L’association Sud Side réunit des passionnés de vieilles mécaniques et d’art. Ces inventeurs d’un autre genre concoctent dans leur atelier marseillais de la Cité des arts de la rue, toutes sortes de machines. Assemblant, fuselant sans relâche, ils ont le goût pour le monumental. Il faut dire que leurs créations, tout droit sorties d’une ingénieuse folie, sont des œuvres destinées à la scène.
Nés en 1985, les Ateliers Sud Side se sont imposés comme artisans d’exception dans le domaine artistique et culturel, en concrétisant l’idée créative, géniale mais impalpable, en réalité exceptionnelle. Leur atelier ressemble à un festival protéiforme tant par la diversité des sons qui se font entendre que par la présence d’une infinité d’étincelles projetées dans tous les sens. Il abrite d’innombrables machines : raboteuse, découpeur plasma, cintreuse, rouleuse, tours, fraiseuses…
Dans le cadre de l’Olympiade Culturelle et en collaboration avec la Compagnie F d’Arthur Pérole, mais aussi de nombreux résidences et partenariats artistiques locaux et internationaux comme le ZEF - scène nationale, Théâtre National de La Criée, Cité des arts de la rue, ou encore le Mucem, Sud Side a mis au point Jour de Fête, un spectacle chorégraphique.
A travers la création d’un manège participatif, Sud Side, a révélé tout son art, son implication mais aussi les talents de ceux qui portent cette association. Au moyen de la trame, de leur savoir-faire et de la créativité débordante des artistes plasticiens sollicités, ils ont su matérialiser les pièces qui ornent ce manège extraordinaire que l’on pourrait considérer également comme extra-solidaire.
C’est avec l’aide et la participation de nombreux habitants que cette structure tournante a pu voir le jour. 500 participants, principalement des jeunes de 16 à 25 ans, sont venus épauler Sud Side. Afin de pouvoir avancer dans les délais, une répartition des tâches a été nécessaires, 20 groupes de travail ont été constitués. Chacun de ceux-ci étant issu d’un établissement scolaire ou de différents centres sociaux des quartiers prioritaires de la Ville de Marseille. Le lycée René Caillié, spécialisé dans les filières du bâtiment, connait bien l’association Sud Side, ils ont déjà réalisé des collaborations avec eux, mais Jour de fête est le second projet de cette ampleur. Comme le dit la proviseure Leïla Ben-Kader : « c’est un partenariat intéressant, car il a plusieurs dimensions : artistique, sociale, culturelle, citoyenne. Quand même on forme des citoyens ». Gabriel, lycéen de cet établissement est sur le projet du sous-marin qui doit se faire « avec une baignoire de récupération et un vélo que nous allons incorporer dans la baignoire avec dedans un pédalier où les enfants pourront pédaler ». Outre la réalisation d’un projet commun, les ateliers proposés permettent de découvrir une approche différente du monde du travail.
La mise en valeur de technicité des métiers manuels au service des domaines de la création artistique ouvre une large fenêtre sur le monde de l’artisanat comme facilitateur de la concrétisation d’art et comme support à la passion et à la rêverie. Baptiste, lycéen de René Caillié ajoute « ça permet d’apprendre d’autres techniques de travail » il insiste sur le fait que le travail doit être plus que minutieux afin d’éviter que les enfants puissent se blesser sur la structure. Comme le fait remarquer sa proviseure « ça permet de transposer des compétences qu’ils sont en train d’acquérir sur d’autres choses […] Ce type de travaux montre que leur savoir-faire va pouvoir être transférable un peu partout dont dans des projets qui ne sont pas vraiment du bâtiment ».
Ce projet est finalement un outil de médiation à forte visibilité en lien avec la thématique des Jeux Olympiques à Marseille, puisque dans certaines des machines ornant le manège, nous pouvons y retrouver une voile ou des évocations du football. Sud Side a su effacer les frontières, en rendant l’art accessible à tous mais surtout en invitant les personnes qui en sont généralement les plus éloignées à participer et à devenir eux-mêmes artistes. C’est le cas pour 4 jeunes venant du 15ème, qui ont été accueillis à un atelier de menuiserie pour participer à l’élaboration de la couronne supérieure du carrousel.
Guidés par une menuisière de l’association et par leur éducateur spécialisé, ils ont pu apprendre les différentes techniques de base en menuiserie. Charli un des jeunes ayant participé à cet atelier témoigne : « Ce que j’ai préféré faire, c’est tout, j’ai tout aimé ». Ces ateliers peuvent aussi révéler des talents et faire naitre chez certains de ces jeunes des appétences particulières voire des vocations ; c’est le cas pour Saba qui annonce que « la menuiserie, c’est un métier que je rêve de faire ». Elle explique aussi qu’une fois fini « le manège va tourner dans plusieurs quartiers et les enfants vont venir s’amuser et ce n’est pas payant, c’est gratuit ». La fierté de ces jeunes participants réside dans l’accomplissement du travail fait, mais aussi dans le bonheur qu’ils vont procurer en imaginant les enfants de leurs quartiers et ceux voisins s’amuser sur une structure dont ils auront été les bâtisseurs. C’est un peu un pied de nez à la vie, une vie qui n’a pas toujours été tendre avec eux, où ils réalisent que parfois une main tendue, ou un peu de magie peut amener à un changement de regard voire de vie.
