Monsieur le préfet de la Haute-Vienne,

Mesdames et messieurs les parlementaires,

Mesdames et messieurs les représentants des présidents du conseil régional et du Conseil départemental,                                                                                                             

Monsieur le maire de Limoges,

Monsieur le président de la communauté d’agglomération Limoges-Métropole,

Mesdames et messieurs les élus, 

Madame la rectrice d’Académie, Madame la déléguée générale du Québec à Paris,

Monsieur le Président du festival des Francophonies,

Cher Alain VAN DER MALIÈRE,

Madame la Directrice, chère Marie-Agnès SEVESTRE, dont je salue toute l’équipe,

Chers amis,

Je suis très heureuse d’être ici parmi vous.  Ce festival m’est cher, je le dis avec force, parce que je retrouve ici deux échos qui me guident au quotidien au ministère : l’écho des territoires, d’une part, qui guide mon combat contre le clivage Paris-province qui persiste, dans la répartition des moyens de mon ministère.

J’ai engagé un mouvement de rééquilibrage, au service de ceux qui, comme vous tous ici, s’engagent au cœur de nos régions : au service de l’équité territoriale et au service des citoyens. Et puis il y a l’écho de la diversité culturelle, qui est toujours à l’honneur ici : cette diversité forme le cœur du modèle français, mais c’est un trésor fragile, pris pour cible par ceux qui prônent le retour aux frontières, ou réduisent la France à un prénom…La diversité culturelle est mon combat permanent.

Pour la nourrir, la France a une chance immense : c’est la francophonie. Cette chance, ce festival nous aide à la saisir depuis maintenant trente-cinq ans, avec une programmation d’un éclectisme et d’une qualité exceptionnels. Je veux profiter d’être avec vous aujourd’hui pour rendre un hommage appuyé à Marie-Agnès SEVESTRE, qui aura fait vivre ce festival pendant treize années : 

Chère Marie-Agnès : vous avez décidé de transmettre le flambeau mais votre empreinte restera. Merci pour votre engagement fidèle, constant, passionné. Merci pour tout. J’en profite pour saluer aussi celui qui vous succèdera : cher Hassan KOUYATÉ, merci pour votre engagement, je vous souhaite tout le meilleur à la tête de cette belle manifestation. Un grand merci, plus largement, à toutes les équipes, les élus et les partenaires qui font de cet événement une réalité, année après année. 

Quand je suis arrivée au ministère de la Culture et que certaines voix m’ont dit l’urgence de « dépoussiérer » la francophonie, je dois dire que j’ai d’abord été surprise…Parce que dans ma vie d’éditrice, la francophonie avait toujours été là : vivante, battante, flamboyante. Et parce que je connaissais les manifestations exemplaires comme celles-ci. Mais j’ai constaté qu’au niveau de nos institutions, un bout de chemin restait à faire. Qu’une forme de malaise continuait à flotter.  

Il est de notre responsabilité de ne pas laisser la francophonie au passé, d’en faire une politique d’avenir. Le Président de la République a marqué sa détermination.

Je porte avec lui cette ambition. Mon ministère – nos opérateurs, nos labels – doivent prendre toute leur part, et s’engager davantage aux côtés de ceux qui se mobilisent, comme vous, pour faire vivre la francophonie. Dans le domaine du spectacle vivant, qui nous rassemble ici, j’ai dit clairement ma volonté de rendre la francophonie plus visible, plus audible, sur toutes les scènes – petites et grandes, territoriales et nationales.

C’est le sens de la mission que j’ai confiée en début d’année à Xavier NORTH et à Paul de SINETY – deux personnalités engagées de longue date pour la langue française, que je salue chaleureusement et que je remercie pour leur travail. Ils m’ont remis leur rapport, qui formule des propositions sur la promotion de la francophonie dans le champ des arts de la scène. Je veux vous présenter aujourd’hui une première série de mesures que je retiens de ce travail et que je souhaite porter avec mon ministère.

