1.Le cadre juridique : La législation française en matière de "spam"
Remarque préliminaire : mesure du spam
Afin de compléter les éléments qualitatifs et quantitatifs existants sur le spam, et pouvoir ainsi ajuster la politique publique contre cette pratique, une "Etude du spam et du courrier électronique" a été réalisée. Le projet a été réalisé par la Direction du Développement des Médias et a été mis en application par la société Ipsos Media qui a effectué une enquête afin de mieux comprendre ce que les internautes perçoivent comme étant du spam.
L’étude, qui a permis d’observer un échantillon réellement représentatif des internautes et de leurs courriers électroniques, montre que le tiers des courriers reçus ont été perçus par leurs destinataires comme étant du spam. Elle montre aussi qu’une multitude de paramètres entrent en ligne de compte dans le niveau de spam reçus, comme le niveau d’équipement ou la connaissance de l’internet. Les résultats de l’enquête seront bientôt disponibles.
Dispositions "anti-spam"
- Législation "anti-spam"
- la directive européenne n°2002/58 du 12 juillet 2002 relative à la vie privée et aux communications électroniques ;
- la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN), transposition de la directive "vie privée et communications électroniques" ;
- la loi n° 78 -17 du 6 janvier 1978 "informatique, fichiers et libertés" est applicable pour la collecte frauduleuse d’adresses électroniques.
- Approche opt-in et opt-out
La loi pour la confiance dans l’économie numérique consacre l’approche "opt-in", mécanisme protecteur pour le consommateur, conformément à la directive "vie privée et communications électroniques".
Ainsi, "est interdite la prospection directe, au moyen d’automates d’appel, d’un télécopieur ou d’un courrier électronique utilisant, sous quelque forme que ce soit, les coordonnées d’une personne physique qui n’a pas exprimé son consentement préalable à recevoir des prospections directes par ce moyen." Article 22 alinéa 1er .
A l’opposé, l’approche opt-out dispense le prospecteur d’une autorisation de l’internaute pour envoyer un courrier électronique.
- Exceptions à l’opt-in
Il existe deux dérogations au régime de l’opt-in qui concernent :
- la prospection directe vers les personnes morales (cependant si une adresse de courrier électronique professionnel permet directement ou indirectement d’identifier un individu, son consentement à être prospecté doit être obtenu ;
- les relations post contractuelles :
La prospection directe par courrier électronique est autorisée, dans le respect de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 si :
- les coordonnées électroniques du destinataire ont été recueillies directement auprès de lui, à l’occasion d’une vente ou d’une prestation de service ;
- la prospection directe concerne des produits ou services analogues à ceux antérieurement fournis par la même personne ;
- le destinataire se voit offrir, de manière expresse et dénuée d’ambiguïté, la possibilité de s’opposer, sans frais et de manière simple, à l’utilisation de ses coordonnées électroniques lorsque celles-ci sont recueillies et chaque fois qu’un courrier électronique de prospection lui est adressé.
Dans tous les cas de figure, chaque message électronique doit prévoir les modalités de désinscription et préciser l’identité de la personne pour le compte de laquelle le message a été envoyé.
- Sanctions encourues par les auteurs de "spam"
La loi pour la confiance en l’économie numérique prévoit que des sanctions pénales soient fixées par un décret en Conseil d’État (article 22 ).
Textes légaux applicables :
Le spam peut être réprimé au titre des infractions prévues par différents textes :
Loi pour la confiance dans l’économie numérique :
L’article 22 de la LCEN, modifiant le code de consommation et le code des postes et télécommunications, réprime la publicité par voie électronique. Il s’agit du non respect des dispositions prévues dans l’article L.33-4-1 du code des postes et des télécommunications ou de l’article L.121-20-5 du code de la consommation.
En effet, il est :
- interdit d’émettre, à des fins de prospection directe, des messages au moyen d’automates d’appel, télécopieur ou courrier électronique, sans indiquer de coordonnées valables auxquelles le destinataire puisse transmettre une demande tendant à obtenir que ces communications cessent sans frais autre que ceux liés à la transmission de celle-ci.
