Devoluy (Le) - Station de Superdévoluy, résidences Le Bois d'Aurouze, les Issards
- département : Hautes Alpes
- commune : Le Devoluy
- appellation : Station de Superdévoluy, résidences Le Bois d'Aurouze, les Issards
- auteurs : Henry BERNARD, Maurice FORNIER
- dates : 1966-76
- protection : ensemble non protégé
- label patrimoine du XXe siècle : Commission régionale du patrimoine et des sites (CRPS) du 9 avril 2015
Au milieu des années 1960, le maire de la commune de Saint-Etienne-en-Dévoluy, Jean Grandmont, souhaite développer le tourisme en créant une station de sports d’hiver. Le projet doit s’implanter sur le plateau des Cypières et la société des Grands Travaux de Marseille (GTM) se voit confier l’aménagement et l’exploitation du site pendant trente ans. La station ouvre à Noël 1966 avec quatre remontées mécaniques. Les mille premiers lits sont livrés d’année suivante.
Le projet vise à attirer une clientèle populaire méridionale dans une "station intégrée" réunissant en un même lieu tout le confort et les services utiles. Henry Bernard (1912-1994,Premier grand prix de Rome, il réalise notamment la Maison de la radioà Paris entre 1952 et 1963), associé à l'architecte Maurice Fournier (?, ?),est l’auteur du plan d’ensemble : ils construisent la résidence du Bois d’Aurouze entre 1967 et 1972, puis celle des Issarts entre 1975 et 1977. Le projet est une réponse fonctionnelle au programme : pour permettre aux skieurs d’accéder directement aux pistes depuis leur logement, le plan de la station est organisé à partir d’un front de neige continu, le long duquel s’implantent les bâtiments ; à l’articulation du front de neige et des résidences se trouve la "grenouillère", véritable forum de plein air d’où l’on accède aux terrasses de restaurants et à la galerie commerciale logée en pied d’immeuble. Les véhicules sont reportés au nord des bâtiments.
Achevé en 1977, ce grand ensemble des neiges compte 1083 studios, dont un tiers est commercialisé en multipropriété (une première en France) : chaque acheteur fait l’acquisition non pas d’un logement, mais de parts d’une société lui conférant un droit de jouissance périodique du bien. La propriété d’un appartement est ainsi partagée entre plusieurs "multipropriétaires", jusqu’à vingt par studio et 6000 au total. Cette innovation commerciale, et l’opération dans son ensemble, rencontrent un franc succès : pour Le Figaro, Superdévoluy, à la fois populaire et utilitaire, c’est "la deux-chevaux des neiges".
Le projet de Henry Bernard est achevé en 1977 mais l’érosion de la fréquentation pousse les gestionnaires à étendre le domaine skiable (qui fusionne dans les années 1980avec celui de la station voisine de la Joue du Loup) et àaugmenter en proportion le nombre de lits.àpartir de 1990, une série d’opérations immobilières fait passer la capacité d’hébergement de la station de 5 000 à 12 000 lits et les espaces naturels alentours sont urbanisés dans une logique de dispersion du bâti. Le parti urbain originel en est profondément perturbé et l’apparition d’immeubles-chalets met à mal le mythe "moderne-démocratique" qui fondait la station.
Au principe d’une station intégrée répond celui d’unearchitecture rationnelle. Bâtiment-bloc de 200 mètres delong, 56 travées de 3,50 mètres de large et 12 à 14 niveaux,la résidence du Bois d’Aurouze comprend tous les équipements nécessaires au fonctionnement de la station. À chaque niveau, les studios sont desservis de part et d’autre d’un couloir central. Un plan astucieux permet de réduire les surfaces des "cellules de vie" au strict minimum, de 23 à 31 m² pour 4 personnes. Ce "paquebot des neiges" répond à la demande moderne du séjour tout-compris. Le vacancier abandonne sa voiture à l’entrée de la station : il se déplace à pied dans le périmètre réduit de la résidence, à skis dans l’espace infini du domaine skiable. Afin d’économiser le site, Henry Bernard fait le pari moderne d’un bâtiment compact, simple unité de tourisme posée sur la prairie alpine, dont l’emprise au sol et les voiries de desserte sont volontairement réduites. Implanté au creux d’un plateau naturel. Le bâtiment-station limite ainsi son impact sur le paysage et place le vacancier en observateur attentif du panorama grandiose qui se déploie autour de lui.
Les résidences du Bois d'Aurouze et des Issards ont été peu modifiées (seul le béton brut des murs extérieur a été repeint).
- Sources
- IFA, fonds Henry Bernard
- Robert Mériaudeau, "Naissance d’une nouvelle station de sports d’hiver : Superdévoluy", Revue de géographie alpine, 1967, n° 1, pp. 211-214.
- Jean-François Lyon-Caen (dir.), Station de Superdévoluy, Stations de sports d’hiver du département des Hautes-Alpes : inventaire des principes d’urbanisme et d’architecture, École d’architecture de Grenoble/DRAC PACA, 2005 (voir l'inventaire des sources documentaires)
- Sophie Masse, Philippe Grandvoinnet, "Superdévoluy : la deux chevaux des stations alpines", La Pierre d'angle, n° 65, La Montagne humanisée, p. 48-49.
- Rédacteur : Philippe Grandvoinnet
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