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programme des manifestations
Fils d’un maître écrivain,
Charpentier part dans sa jeunesse à Rome où il reste
trois ans. Très impressionné par la musique de Giacomo
Carissimi, il demeurera marqué par le style italien toute
sa vie, tant dans son écriture que dans ses genres musicaux
(il sera le seul à cultiver en France l’histoire sacrée
ou oratorio en latin). Lorsqu’il revient à Paris à
la fin des années 1660, il s’installe dans l’hôtel
particulier de Marie de Lorraine, dite Mademoiselle de Guise, dernière
descendante de l’illustre famille. Il y compose pour un ensemble
qui va atteindre, au fil des ans, une quinzaine de musiciens ; lui-même
participe aux exécutions comme haute-contre.
En 1672, Charpentier est appelé
par Molière pour remplacer Lully dans la composition de ses
comédies-ballets. Le musicien donne la pleine mesure de son
talent dans le Malade imaginaire,
dernière pièce de Molière. Après la
mort de ce dernier, et malgré la politique de Lully qui -interdit
à tout autre musicien que lui-même de composer pour
la scène de l’opéra, Charpentier continue jusqu’en
1685 à donner nombre d’intermèdes pour des «
pièces à machines » ou des comédies (Circé,
L’Inconnu, La Pierre -philosophale de Thomas Corneille
et Jean Donneau de Visé, Andromède
de Pierre Corneille, Le Triomphe des dames
de T. Corneille, Les Fous divertissants
de Raymond Poisson, La Noce de village
de Brécourt, Le Rendez-vous des Tuileries
de Baron, Angélique et Médor
de Dancourt…).
Parallèlement à cette carrière théâtrale,
il écrit de la musique religieuse pour plusieurs lieux parisiens
: l’hôtel de Guise (actuellement hôtel de Soubise),
le couvent de la Mercy, les abbayes de Montmartre et de Port-Royal,
à l’Abbaye-aux-Bois… Pour toutes ces chapelles,
il compose surtout des histoires sacrées, des leçons
et répons de ténèbres, des petits motets à
la Vierge et pour les saints.
Bien que Charpentier n’ait jamais eu de poste officiel à
la Cour, il lui est parfois demandé de prendre part au cérémonial
royal. Au début des années 1680, il est chargé
d’écrire la musique des offices religieux du Dauphin.
En avril 1683, ambitionnant une réelle reconnaissance, le
compositeur se présente au concours du recrutement des sous-maîtres
de musique pour la Chapelle royale. Malheureusement, la maladie
l’empêche d’aller au bout des épreuves.
Quelques mois après le concours, la reine de France Marie-Thérèse
meurt. Pour célébrer sa mémoire, Charpentier
laisse trois superbes pièces : une sorte de grande histoire
sacrée In obitum augustissimae nec
non piissimae Gallorum reginae lamentum suivie d’un
De profundis, et le petit motet
Luctus de morte augustissimae Mariae Theresiae reginae Galliae.
En février 1687, il reçoit une commande de l’Académie
de peinture et de sculpture pour faire jouer dans l’église
des Prêtres de l’Oratoire de la rue Saint-Honoré
un Te Deum et un Exaudiat
« à deux chœurs de musique », afin de «
rendre grâces à Dieu du rétablissement de la
santé du roi » après l’opération
réussie de la fistule de Louis XIV.
À la mort de Mlle de Guise en 1688, Charpentier devient le
maître de musique des Jésuites, au collège Louis-le-Grand
et à l’église Saint-Louis à Paris. Dans
son Catalogue des livres de musique, Brossard explique ce choix
: Charpentier a « toujours passé au goût de tous
les vrais connaisseurs pour le plus profond et le plus savant des
musiciens modernes. C’est sans doute ce qui fit que les Révérends
Pères Jésuites de la rue Saint-Antoine le prirent
pour le maître de la Musique de leur église, poste
alors des plus brillants ». Pendant dix ans, Charpentier compose
un nombre important de pièces qui reflètent la diversité
des cérémonies religieuses des Jésuites : psaumes,
Magnificat, hymnes et antiennes pour les vêpres, messes, leçons
de ténèbres… dont le fameux Te
Deum. Pour le collège, il écrit des opéras
d’inspiration sacrée, notamment David
et Jonathas représenté
le 28 février 1688, conjointement avec la tragédie
latine récitée, sur le même sujet, intitulée
Saül. David et Jonathas
est une œuvre unique en son genre, à la fois chef-d’œuvre
de Charpentier et témoignage précieux de l’art
dramatique musical jésuite dont il reste si peu de traces.
Vers 1692-1693, Charpentier donne des leçons de composition
à Philippe de Chartres, futur duc d’Orléans,
puis Régent de France. Pour parfaire son enseignement, le
musicien lui offre un petit traité manuscrit intitulé
Règles de composition. Le 4 décembre 1693, alors qu’il
a cinquante ans, il fait représenter à l’Académie
royale de musique Médée,
son unique tragédie lyrique, sur un livret de Thomas Corneille.
Si David et Jonathas
se distançait du modèle de la tragédie lyrique,
Médée se conforme davantage
au moule lullyste, bien que Charpentier n’ait pu s’empêcher
de recourir à son écriture personnelle : veine mélodique
remarquable, orchestre coloré et harmonie recherchée
qui porte le drame à des sommets d’une rare beauté.
L’œuvre tomba sous le coup des « cabales des envieux
et des ignorants » au bout de quelques représentations.
Si Le Cerf de La Viéville qualifia
Médée de « méchant opéra »,
Brossard défendit l’ouvrage, affirmant que «
c’est celui de tous les opéras sans exception dans
lequel on peut apprendre le plus de choses essentielles à
la bonne composition ».
Le 28 juin 1698, Charpentier est nommé maître de musique
des enfants de la Sainte-Chapelle. Il y demeure jusqu’à
sa mort. Son œuvre est conservée à la Bibliothèque
nationale de France, en manuscrits autographes appelés Mélanges
qui constituent une collection musicale unique en France pour cette
époque.
Très vite, Charpentier sombre dans un oubli quasi total qui
persiste jusqu’au début du XXe siècle. Les raisons
de ce silence semblent tenir tout autant de l’homme –
dont l’existence modeste se déroula en marge de la
cour de Louis XIV – que du créateur. Exclu et incompris
par les défenseurs de la musique de Lully qui était
le modèle obligé, salué seulement par une minorité
de connaisseurs ouverts au style italianisant que pratiquait Charpentier,
voici comment le compositeur se présente dans son Epitaphium
Carpentarii : « J’étais musicien, considéré
comme bon parmi les bons et ignare parmi les ignares. Et comme le
nombre de ceux qui me méprisaient était beaucoup plus
grand que le nombre de ceux qui me louaient, la musique me fut de
peu d’honneur mais de grande charge... ».
Catherine Cessac
C.N.R.S., Centre de musique baroque de Versailles
www.charpentier.culture.fr
Almanach royal de 1682
(dans le coin, en bas, à gauche, portrait présumé
de Charpentier tenant dans
ses mains une partition. Ce personnage ne peut qu’être
l’auteur du menuet
de Strasbourg signé « Mr Charpentier » aux côtés
de sa protectrice : Mme de Guise)
Bibl. nat. de France : département des estampes et de la
photographie
© cliché Bibliothèque nationale de France