- il est également interdit de mentionner un objet sans rapport avec la prestation ou le service proposé.
Chaque message électronique envoyé doit prévoir des modalités de désinscription.
Le non respect du consentement préalable est sanctionné par 750 euros d’amende pour chaque message irrégulièrement expédié (article R.10-1 du code des postes et des télécommunications).
Loi informatique et libertés :
Les opérations de prospection par courrier électronique, quelque soit leur nature sont soumises au respect de la législation relative à la protection des données personnelles loi informatique et liberté du 6 janvier 1978 modifiée par la loi du 6 août 2004 qui stipule que :
- les fichiers d’adresse de messageries doivent être déclarés auprès de la CNIL (article 23).
Conformément aux articles 15 et 16 de la loi de 1978, tout traitement automatisé d’informations nominatives comportant des adresses électroniques doit, préalablement à sa mise en œuvre, avoir fait l’objet, auprès de la CNIL, soit d’une demande d’avis pour le secteur public, soit d’une déclaration pour le secteur privé.
Sanction : le défaut de formalités préalables au traitement automatisé d’informations nominatives est sanctionné de 5 ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende (article 226-16 du code pénal modifié par la loi du 6 août 2004).
- la collecte des adresses de courrier électronique doit se faire dans le respect des règles s’y afférant.
Les adresses de messagerie utilisées à des fins de prospection doivent avoir été collectées de manière loyale. Les personnes concernées doivent être informées lors de la collecte, de l’utilisation de leur adresse ou de sa cession à un tiers à des fins de prospection. La CNIL recommande que le droit d’opposition ou le recueil du consentement puisse s’exercer directement à partir du formulaire de collecte par l’apposition d’une case à cocher.
Sanction : La collecte par un moyen frauduleux, déloyal ou illicite des données dans le but d’un traitement d’informations nominatives est sanctionnée de 5 ans d’emprisonnement et de 300000 euros d’amende (article 226-18 du code pénal).
- les données collectées ne peuvent être conservées que pendant une durée déterminée, justifiée par la finalité du traitement.
Autres dispositions juridiques :
Enfin, l’usage abusif du courrier électronique est interdit à plusieurs titres selon la nature et les conditions de l’envoi. Est notamment interdit en France tout courrier électronique :
- envoyé à des fins de publicité mensongère : 2 ans d’emprisonnement et/ou 37 500 euros d’amende (article L.121-1 du code de la consommation). Cette peine maximale d’amende prévue peut être portée à 50% des dépenses de la publicité constituant le délit (article L213-1 du code de la consommation).
- caractérisant un manquement contractuel (article 1147 du code civil) ou une méconnaissance des usages contractuels (article 1135 du code civil).
- envoyé à des fins pénalement répréhensibles comme par exemple la tromperie ou l’escroquerie (article 313-1 du code pénal).
- provoquant une entrave au fonctionnement d’un système de traitement automatisé de données : 5 ans et 75 000 euros d’amende (art 323-2 du code pénal modifié par la Loi pour la confiance dans l’économie numérique). Par exemple, une opération de spamming peut par l’ampleur du nombre de messages envoyés provoquer un blocage des serveurs ou de la bande passante ("mailbombing").
- Sur un plan contractuel, les conditions générales d’utilisation des services d’accès à internet font référence au code de conduite sur Internet (Netiquette) ou interdisent explicitement le "spamming". Les fournisseurs d’accès peuvent en cas de violation sanctionner leurs clients émetteurs de spam en les privant de l’accès à Internet. Plusieurs décisions jurisprudentielles ont reconnu la licéité de cette solution, notamment sur le fondement de l’article 1135 du code civil (ex : TGI Rochefort 28 février 2001).
- Conventions / accords bi ou multilatéraux conclus antérieurement et qui peuvent être utiles à la lutte contre le spam
Il n’existe aucune convention condamnant explicitement le fait d’envoyer des spams. Cependant, de par leur matière et les dispositions qu’elles contiennent certaines sont applicables.
