Implantées dans tous les territoires, les initiatives en faveur de l’éducation artistique connaissent, sous l’égide des directions régionales des affaires culturelles (DRAC), un véritable essor grâce à des opérations originales. Quatrième volet de notre tour de France : un atelier artistique inédit, entre création et archéologie, dans une école rennaise.

Le Centre d’art contemporain La Criée à Rennes, avec le soutien de la direction régionale des affaires culturelles de Bretagne, organise, depuis 2008, des ateliers artistiques dans les écoles. Cette intervention, en parfaite cohérence avec ses missions de soutien à la production, à la recherche et à l’expérimentation, a pris un nouvel essor en 2017 dans le cadre d’un partenariat inédit avec l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap). « Le projet est né du désir commun de nos deux institutions de susciter l’imaginaire des enfants autour des découvertes qui allaient se produire sur un chantier de fouilles. L’Inrap s’apprêtait en effet à mettre à jour un chantier important et avait à cœur d’en faire profiter les élèves. Son projet a immédiatement rencontré notre adhésion. C’est ainsi qu’une jeune artiste, Clémence Estève, a été accueillie dans une classe de CM1 de l’école élémentaire Torigné située en zone d’éducation prioritaire à Rennes. Le travail qui en a résulté est à la croisée de l’art contemporain et de l’archéologie », explique Carole Brulard, responsable de la médiation culturelle à La Criée.

Grâce au travail de transmission réalisé par la jeune artiste, les enfants ont pu, comme ils le disent, "voir le monde autrement"

Remettre en perspective les découvertes archéologiques

Dans un premier temps, le projet s’est calé sur le calendrier des fouilles, afin que les enfants puissent découvrir le chantier et ses différents métiers. L’Inrap a notamment organisé plusieurs visites qui ont été complétées par des modules pédagogiques à l’école. À la suite de ces séances, Clémence Estève a imaginé un projet intitulé « Remise en jeu », dont l’objectif était « de remettre en perspective et, si j'ose dire, en imaginaire, toutes les découvertes des vestiges qui avaient pu être faites sur le site. Il était notamment proposé aux enfants d’inventer d’autres usages aux outils des archéologues, par exemple de construire une maquette de maison gallo-romaine et d’imaginer des graffitis sur cette maison. D’un point de vue pédagogique, cette expérimentation autour de la notion d’erreur et d’écarts d’interprétation possibles intéressait beaucoup les enseignants ». Enfin, les élèves sont entrés dans une phase de production pour préparer une exposition en jouant avec l’idée de créer des faux vestiges. Ils ont notamment réalisé des poteries inspirées des vestiges gallo-romains et en ont créé de nouveaux à partir des fragments de poterie cassés.

Voir le monde autrement

En définitive, le bilan est particulièrement positif. Pour Clémence Estève, qui a produit de nouvelles pièces en cohérence totale avec sa pratique ; pour les archéologues et les professionnels de l’Inrap, qui se sont totalement prêtés au jeu ; enfin, pour les enfants. « Dans le cadre des résidences artistiques, assure la jeune artiste, les élèves réinvestissent des savoirs sans forcément s’en rendre compte à travers le simple fait de pouvoir expérimenter des choses ». De ce point de vue, ce projet était exemplaire : il a permis aux enfants de découvrir l’histoire, le langage scientifique, différents métiers, et parfois de faire des jeux de correspondance assez inattendus à travers les outils. Dans les lettres-bilans qu’ils ont adressées à l’artiste lors du vernissage, ils écrivent que, grâce à elle, ils « ont pu voir le monde autrement ».