Pour commencer, nous allons accompagner le développement de « pôles de référence » pour les artistes francophones en France. Il s’agit de s’appuyer sur des lieux déjà fortement engagés pour structurer nos soutiens à la création, à la production, et à la diffusion des artistes.

Nous avons d’ores et déjà identifié trois structures, réparties sur le territoire : -Ce Festival des Francophonies en fait partie, naturellement : il a vocation à devenir un pôle de référence en région pour le spectacle vivant francophone. Le soutien de mon ministère sera renforcé pour permettre à ce festival de renforcer sa mission de vitrine de la création francophone et de développer encore ses moyens de production.

Dans le même esprit, nous renforcerons les soutiens à « Théâtre Ouvert », qui est engagé depuis trois décennies pour la promotion et la diffusion de textes contemporains d'auteurs vivants francophones :  Il a vocation à constituer un « pôle de référence » pour l’écriture contemporaine dans le théâtre francophone.

Enfin, nous appuierons nos soutiens à « La Chartreuse » de Villeneuve-lès-Avignon, en vue d’en faire le « pôle de référence » pour les résidences francophones en France. Il s’agira notamment de développer des partenariats de résidences croisées à l’international, avec nos amis du Québec, de la Wallonie, des pays d’Afrique et du Maghreb entre autres. L’idée de ces « pôles de référence » n’est pas d’enfermer la création francophone dans une poignée de lieux dédiés, bien au contraire : ils ont vocation à servir de plateformes de promotion de jeunes talents et de lieux d’émergence pour les artistes francophones, appelés à circuler ensuite sur les scènes de la France entière. 

C’est la vocation portée depuis toujours par ce festival.  Il suffit de rappeler la mémoire de l’immense Sony Labou Tansi,  de citer Dieudonné Nangouna, Alaxandra Badea, Annick Lefebvre, Robert Lepage , Wajdi Mouawad , Guy Régis Junior, Koffi Kwaoulé, Leonora Miano , Mohamed kacimi ou encore Gao Xingjian : la plupart de ces auteurs, désormais reconnus dans le monde entier, ont pu faire leurs débuts en France grâce à ce festival. Ils sont unanimes pour dire l’importance d’espaces comme celui-ci.  

Ils disent aussi la nécessité d’étendre plus largement la diffusion des artistes francophones en France, de développer l’accueil et l’accompagnement des jeunes artistes venus d’ailleurs.

Au-delà de ces pôles de référence, nous allons nous appuyer sur les institutions et les réseaux de création, de production, de diffusion pour valoriser le travail et la visibilité des artistes francophones. Le rapport de Xavier NORTH et Paul de SINETY fait ressortir la nécessité de construire une stratégie véritablement articulée, mobilisant différents partenaires, pour promouvoir la diversité des voix francophones sur la scène française.

Nous allons bâtir une action globale, qui s’appuie sur un maillage territorial et qui accompagne de bout en bout la vie des œuvres, sur les trois phases : la création ; la production ; et la diffusion. 

Nous allons nous appuyer sur des dispositifs et des institutions qui ont fait leur preuve, en coordonnant leur action. En premier lieu, nous allons nous appuyer davantage sur l’ONDA, l’Office national de la Diffusion artistique.

Il se verra confier une nouvelle mission de repérage et de diffusion d’artistes francophones, à travers de deux programmes spécifiques : L’un pour les auteurs et créateurs ultramarins : il permettra de renforcer la circulation des œuvres et des artistes au sein des Outre-Mer, et entre les Outre-Mer et la métropole.

Un autre sur le repérage et la diffusion du spectacle francophone hors Outre-mer. Il a vocation à mettre en relation les professionnels français et francophones des autres pays ainsi qu’à soutenir les scènes françaises dans l’accueil des spectacles francophones. 

L’ONDA mettra en place un fonds à destination des lieux de diffusion, afin de favoriser la diffusion de créations francophones sur le territoire national.

Par ailleurs, nous allons nous appuyer davantage sur l'Institut français, pour renforcer le soutien à la création francophone dans le monde entier.

