Les résidences d’artistes sont implantées en Picardie depuis de nombreuses années et aujourd'hui il apparaît nécessaire de relancer cette dynamique sur des bases nouvelles qui pourront permettre un élargissement des accueils et une meilleure irrigation du territoire picard. Neuf interventions de responsables de structures ou d’artistes, ont ainsi ponctué la journée, non seulement pour faire un bilan de leurs activités et projets, mais aussi pour engager une réflexion sur l’attractivité artistique du territoire et l’importance de l’implantation des résidences dans l’émergence d’artistes et de projets. Les modalités de production des œuvres, la vie artistique pendant la résidence mais aussi la position institutionnelle ont ainsi été abordés dans des champs aussi variés que la musique, les arts plastiques, le numérique, le cinéma, la bande dessinée, la photographie et la danse
Une résidence est tout d’abord un lieu de création privilégiée qui peut se trouver à la convergence de plusieurs champs artistiques et fédérer des projets, comme les résidences initiées au centre d'art de Cultures et de Ressources Lizières situé en zone rurale dans l'Aisne autour des arts plastiques. Les projets initiés dans le cadre de Lizières peuvent être collectifs, individuels, de recherche, d'expérimentation, de ressourcement aussi pour les artistes.
Une résidence, c’est aussi la création de passerelles entre les publics, lorsqu’elle génère l’intérêt de nouveaux publics, comme c’est aujourd’hui le cas au Théâtre Impérial de Compiègne avec l’ensemble vocal Aedes. La diversité des propositions culturelles et des formes artistiques et lyriques contribuent à élargir le public, associé notamment lors des interventions dans le milieu scolaire ou dans le milieu du chant choral amateur. Ou dans le cas de résidence de chanteur en musiques actuelles à la Cité Carter avec l'association artistique d'un musicien et d'une chanteuse de jazz. Pour l’ASCA (Association culturelle d'Argentine) de Beauvais et le numérique, l'occasion de mettre en valeur lors de son festival Les Pixels les créations réalisées est fondamental. Les projets de mapping video et de création sonore donnent une nouvelle lecture du patrimoine par exemple. La résidence est vécue comme un moment privilégié destiné à sensibiliser les publics, en particulier les enfants.
Une résidence est un lieu d’expérimentation, un laboratoire : la forme et le contenu des spectacles sont intimement liés au travail de la résidence ; c’est la possibilité d’expérimenter les limites en terme de conquête des publics. Marcel Bozonnet avec son théâtre nomade a développé cette thématique à la Maison de la Culture d’Amiens. Pour le collectif Superamas, ce sont les actions dans les quartiers qui créent du lien. Ainsi, la première résidence du collectif s’est faite à Amiens et a nourri des projets riches aussi d’expériences à l’étranger.
Le partenariat est une autre nécessité abordée par les artistes. Les échanges influant sur le travail des équipes elles-mêmes, la résidence réinterroge les pratiques et peut d’ailleurs influencer le projet d’un directeur de structure. Dans le cas des Uchroniks, ensemble d'actions culturelles et artistiques se déroulant sur les communautés de communes Val de Somme-Corbie et Bocage-Hallue, c’est l’absence de lieu spécifique qui crée le partenariat par la mise en commun de matériel, le partage des frais. La notion de « vivre ensemble » se développe alors auprès des habitants et la nécessité d’avoir un travail transversal, pluridisciplinaire sur un projet artistique interritoriale mené avec un partenaire artistique Le Tas de Sable-Ches Panses Vertes (Pôle des Arts de la marionnette en région Picardie) fait sens.
La résidence d'un auteur de bande dessinée Kris dans l'ouest du département de la Somme et portée par l'Acap (Pôle image Picardie) avec le concours de l'association On a marché sur la Bulle, au sein de l'abbaye de Saint-Riquier (Centre culturel de rencontre) permet la rencontre pluri-partenariale autour d'un projet d'écriture d'un scénario.
Une résidence permet de renforcer une mémoire du territoire. Au sein de l’association Diaphane, des artistes peuvent bénéficier d’un « appartement de résidence », voire d’échanges de résidences dans le cadre de collaboration avec d’autres structures photographiques en France et à l’étranger. C’est aussi laisser le temps de la création et définir les principes de médiation culturelle qui seront mis en œuvre, notamment dans les établissements scolaires.
Enfin, l’Echangeur, installé à Fère-en-Tardenois et Château-Thierry relève la nécessité de laisser les projets s’inventer et se réinventer pour refaire du lien, bien plus dans une approche de « vivre ensemble » que dans une approche consumériste. Le projet Les Sisyphes a d’ailleurs attiré des participants de quatre régions de France pour une performance à Château-Thierry.
L’invitation à une réflexion a offert un espace de paroles et d’échange à des artistes et à des structures qui étendent à la fois leur vision du territoire et leur appartenance à un champ artistique et l'objectif est d'étendre les résidences au domaine du patrimoine au sens large. En effet, l'archéologie, les musées, les monuments historiques peuvent s'emparer de cette présence artistique pour mieux faire connaître leur recherche, leurs collections, l'architecture et à travers elle l'histoire de l'art et aller au-devant de nouveaux publics et ainsi ouvrir un dialogue à partir de la création de projets communs.
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