Monsieur le Secrétaire d’Etat à la culture de l’Etat de Sao Paulo,
Monsieur le Ministre de la culture de la ville de Buenos Aires,
Monsieur le Directeur régional du Service social du commerce de Sao Paulo,
Monsieur l’Ambassadeur du Chili,
Monsieur le Directeur artistique de lieux Publics,
Mesdames et Messieurs les intervenants de cette table ronde,
Mesdames et Messieurs,
C’est un grand honneur et un grand plaisir pour moi de clore les travaux de cette table ronde ici à la Maison d’Amérique latine.
Un grand honneur parce que je sais que vous avez accepté, pour certains de traverser l’Atlantique, pour d’autres de venir de Marseille, Nantes ou d’ailleurs, pour tous de vous mobiliser pour échanger sur vos expériences, vos projets et dégager les lignes de force d’une collaboration entre nos pays sur un enjeu clef de nos sociétés. Je vous en suis reconnaissante.
Un grand plaisir parce que retrouver des professionnels engagés, qu’ils soient acteurs institutionnels, organisateurs ou artistes, riches d’expériences, de langues et de cultures différentes est toujours un moment unique pour un ministre. L’action politique y prend tout son sens, elle est mise en perspective et prend chair.
Nos sociétés souffrent, et les élections européennes de dimanche dernier nous l’ont ô combien rappelé ici en France, d’une segmentation qui entraîne marginalisation économique, sociale, spatiale et la peur de l’autre, le repli sur soi.
Or nos concitoyens nous le disent : ils ont besoin de reconnaissance, de sens, de collectif, de liens. L’art parce qu’il interroge, parce qu’il met en perspective, parce qu’il unit, parce qu’il fait comprendre l’altérité, est au cœur du projet de société que nous portons.
La démocratisation culturelle est, vous le savez, une des priorités de mon action : donner à chacun accès à l’art, c’est donner à chacun la possibilité de mieux comprendre le monde, d’avoir la possibilité de s’exprimer, de trouver sa place, d’être pleinement citoyen et c’est donner à l’art, tel que le pensait Habermas, sa justification par cette dimension collective et sa participation à la construction de notre humanité. Cette démocratisation passe par l’éducation culturelle et artistique et l’accès à l’art, tant dans les espaces privés, les entreprises par exemple, que dans l’espace public.
Espace de rencontres et d‘interaction sociales, espace du débat d’idées, espace de citoyenneté, l’espace public doit être celui de la rencontre du public et de l’art, dans ses différentes approches festives, interrogatives, participatives. Grands événements fédérateurs, musées à ciel ouvert, collaboration en amont des plans d’aménagement urbain, l’art doit être partie intégrante de l’espace public et de la vie quotidienne de nos concitoyens pour redonner à chacun d’entre eux la place à laquelle il a droit.
Pour réfléchir à ces enjeux et répondre aux questionnements des professionnels des arts de la rue et des arts visuels mais aussi à tous ceux qui aménagent l’espace qu’il soit d’ailleurs urbain ou rural, j’ai installé en avril dernier une mission nationale pour l’art et la culture dans l’espace public, qui me proposera d’ici 2015 des pistes d’action pour faciliter cette synergie en capitalisant sur les bonnes pratiques. J’aperçois, parmi vous, nombre de ses membres et je m’en félicite. Les débats d’aujourd’hui trouveront, j’en suis certaine, un écho dans les pistes que nous retiendrons.
Sur ces questions de part et d’autre de l’Atlantique, les pratiques se sont souvent répondues voire croisées, toujours enrichies, vous en êtes tous aujourd’hui la meilleure preuve. Nous devons continuer en ce sens : nous avons à apprendre de l’expérience de vos artistes qui dans les années 90 ont réinvesti l’espace public afin de le transformer en espace à la fois de réflexion et d’action artistique et politique et réinvesti l’art, pour offrir par le biais des installations, une possible relecture de l’espace urbain. En incitant à flâner, l’art de l’installation devient en effet une invitation à se réapproprier l’espace urbain et à l’individualiser. Mais nous devons également continuer nos échanges en termes de politiques publiques, qu’il s’agisse d’accès à la culture pour les publics les plus modestes, ou de la défense du métissage culturel dans lesquelles vos expériences et savoir-faire sont précieux.
Au-delà de nos proximités culturelles, des défis similaires auxquels nous sommes confrontés, cette coopération entre l’Amérique latine et la France, que nous célébrons cette semaine pour la 4e année consécutive, signe la volonté commune d’un même projet de société : celui d’une société où l’art transcende les frontières, toutes les frontières. Au moment où les Nations unies travaillent aux objectifs de développement durable pour les cinq ans à venir, œuvrer ensemble à faire de la culture un élément fondateur de nos sociétés est loin d’être symbolique.
Aujourd’hui nous ouvrons donc une coopération nouvelle avec l’Amérique latine dont les enjeux dépassent nos seuls Etats. Je souhaite que les échanges que vous avez eus aujourd’hui permettent de définir des pistes de coopération concrètes, et nourriront notamment, côté français, les réflexions et les travaux de la MNACEP. Nos pays ont vocation à se rejoindre dans cette définition d’espaces communs qui soient des espaces démocratiques et artistiques, un espace de rencontres et d’émancipation pour tous.
Je vous remercie.