Conventions multilatérales
En matière de vie privée :
- Convention relative aux Droits de l’enfant du 20 novembre 1989
La convention a pour intérêt protéger la vie privée de l’enfant. Grâce au protocole sur le matériel pédophile envoyé par voie électronique et le matériel pornographique mettant en scène des enfants et distribués sur internet, le champ d’application de la convention a été élargi.
- Convention européenne des droits de l’homme du 4 novembre 1950
Cette convention a pour intérêt protéger le respect a la vie privée. L’intrusion dans la vie privée d’une personne, soit directement, soit par courrier, est illégale. On peut considérer l’envoi de messages non sollicités vers une adresse électronique, comme une violation au droit à la vie privé (interprétation de l’article 8).
En matière civile et commerciale :
- Règlement de Bruxelles du 20 décembre 2000
Son champ d’application le domaine civil et commercial. Il désigne le critère de compétence judiciaire générale qui est déterminé par le territoire du domicile du défendeur (article 2).
Au niveau du spam, le tribunal compétent sera celui du lieu où a eu lieu l’infraction, celui ou le spam a été reçu (article 5 alinéa 1).
Dans le cas où il existe un contrat entre deux professionnels, le tribunal compétent sera celui indiqué dans la clause d’attribution de juridiction (article 23 alinéa 1).
Le règlement prévoit la reconnaissance et l’exécution d’une décision étrangère dans le cas ou il y a eu un jugement (chapitre III reconnaissance et exécution).
- Convention de Rome du 19 juin 1980
Elle est applicable dans des situations comportant un conflit de lois. En matière de contrats entre professionnels, la convention consacre le principe de désignation de loi applicable aux obligations entre contractants (article 3).
A défaut d’une prise de décision de la part des parties du contrat, la convention désigne comme loi applicable la loi du pays avec lequel le contrat présente les liens plus étroits (article 4, alinéa 1er).
Au bénéfice du consommateur, le règlement prévoit une dérogation au principe de l’autonomie de la volonté, car la liberté de choix ne peut pas avoir pour résultat de priver le consommateur de la protection des dispositions impératives (article 5-2).
En matière pénale :
- Traité sur l’Union européenne 24 décembre 2002
Il prévoit l’unification des forces de police dans l’espace de Schengen pour éviter des délits comme la criminalité organisée, la fraude ou les crimes contre les enfants.
- Convention sur la cybercriminalité du 23 novembre 2001
Cette convention définit les délits commis pas voie électronique et qui pourront être sanctionnés par la loi du pays où ils ont été commis ; elle ne fait pas mention du spam comme un acte criminel, cependant à travers la définition du spam nous pouvons dégager plusieurs délits prévus dans cette convention. Elle prévoit une aide judiciaire au niveau international en matière pénale et judiciaire afin de faire des investigations ou des procédures liées aux délits informatiques. Aussi dans le cas d’extradition, elle pourrait être complémentaire à la Convention européenne d’extradition. Malheureusement la convention a été ratifiée uniquement par 5 pays.
- Convention du conseil d’Europe du 20 avril 1959
Cette convention envisage la coopération des pays membres de l’Union Européenne dans le domaine d’entraide judiciaire ; elle permet de réduire le risque d’un possible refus d’extradition. De la même manière elle crée une union pour la lutte contre les crimes organisés. Il est important de remarquer que le phénomène du spam commence à présenter des variantes du crime organisé.
- Convention européenne d’extradition du 13 décembre 1957
Il est possible de demander l’extradition des personnes ayant fait un envoi massif de courriers électroniques. Les autorités du pays vers lequel le spamming a été fait pourront faire appel aux dispositions de la convention.
Conventions bilatérales entre la France et divers pays du monde
En matière de coopération internationale, diverses conventions bilatérales sont applicables dans le domaine de la lutte contre le spam.
- Brésil : Convention d’entraide judiciaire en matière pénale, signée à Paris le 28 mai 1996 ; convention d’extradition.
- Canada : Convention d’entraide judiciaire en matière pénale, signée à Paris le 15 décembre 1989 et entrée en vigueur en France le 1 mai 1991.