 

Conformément au vœu du Président de la République, il se verra confier la mise en œuvre d'un « fonds de production et de diffusion de la création francophone à l'étranger», avec une attention particulière portée sur la création théâtrale.  Ce fonds a vocation à soutenir la visibilité de la création francophone sur les scènes internationales.  Un premier appel à projets, sera lancé avant la fin de l'année pour des actions dès le premier semestre 2019. 

L’Institut français va également refondre et réabonder son programme « Afrique et Caraïbes en création », pour en faire un outil de coopération avec les acteurs locaux dans les pays concernés. 

Il s’agit de donner plus de moyens à des structures identifiées localement pour accompagner la formation et la professionnalisation des créateurs francophones. Le rapport mentionne par exemple les Récréâtrales à Ouagadougou, Mantsina sur scène à Brazzaville, ou encore l’Univers des Mots à Conakry...

La « saison des cultures africaines » qui se déroulera en France en 2020, dont l’Institut français est l’opérateur, sera par ailleurs un temps fort pour la reconnaissance de la création artistique francophone venue d’ailleurs.

Enfin, nous allons renforcer le soutien aux scènes qui s’engageront dans la production d’œuvres et d’artistes francophones. Au total, l’ensemble de ces mesures représentent près de deux millions d’euros, pour le renforcement du soutien à la création, à la production et à la diffusion des œuvres et des artistes francophones.

Au sein du ministère de la Culture, je souhaite que cet enjeu soit pris en compte de façon transversale par l’ensemble de nos politiques publiques. J’ai demandé au Délégué général à la langue française et aux langues de France de me faire des propositions en ce sens. Je souhaite également que les missions de la Délégation soient amplifiées, pour intégrer la coordination de grandes manifestations culturelles : que ce soient des festivals, des expositions, des salons …, en lien étroit avec les autres services du ministère, ses opérateurs, ses partenaires. 

Bien sûr, mon ministère continuera par ailleurs de s'investir aux côtés des autres pays membres de la Commission internationale du théâtre francophone - la CITF - et de l'Organisation internationale de la francophonie.  Je salue le co-président français de la CITF, Benoît BRADEL, ici présent à Limoges.

Depuis sa création, la Commission a soutenu financièrement plus de 300 projets de création, production et de diffusion.  Pour soutenir la circulation en France d’artistes venus d’ailleurs, nous devons par ailleurs lever des freins administratifs.

Le rapport souligne la difficulté de certains artistes francophones à circuler avec fluidité en France. Il souligne que les cartes de séjour pluriannuelles « Passeport Talent » sont trop peu sont connues et que leur délivrance reste en deçà des attentes.

Je sais que c’est une attente forte du secteur.  Sachez que c’est pour moi aussi une préoccupation évidente. La France a une longue tradition d’accueil, vis-à-vis des artistes étrangers, qui a contribué à faire de notre culture ce qu’elle est. Nous devons y être fidèles.

Mon ministère travaille en étroite coopération avec le ministère de l’Intérieur et le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, pour mieux faire connaître ce dispositif et ainsi améliorer les conditions de mobilité des artistes en France.

 

Voilà, mesdames et messieurs, les premières mesures que nous allons prendre, sur la base des préconisations de messieurs NORTH et SINETY. Il s’agit de jeter les bases d’une nouvelle politique en faveur de la création francophone en France, dans le champ des arts de la scène. 

Ces mesures ne sont pas les dernières. Et elles ne sont pas isolées, vous le savez. Elles entrent en résonance avec les initiatives prises pour la francophonie dans toutes les disciplines artistiques. Je pense à notre politique en faveur de la traduction, dans le domaine du livre. Je pense également au château de Villers-Cotterêts, dans les Hauts-de-France, dont le Président de la République souhaite faire un laboratoire de la francophonie. Mon ministère contribuera à sa restauration, pour en faire un lieu de création, de rencontre, d’exposition, à compter de 2022. 

Mesdames et messieurs,

La francophonie est une chance pour la France : c’est la chance de la diversité culturelle. La chance de l’ouverture au monde. La chance de la rencontre, du dialogue, de la fraternité. Merci de nous aider à la faire vivre et grandir, comme vous le faites ici.