La création de chacun des treize sujets du carrousel est confiée, soit à un artiste, dans le cadre d’un chantier participatif aux Ateliers Sud Side ou autres ateliers de création, soit à une structure travaillant dans le champ de l’éducation ou de l’insertion professionnelle.
Selon Maureen Brown, artiste scénographe, ayant travaillé main dans la main avec des jeunes de l’École de la Deuxième chance : « Ce projet brasse beaucoup de monde et favorise les rencontres, ce qui rend l’aventure belle et riche », en effet, selon elle la transmission : « c’est fort en émotion, en humanité, en rencontres et ça permet, aussi, beaucoup, de clarifier les techniques qu’on fait, de séquencer par étape pour transmettre » car « l’éducation populaire c’est s’apprendre des choses, les uns et les autres, en fédérant les différents publics ».
Le parallèle fait avec l’évènement sportif des Jeux Olympiques et Paralympiques ne pouvait être que plus évocateur et motivant notamment pour les jeunes participants de ces quartiers défavorisés pour qui le sport est un rempart contre l’isolement mais aussi une bulle d’oxygène contre la misère sociale, à laquelle leur quotidien les confrontent. Cette aventure est avant tout celle d’un partage à la fois humain, artistique et technique, la mixité des participants en est l’exemple même, qu’ils viennent de quartiers populaires, de lycées techniques, qu’ils soient porteurs d’un petit truc en plus, ou artistes, techniciens, éducateurs ou autres… chacun a porté sa pierre à l’édifice pour rendre concret un projet dont les buts sont l’unité, la solidarité, la transmission, le partage, l’enrichissement, la reconnaissance ou encore la tolérance.
Maureen Brown conclut l’aventure, en espérant que : « tous les publics arrivent à se rencontrer, pour voir le résultat, et que l’enfant qui est dessus soit porté par tout ce vécu ».
Jour de Fête sera le 19 Juillet à 18h pour le festival « Contre-Courant » sur l’île de la Barthelasse à Avignon. Retrouvez tout le programme ici.
L'Olympiade Culturelle
Comme le fait remarquer Tony Estanguet, président du comité d'organisation des Jeux olympiques de Paris 2024 : « On oppose parfois le sport et la culture, mais je crois au contraire qu’ils ont beaucoup de choses en commun : la performance, les émotions, la recherche de la beauté du geste, mais aussi, surtout, leur capacité à proposer une diversité de disciplines qui sont autant de canaux d’expression uniques pour se construire, s’émanciper, trouver sa voie, se sentir bien… ».
C’est de ce constat que l’idée a germé de créer l'Olympiade Culturelle, une programmation artistique et culturelle pluridisciplinaire qui a pour objectif d’accompagner ces jeux olympiques. Elle a commencé avant ceux-ci et se terminera le 8 septembre 2024. Par ce programme, les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 ouvrent grand leurs portes à la culture et aux artistes.
Tony Estanguet ajoute à ce propos que « L’Olympiade Culturelle, c’est l’occasion, pour la 1ère fois, de montrer tout ce qui nous rassemble. C’est l’occasion de célébrer cette proximité de valeurs, de sens et de diversité que le sport et la culture ont en commun ». Aussi l’Olympiade Culturelle se veut inclusive et accessible à tous et représente une formidable opportunité pour placer la culture et les arts, au cœur du quotidien des habitantes et des habitants.
Au-delà des compétitions sportives et de l’héritage matériel, l’Olympiade Culturelle est une véritable opportunité servant à rappeler que les Jeux doivent favoriser l’émancipation de la jeunesse, faire se rencontrer et échanger les différents acteurs sportifs et culturels du territoire et transformer l’espace public afin que la société y trouve parfaitement sa place. Il est important de soutenir la construction de politiques publiques innovantes, à la croisée de l’art du sport, du handicap, de l’inclusion sociale, de la pratique culturelle et artistique…
L’ambition de l’Olympiade Culturelle est de faire tomber les frontières visibles et invisibles afin de fédérer. Le ministère de la Culture a favorisé ce dialogue entre le sport et les arts en mettant en place sur l’ensemble du territoire, notamment grâce aux Directions Régionales des Affaires Culturelles, un appel à projet visant à solliciter la créativité des artistes et associations dans le cadre du déploiement de l’Olympiade Culturelle. Les projets retenus ont reçu une subvention, leur permettant la mise en œuvre de leur projet.
Partager la page