- Corée : Traité d’entraide judiciaire en matière pénale, signé à Paris le 2 mars 1995. Il n’existe pas encore de convention d’extradition entre la France et la Corée.
- États Unis : Traité d’entraide judiciaire en matière pénale avec les États-Unis datant du 1er décembre 1991. Traité d’extradition du 1er février 2002.
- Hong Kong : Convention d’entraide judiciaire, signée le 25 juin 1997.
- Mexique : Convention d’entraide judiciaire en matière pénale, signée à Mexico le 27 janvier 1994. Traité d’extradition, signé à Mexico le 27 janvier 1994.
Directives européennes :
- la directive n° 2002/58/ du 12 juillet 2002 relative à la vie privée et aux communications électroniques, également transposée par la LEN : elle adopte l’approche "opt-in" et couvre les messages par SMS et les messages électroniques reçus par n’importe quel terminal fixe ou mobile.
- la directive n° 97/7/CE du 20 mai 1997 relative à la protection des consommateurs en matière de contrats à distance,transposée par l’ordonnance n° 2001-741 du 23 août 2001 : renforce la sécurité du commerce électronique, notamment en étendant le champ d’application de la vente à distance aux prestations de services mais en matière de spamming, la directive consacrait l’approche "opt-out".
- la directive n° 95/46/CE du 24 octobre 1995 relative à la protection des données à caractère personnel transposée par la loi du 6 août 2004 : les données personnelles ne peuvent être traitées par informatique qu’à la condition d’être collectées de manière loyale et pour des finalités précises. La personne a un droit d’information sur l’utilisation de ses données et un droit d’opposition.
De plus une décision 276/99/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 janvier 1999, adopte un plan d’action communautaire visant à promouvoir une utilisation sûre d’internet par la lutte contre les messages à contenu illicite et préjudiciable diffusés sur les réseaux mondiaux. L’objectif général du plan d’action est d’encourager un environnement favorable au développement de l’industrie liée à internet.
Autorité indépendante
- Autorité indépendante compétente en matière de lutte contre le spam
La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), autorité administrative indépendante a été instituée par la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.
- Pouvoirs d’injonction ou de sanction
Selon la LCEN, la CNIL a compétence pour veiller au respect des dispositions anti-spam en utilisant les compétences qui lui sont reconnues par la loi 78-17 du 6 janvier 1978 ; Pour cela, elle pourra notamment recevoir par tous moyens les plaintes relatives au spam (article 22).
La CNIL peut être saisie ou encore se saisir elle même. Si nécessaire, elle a le pouvoir de dénoncer des plaintes au bureau du Procureur. Toutefois, elle ne peut assurer un traitement individuel pour chaque plainte reçue.
La loi du 4 août 2004 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement de données à caractère personnel et modifiant la loi du 6 janvier 1978 renforce les pouvoirs de le CNIL en la dotant d’un pouvoir de sanction pécuniaire (150.000 euros maximum, et plus en cas de récidive).
Le renforcement des pouvoirs de sanctions de la CNIL permet également à cette autorité de :
- dénoncer les faits au parquet (article 11.2 de la loi du 6 janvier 1978 modifiée) ;
- décider de procéder à une mission de vérification sur place (article 11 et 44 de la loi). Elle peut à la suite de cette mission de contrôle décider de dénoncer les faits au parquet ou prononcer des sanctions ;
- prononcer un avertissement qu’elle peut rendre public (article 45 et 46) ;
- mettre en demeure l’expéditeur de faire cesser l’envoi de spam (article 45) ;
- prononcer, si la mise en demeure est restée sans effet (article 45 et 47), une sanction pécuniaire (amende administrative) ;
- prononcer, si la mise en demeure est restée sans effet (article 45 et 47), une injonction de cesser le traitement (l’envoi de spams).
La CNIL a compétence pour proposer au Gouvernement les mesures législatives ou réglementaires qui lui paraissent utiles.
Recours
- Recours : collectifs ou individuels
Les recours peuvent être engagés au niveau collectif ou individuel.
