Français sont entrés de plein pied avec la crise sanitaire.
En effet, nombre d’entre eux ont découvert le dynamisme et l’inventivité de l’offre numérique, dans le domaine du livre, au cours du premier confinement : bibliothèques numériques, réseaux sociaux dédiés à la littérature, livre audio… Ont été autant de moyens d’accéder à la lecture en dépit de la fermeture des librairies et des bibliothèques. De fait, le goût des Français pour le livre est sorti renforcé de cette période, 34% d’entre eux ayant, selon GfK, « davantage lu » durant ces deux mois. Le point sur deux nouveaux formats audiovisuels à la demande, emblématiques de ces nouvelles voies d’accès à la littérature.
« Plumard », une série qui réinvente les émissions littéraires
Plus souple, plus jeune, plus décalée… Avec « Plumard », Augustin Trapenard partage ses envies de lecture tout en déjouant les codes des émissions littéraires traditionnelles. Le mode de diffusion choisi est, en lui-même, une nouveauté : « Plumard » est diffusé sur un service de de streaming française BrutX, accessible sans engagement à partir de 4,99 euros par mois. « Renaud Le Van Kim [créateur de Brut] m’a proposé de tenter l’aventure de la plateforme et j’ai trouvé l’aventure passionnante car j’avais envie d’autres rythmes, d’autres formats, sans grille, case ni contrainte », explique Augustin Trapenard dans un entretien accordé au journal Le Monde. « Plumard » pourra donc comporter un nombre de numéros variable d’un mois à l’autre, d’une durée elle aussi indéterminée, Augustin Trapenard envisageant des rencontres allant de 30 minutes à une heure, suivant ses invités.
La principale constante de l’émission sera donc le canapé Chesterfield noir dans lequel Augustin Trapenard s’installera avec ses auteurs, ce dernier étant amené à voguer d’un endroit à l’autre au fil des numéros. Ainsi, dans le premier épisode de « Plumard », la journaliste et écrivaine Florence Aubenas raconte la fuite en avant grisante que représentent ses reportages au beau milieu d’un rond-point, ce lieu lui évoquant « un espace d’échange et de rencontre, symbolique et politique ». On retrouve, dans ce rendez-vous, tout le savoir-faire d’Augustin Trapenard, qui dresse un portrait intime de l’autrice de « l’Inconnu de la poste » - phénomène littéraire du printemps 2021 – tout en menant d’une main de maître une discussion passionnante, drôle et enlevée. Ce premier numéro prometteur annonce un programme de haute volée, dans la droite lignée de l’émission culte « Apostrophe » animée par Bernard Pivot. Le célèbre journaliste littéraire n’a d’ailleurs pas manqué de faire une apparition dans le générique de « Plumard », le temps d’un passage de flambeau symbolique. « Ça a changé quand même ! » lance-t-il à Augustin Trapenard, obtenant, en guise de réponse, un savoureux « Oh, ça va Bernard ». Indubitablement prometteur.
Voyage littéraire et sonore sur les terres des auteurs avec le podcast du CNL
Lecture d’extraits de livres, grands entretiens avec Asli Erdogan, Delphine de Vigan ou encore Alice Zeniter, dialogues avec Marie-Aude Murail et Amélie Nothomb… Le Centre National du livre (CNL) avait lancé, en octobre 2020, une première série de podcasts nous invitant à découvrir autrement les œuvres littéraires. 8 mois plus tard, il continue dans cette voie novatrice en créant, cette fois, son propre podcast. « Son livre » entend développer le goût du livre et de la lecture auprès du public. Quel meilleur moyen, pour cela, que de revenir aux fondamentaux de la création littéraire ? Le podcast du CNL nous dévoile la manière dont une information, un thème, une expérience est devenue œuvre. En donnant la parole à un auteur qui raconte comment, d’un choc provoqué par un élément extérieur, il a fait un livre, « Son livre » explore la trame organique et intime de récits singuliers.
La première saison du podcast mettra à l’honneur Joy Sorman, qui dévoile avec justesse le quotidien d’un hôpital psychiatrique dans son dernier roman, « A la folie » (Flammarion), ainsi que Nathalie Quintane, autrice d’« Un hamster à l’école » (la Fabrique), dans lequel elle révèle les paradoxes de son métier d’enseignante. Les romans graphiques seront également de la partie : l’envers de la création de deux récits initiatiques à fleurs de peau, « Eveils » (Atrabile) de Juliette Mancini et « L’Entaille » (Cornelius) d’Antoine Maillard, sera en effet dévoilé. Enfin, Nicolas Michel reviendra sur le naufrage du paquebot Afrique et le récit qu’en fait le tirailleur sénégalais Tierno dans « Le Chant noir des baleines » (Talents Hauts). Un programme éclectique et ambitieux, prouvant que le CNL a bien l’ambition, avec « Son livre », de voler dans les plumes des auteurs, pour le plus grand plaisir des auditeurs.
Le podcast, une nouvelle façon de partager sa passion pour les livres
Podcast et littérature forment, depuis quelques années déjà, un duo plein d’allant, comme en témoigne notamment la série « Bookmakers », d’Arte Radio. Son créateur, Richard Gaitet, lui-même journaliste et écrivain, y part à la rencontre de femmes et hommes de plume. Son objectif ? Détailler leurs secrets d’écriture... Philippe Jaeneda, Delphine de Vigan, Sylvain Prudhomme ou encore Alain Damasio se sont d’ores et déjà livrés dans ce podcast plein de finesse, qui jette, pour l’auditeur qui les a lus, un éclairage nouveau sur des œuvres aimées.
Sur France Culture, « Comment les livres changent le monde », dessine, d’après une idée originale de l’écrivain philosophe Régis Debray, l’histoire de treize livres qui, depuis 1945, ont contribué à bouleverser la marche des choses en transformant les représentations à l’échelle internationale. Sartre, Camus, Orwell, Levi-Strauss, Arendt, Kundera, Soljenitsyne, Foucault font partie des auteurs abordés par ce podcast qui nous rappelle « [qu’] il y a des écrits qui font tomber les murs – de la Bastille, de Berlin et d’ailleurs ».
Enfin, « Une histoire et… Oli », sur France Inter, propose des histoires du soir pour les enfants. Cette série de podcasts originaux comprend en effet des contes pour enfants imaginés et racontés par des grands auteurs français. Ici, le podcast précède le livre puisque les récits diffusés sur les ondes finissent par donner lieu à de vrais albums illustrés. Il est donc possible de lire, après les avoir écoutés, les histoires de « Reiko et l’ourson », de Leïla Slimani, ou encore « Le téléphone du Père Noël » de François Morel.
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