Monsieur le ministre, cher Jack LANG,,
Cher Didier DESCHAMPS, Directeur du Théâtre National de Chaillot,
Madame Clarisse MAZOYER, Présidente de l’OPPIC,
Monsieur Vincent BROSSY,
Mesdames et messsieurs,
Chers amis,
Nous ouvrons ensemble, aujourd’hui, une nouvelle page de la vie de ce lieu. Mais ce faisant, nous lui donnons surtout les moyens de prolonger son Histoire. Cette rénovation va vous permettre de prolonger l’ambition universelle que le Théâtre national de Chaillot porte en lui, intrinsèquement, depuis sa création.
Parce que le premier palais du Trocadéro a été construit à la faveur d’une Exposition universelle, en 1878. Parce qu’il a porté, à partir de la fondation du Théâtre National Populaire par Firmin GÉMIER, en 1920, la vocation d’une création « élitaire pour tous » - selon la formule d’Antoine VITEZ. Parce qu’il a été remplacé par le Palais de Chaillot à la faveur d’une nouvelle Exposition internationale, en 1937 – voilà donc 80 ans ; Exposition qui s’est déroulée dans le contexte historique que l’on sait, mais dont l’ambition originelle était bien de « regrouper tout ce qui unit les hommes et rien de ce qui les sépare ». Enfin, parce que ce lieu a accueilli la signature de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, en 1948. Déclaration qui, je le rappelle, pose la notion de « droits culturels », indispensables à la « dignité » de chaque être humain, et « au libre développement de sa personnalité » ;
Et lorsque le ministère de la Culture a choisi d’en faire un lieu dédié essentiellement à la danse, en 2008, c’était pour donner à cet art l’établissement public qui lui manquait. Mais c’était aussi, et plus largement, une façon de réaffirmer un engagement pour tous les arts, pour toutes les formes d’expression. C’est cette ambition universelle, profondément ancrée dans l’identité de cette institution, que nous devons pouvoir porter un peu plus loin grâce à la rénovation.
Voilà mon message aujourd’hui : gardez toujours à l’esprit que si nous avons refait les murs de cet endroit, ce n’est pas pour mieux le fermer, c’est pour lui permettre d’être davantage ouvert encore. Toujours plus ouvert à la création, toujours plus ouvert aux publics, dans leur diversité et toujours plus ouvert sur le territoire.
Je sais que vous ne m’avez pas attendue pour porter ces priorités, cher Didier DESCHAMPS.
Mais je suis là pour vous dire que nous les partageons. Et que le ministère soutiendra cette direction.
Etre toujours plus ouvert sur la création, d’abord. Si ces travaux ont été entrepris, c’est pour elle : c’est pour offrir à nos danseurs et chorégraphes un terrain d’expression supplémentaire. Cette salle Firmin GÉMIER va permettre d’accueillir une nouvelle diversité de projets. Plus petite que le plateau Jean VILAR, elle a va permettre à des productions non moins ambitieuses, mais plus réduites, de trouver un espace adapté. La transformation de la salle Maurice BÉJART en salle de répétition et d'expérimentation va aussi permettre à la création de se développer.
Le travail de création est un travail exigeant, de longue haleine, qui requiert énormément d’investissement. Ces deux salles sont au service de ce travail : elles vont permettre aux danseurs et chorégraphes d’avoir davantage de temps et d’espace pour s’échauffer ; pour répéter – y compris devant du public ; pour expérimenter ; tenter de nouvelles choses.
Vous avez fait de ce Théâtre, cher Didier DESCHAMPS, le premier pôle de production et de diffusion de la création chorégraphique en France ; et un pôle central à l’échelle européenne. Vous n’agissez évidemment pas seuls : vous inscrivez dans le maillage extraordinaire construit pour la danse en France, depuis plus de 30 ans, par les compagnies, par les lieux labellisés – les Centres chorégraphiques nationaux, les Centres de développement chorégraphique…
Mais en tant qu’établissement public, vous avez une responsabilité particulière. Nous comptons sur vous, avec vos équipes, pour profiter de l’élan donné par cette rénovation, et rayonner encore plus loin.
L’objectif, ensuite, c’est d’ouvrir cette institution toujours davantage en direction des publics. Et je mets le terme au pluriel. L’un des grands défis du quinquennat est la lutte contre l’exclusion, sous toutes ses formes, à commencer par l’exclusion culturelle.
C’est le cœur de votre mission de service public : agir au service des publics, tous les publics – et faire « plus » pour ceux qui en ont le « plus » besoin. Il ne suffit pas de faire grandir la création pour faire grandir la culture dans le cœur de notre nation, vous le savez bien. Il faut avoir le souci constant de sa transmission : vers tous, partout.
C’est la boussole de mon projet : développer « l’accès » de tous les citoyens à la création que l’on soutient. C’est aussi la vôtre, cher Didier. Vous n’avez cessé de le montrer. Je compte sur vous pour continuer.
Ces travaux vont améliorer l’accessibilité du Théâtre pour les personnes en situation de handicap. Mais il faudra continuer à œuvrer à la diversification des publics. Ce qui signifie faire un effort particulier en direction de ceux qui ne fréquentent pas les salles de danse, de théâtre : pour des raisons sociales, économiques, géographiques. Ce qui signifie aller les toucher là où ils sont, autant que leur ouvrir les portes ici.
Ce qui signifie, aussi, préparer dès aujourd’hui la diversité du public de demain : c’est-à-dire s’adresser aux jeunes. C’est une priorité absolue. C’est notre responsabilité collective. Au niveau national, je souhaite concentrer les moyens sur la jeunesse : à travers la généralisation de la pratique artistique à l’école – et notamment de la danse ! ; à travers la mise en place du Pass Culture, qui rendra les jeunes autonomes dans leurs choix culturels.
Ici, vous devez aussi penser à ce jeune public, en permanence : Je sais que c’est déjà une préoccupation centrale pour vous. Et, je pense notamment au programme « Chaillot en partage », par lequel vous cherchez à toucher des jeunes qui – de par leur situation personnelle, familiale, ou physique – resteraient éloignés de la richesse artistique qui se crée ici.
Enfin, il faut ouvrir encore davantage ce lieu sur le reste du territoire.
Avec ces travaux, le ministère de la Culture ne choisit pas d’investir dans une institution parisienne : nous investissons dans une institution « nationale ».
Ayons toujours cela à l’esprit.
Ne pensez jamais ce Théâtre comme un bâtiment, pensez le toujours comme un cœur émetteur. Et l’impulsion que vous faites germer ici doit couvrir toutes les régions.
Vous ne manquez pas d’idées : je pense par exemple au partenariat qui a été établi avec la Chapelle d’Annonay, dans l’Ardèche, pour développer des résidences artistiques « hors-les-murs ». Il faut continuer en ce sens : multiplier les tournées, les partenariats, les projets hors de Paris, toujours avec la même exigence – pour les danseurs, pour les chorégraphes.
Voilà les quelques mots que je voulais avoir aujourd’hui. Vous faites ici un travail remarquable. Vous êtes à la hauteur de l’Histoire qui vous a été confiée.
Firmin GÉMIER avait dit ceci : « Je tiens à ma légende. Il faut toujours avoir sa légende ».
En prolongeant la sienne, vous écrivez la vôtre. C’est toute la France qui doit en profiter. C’est toute la France qui en a besoin.
Je vous remercie encore pour votre travail. Et je compte sur vous pour continuer.