Organisations de droit privé à but non lucratif habilitées à agir dans le cadre de la défense de l’intérêt des destinataires des spams
Les associations sont habilitées à agir dans le cadre de la défense de l’intérêt des destinataires de spams.
Conditions
L’association doit disposer de la personnalité juridique : sa déclaration à la préfecture doit être régulière et complète.
Elle doit également démontrer un intérêt légitime, personnel et direct à agir.
Le droit d’agir en justice dans l’intérêt collectif des consommateurs est expressément reconnu aux associations reconnues comme associations de défense des consommateurs (L 421-1 code de la consommation).
- Juge compétent
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- Conflits d’attribution de juridiction
Les conflits d’attribution de juridiction sont régis au niveau communautaire par le règlement de Bruxelles 1er du 22 décembre 2000.
Ce règlement s’applique en matière civile et commerciale et quelle que soit la nature de la juridiction si le défendeur est domicilié dans un État membre de la Convention.
Si le défendeur n’est pas domicilié sur le territoire d’un État contractant, la compétence est, dans chaque État contractant, réglée par la loi de cet État.
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- Critères de rattachement
Matière extra- contractuelle
Litige extra communautaire
Si l’une des parties au litige est de nationalité française, le tribunal français peut être compétent.
Le demandeur peut saisir, au choix :
- le tribunal du domicile du défendeur ;
- le juge du lieu où le dommage a été commis : option entre le lieu du chargement du message dommageable sur les réseaux, c’est-à-dire le pays duquel une page web est chargée sur un serveur, et le lieu d’expédition du message ;
- le juge du lieu où le dommage est subi : le lieu où le spam a été reçu.
Litige communautaire
Le demandeur peut saisir, au choix :
- le tribunal du domicile du défendeur ;
- le tribunal du lieu du fait générateur du dommage : lieu du chargement du message dommageable sur les réseaux, c’est à dire le pays duquel une page web est chargée sur un serveur, ou bien le lieu d’expédition du message ;
- le tribunal du lieu où le dommage est subi, c’est-à-dire le lieu où le message a été reçu.
Matière contractuelle
Litige extra communautaire
Si l’une des parties au litige est de nationalité française, le tribunal français peut être compétent.
« Contrat passé entre professionnels : »
Le demandeur peut saisir, au choix :
- le tribunal du domicile du défendeur : compétence de principe ;
- le tribunal du lieu d’exécution de la prestation de service.
Les clauses contractuelles qui lient des professionnels peuvent déroger aux règles de compétence territoriale.
« Contrat passé avec un consommateur : »
Il n’existe pas de convention internationale spécifique qui règle ce cas de figure. Toutefois, en vertu des règles de procédure civile françaises, les clauses contractuelles qui lient un consommateur avec un professionnel, ne peuvent pas déroger aux règles de compétence territoriale. Dès lors que le consommateur est français la juridiction compétente sera française.
Litige communautaire
« Contrat passé entre professionnels : »
La clause d’attribution de compétence juridictionnelle est acceptable. En l’absence d’une telle clause, le règlement de Bruxelles sera applicable.
Le demandeur peut saisir au choix :
- le tribunal du domicile du défendeur (article 2 RB1) ;
- le tribunal d’un État membre où, en vertu d’un contrat de fourniture de service, le service a ou aurait du être exécuté (obligation caractéristique du contrat) ;
- le tribunal du lieu où l’obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée (obligation litigieuse).
« Contrat passé avec un consommateur : »
Si le défendeur est domicilié dans un État membre et si le professionnel exerce des activités commerciales ou professionnelles dans l’État membre sur le territoire duquel le consommateur a son domicile, la règle de conflit désignée par le règlement de Bruxelles est applicable.
Si le demandeur est consommateur, il peut saisir au choix :
- le tribunal du lieu du domicile du consommateur ;
- le tribunal du lieu du domicile du professionnel .
Si le demandeur est professionnel, il peut saisir le tribunal du lieu du domicile du consommateur.
Matière pénale
Les tribunaux français sont compétents lorsque la loi pénale française est applicable, c’est-à-dire dès lors que l’un des faits constitutifs de l’infraction a eu lieu sur le territoire de la République.
Les tribunaux français sont aussi compétents lorsque l’infraction est commise par un Français ou par un étranger hors du territoire de la République lorsque la victime est de nationalité française au moment de l’infraction.
- Loi applicable
Matière extra- contractuelle
Il n’y a pas de loi qui détermine la loi applicable à un délit en matière de spam. La jurisprudence vise la loi du lieu du délit.
Le lieu du délit peut être celui du fait générateur du délit aussi bien que de celui de sa réalisation.
Matière contractuelle
« Litige extra- communautaire »
- la loi applicable à la forme est la loi du lieu de conclusion de l’acte ;
- la loi applicable au fond est la loi d’autonomie, à savoir la loi choisie par les parties dans une clause expresse lors de l’établissement du contrat. En l’absence d’une telle clause, le juge recherche les éléments qui peuvent être considérés comme révélant la volonté des parties.
« Litige communautaire »
Contrat passé entre professionnels :
- primauté de la loi désignée par les parties au contrat.
- à défaut, application de la loi du pays avec lequel le contrat présente "les liens les plus étroits", c’est-à-dire "la loi du pays où la partie qui doit fournir la prestation caractéristique a, au moment de la conclusion du contrat, sa résidence habituelle".
Contrat passé avec un consommateur :
La loi désignée par les parties au contrat prime, sauf si la loi désignée aboutit à priver le consommateur des dispositions impératives de la loi du lieu de sa résidence habituelle. Exemple : dispositions impératives prévues dans le code de la consommation.
A défaut de désignation d’une loi, la loi applicable est celle du lieu de résidence habituelle du consommateur, dans sa totalité.
Matière pénale
La loi pénale française est applicable dès lors que l’un des faits constitutifs de l’infraction est commis sur le territoire de la République, quel qu’il soit.
Principe de territorialité selon lequel la loi française est applicable dès que l’un des éléments constitutifs de l’infraction a été commis ou est réputé commis sur le territoire français.
Cependant, il faut noter que trois théories s’affrontent. Les juridictions hésitent entre la loi du pays d’émission, celle du pays de réception ou celle du public cible.
Investigation
Moyens d’investigation pour identifier et lutter contre les auteurs de spam. Le cadre juridique français permet, selon la nature des infractions, l’intervention de :
LA CNIL
La CNIL a lancé l’opération boîte à spam durant 3 mois à partir du 10 juillet 2002, boîte à lettre électronique permettant aux internautes d’y transférer les messages électroniques non sollicités, dans un but d’analyse.
La DDM pilote un nouveau projet de centre de ressources qui devrait voir le jour prochainement.
Ses principales fonctions seraient :
- de recevoir et classer les plaintes des utilisateurs transmises par courrier électronique ;
- de transmettre aux autorités celles susceptibles de donner lieu à des poursuites ;
- de rendre compte des actions entreprises et des résultats obtenus ;
- de transmettre les informations nécessaires à l’établissement de données statistiques sur l’ampleur du phénomène du spam en France ;
- d’organiser un centre de ressources anti-spam en France.
En s’appuyant sur le stockage de ces transferts en base de données et un système automatisé de traitement, le centre de ressources devrait alors :
- renseigner et orienter les personnes physiques ou morales dans la constitution et le suivi de leur dossier de plainte ;
- apporter un soutien logistique aux autorités compétentes pour assurer des poursuites en matière de spam.
La DGCCRF
L’autorité de protection des consommateurs, soit la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes a pour mission de mettre en œuvre les moyens de régulation et de contrôle permettant de créer un climat de confiance encourageant les consommateurs à devenir des cyberconsommateurs. À cet effet, elle a installé une station de contrôle du commerce électronique.
Elle est spécialement habilitée a rechercher et constater les infractions aux dispositions du code des postes et des communications électronique relatives au spam.
Elle connaît les contentieux liés à la protection du consommateur ainsi que ceux liés à l’envoi non sollicité de courriers électronique et prévus par la loi pour la confiance dans l’économie numérique (LEN).
Les services d’investigation de la police et de la gendarmerie
Les services généraux de la police et de la gendarmerie ainsi que des agents plus spécialisés sont habilités à traiter les cas de cybercriminalité et plus particulièrement des cas de spam. La cybercriminalité recouvre l’ensemble des infractions pénales susceptibles de se commettre sur les réseaux de communications électronique en général.
Elle recouvre deux types d’infractions pénales :
- les infractions directement liées aux technologies de l’information et de la communication (TIC) dans lesquelles l’informatique est l’objet même du délit ;
- et les infractions dont la commission est liée ou facilitée par les TIC et pour lesquelles l’informatique n’est qu’un moyen.
Des investigateurs spécialisés sont formés au niveau régional afin de venir en renfort des agents qui ont reçu des plaintes dans le champs des technologies de l’information et de la communication. Par ailleurs, des services spécialisés au niveau national sont compétents pour traiter ces affaires. Ces services sont placés sous l’autorité du Procureur de la République. Ils peuvent recevoir une lettre de requête d’un magistrat qui examine une affaire.
Evolution de la jurisprudence
Différents fondements vont progressivement être avancés pour condamner la pratique du spam :
Pour la première fois en droit français la pratique du spam a été condamnée par une ordonnance de référé du Tribunal de grande instance de Paris le 15 janvier 2002. En l’espèce le spammeur avait engagé une action contre ses fournisseurs d’accès à internet pour rupture unilatérale de contrat, pour avoir coupé ses accès suite à la constatation d’un nombre important de spams. Cet internaute a été condamné à payer la somme de 1 524 euros pour procédure abusive.
Une affaire similaire a été jugée le 28 février 2001 par le TGI de Rochefort sur Mer mais pour l’envoi massif de messages publicitaires en direction de forums de discussion. Les juges motivent le jugement par l’art 1135 du code civil qui dispose que "les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donnent à l’obligation d’après sa nature".
Le droit des contrats va ainsi être appliqué pour condamner des spammeurs : le Tribunal de Commerce de Paris du 5 mai 2004 a sanctionné un commerçant en ligne spécialisé dans le sport qui réalisait des campagnes d’e-mailing publicitaires, par le biais du fournisseur d’accès AOL, en utilisant des adresses de messagerie électronique de MSN Hotmail. Le raisonnement est le suivant : le recours à ces services implique le respect de leurs conditions d’utilisation. Or celles d’AOL et MSN Hotmail interdisent explicitement l’utilisation de leurs services à des fins commerciales. Le commerçant se trouve lié par ces contrats qu’il a souscrits en ligne, même s’il n’a pas apposé sa signature, il voit donc sa responsabilité engagée.
Le fondement du droit des marques va aussi être avancé dans une ordonnance de référé du 6 avril 2004 du TGI de Paris qui a interdit à une société d’utiliser la marque communautaire Hotmail de Microsoft. Le juge a estimé que l’utilisation de l’adresse "package-internet@hotmail.com" était de nature à entraîner un risque de confusion dans l’esprit du public qui pouvait penser que Microsoft avait autorisé cette prestation.
Cette société est d’ailleurs celle poursuivie en justice en 2002 à la suite de l’opération "boîte à spam" menée par la CNIL et qui avait tout d’abord été relaxée le 7 décembre 2004 par le TGI de Paris, décision infirmée finalement par la CA de Paris le 18 mai 2005. La société est donc condamnée à payer 3 000 euros d’amende sur le fondement de la loi Informatique et libertés de 1978 et le caractère déloyal de la collecte de données nominatives démontré par le non-respect du droit d’opposition des destinataires du message.
La législation française depuis la LCEN subordonne désormais l’utilisation du courrier électronique dans les opérations de prospection commerciale au consentement préalable des personnes physiques (La décision de la Cour d’Appel conserve néanmoins sa portée pour toutes les autres opérations, sans caractère commercial de communication massive par courrier électronique).
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