Monsieur le Ministre, cher Jean-Michel,
Messieurs les Préfets,
Mesdames et messieurs les Parlementaires,
Monsieur le Président du Conseil régional,
Monsieur le Président du Conseil départemental,
Monsieur le Maire,
Mesdames et messieurs les élus,
Monsieur le Directeur, cher Francis CHEVRIER,
Mesdames et messieurs,
Chers amis,
Nous étions avec Jean-Michel BLANQUER ensemble à Angoulême hier, pour les Rencontres nationales de la bande-dessinée. Nous sommes aujourd’hui ensemble ici, pour l’inauguration de ce Salon du livre d’Histoire. Et nous continuerons de cheminer ensemble.
Cette coopération, que nous avons nouée dès notre arrivée, se fonde sur trois aspects : une vision partagée, d’abord, une série d’ambitions, ensuite, que nous avons dessinées ensemble et une communauté d’actions, que nous avons commencée à porter.
Au départ, il y a une vision. Sur le caractère indissociable de nos projets, d’abord : c’est par la culture que nous pouvons contribuer à changer l’école. C’est le ressort le plus fondamental de la confiance que Jean-Michel BLANQUER souhaite refonder. La confiance de nos jeunes en eux-mêmes : en leur capacité à trouver, et à choisir leur place, de façon autonome, dans notre société.
Autant que la confiance de notre pays en lui-même, de nos concitoyens entre eux, en leur destin commun. Et réciproquement, c’est par l’école que nous changerons le rapport des futurs citoyens à la culture.
Un rapport qui reste fracturé par les logiques de distinction, les sentiments d’illégitime, alors que la culture devrait être une terre de cohésion. C’est à l’école que nous pouvons combattre ces fractures : parce qu’elle permet de toucher tous les futurs citoyens, de façon universelle, et au plus jeune âge, quand le rapport au mot « culture » se forge.
En disant cela devant vous, ici, aux Rendez-vous de l’Histoire, posons-nous la question : de quelle culture, au juste, parlons-nous ? Notre rôle n’est pas de la définir, mais de lui permettre de vivre. De la placer entre les mains de celles et ceux qui la feront demain, précisément : les jeunes.
Nous avons une responsabilité de transmission, et non de prescription : la transmission d’un héritage que nous avons nous mêmes reçu, des mains des générations précédentes : patrimoine historique, rituel, culturel, artistique.
Tout ce qui fonde notre existence « commune » et qui est, au fond, le socle de notre émancipation, car on s’émancipe toujours de « quelque chose ».
Et en même temps la transmission d’un sens critique, de savoir-faire et de leviers de création qui permettront à chaque jeune de tracer son propre chemin. Dire cela, c’est déjà formuler une définition de ce qu’est, pour nous, la culture, sans doute : une culture ouverte, un projet mouvant, c’est un héritage qui soude mais qui n’enferme pas, au contraire, qui autorise, c’est un patrimoine que l’on transmet, pour qu’il soit réinventé.
Les débats qui animent chaque année ces Rendez-vous de Blois sont là pour nous le rappeler. Des débats intenses qui animent chaque année ces rendez-vous de Blois.
Le thème de cette édition, et la table-ronde qui va nous succéder, « Inventer en Histoire », ne manquera pas de nourrir encore et de faire évoluer cette réflexion. Ce que nous souhaitons, avec Jean-Michel BLANQUER, c’est permettre à chaque jeune de France de se saisir d’un héritage, et d’avoir la possibilité de s’en émanciper, de le prolonger, de le réinventer, d’écrire sa part de cette composition. En faisant naître chez chacun le désir, la capacité, et le sentiment de légitimité nécessaire.
Nous le ferons en plaçant la transmission artistique et culturelle au cœur du parcours des jeunes, à l’école et au-delà : une transmission qui soude, qui permet de s’approprier le « commun ». Et en même temps qui libère, qui permet de tracer son propre chemin.
Voilà pour la conviction.
Cette vision, nous l’avons formalisée, ensemble, en une triple ambition.
D’abord, une ambition d’universalité. Nous ne sommes pas les premiers à tenir ce discours sur l’éducation artistique et culturelle. Nous en sommes bien conscients. Mais les situations restent contrastées sur le terrain. Nous voulons en faire une réalité pour tous les enfants de la République, d’ici 2022.
Et pour cela, nous avons décidé de fixer deux priorités : le développement de la pratique artistique d’une part, et en particulier la musique et le théâtre pour leurs vertus émancipatrices, autant que fédératrices, car ce sont des pratiques collectives et le développement du goût de la lecture, d’autre part.
Parce que le livre ouvre vers une multitude de savoirs, de cultures, d’humanités et c’est l’une des principales portes ouvertes sur l’Histoire, donc la mémoire, qui est un élément clé du « commun » dont je parlais.
Je veux saluer l’engagement des Rendez-vous de l'Histoire en faveur de la diffusion de la culture historique, par tous les supports, je pense au livre, avec le Salon qui s’ouvre aujourd’hui, dont je salue les participants.
Je pense aussi aux outils numériques, qui sont de nouveaux supports pour la diffusion de la culture historique. Et qui sont aussi de nouveaux espaces de construction de la réflexion historique : je pense aux outils contributifs. Ils ouvrent de nouvelles perspectives, en même temps qu’ils nous obligent à la plus grande exigence, dans la vérification des sources et dans la confrontation des regards, vous êtes évidemment les premiers à le savoir.
Je veux également saluer ceux qui œuvrent pour l’éducation à l’image. Nous allons signer tout à l’heure une convention importante entre la Région, dont la politique volontariste dans le domaine du cinéma est essentielle, à une époque où l’image est partout, et le CNC.
L’Histoire se découvre aussi à travers les images, à condition d’avoir les outils pour les comprendre et les analyser. En fixant ainsi des priorités, nous faisons un pas inédit. Le cahier des charges était resté flou jusque-là, en matière d’éducation artistique et culturelle à l’école. Et un pas que je crois décisif, parce que cela permet de guider les efforts, de les concentrer, et donc de gagner en impact.
Cette ambition d’universalité, nous souhaitons l’inscrire dans la durée. C’est une notion sur laquelle j’insiste à chaque fois, parce qu’elle est clé. C’est ce qui fait que nous changerons la donne, que la culture prendra une place réellement structurante. Il doit y avoir une continuité sur l’année, c’est-à-dire qu’il ne suffit pas de quelques sorties, il faut des activités artistiques régulières et récurrentes.
Il doit y avoir une continuité sur la scolarité, c’est-à-dire que l’éducation artistique et culturelle doit être un fil rouge pour les élèves, de la maternelle au lycée. Et c’est avec ce souci d’inscrire les actions dans la durée que je porte le « Pass culture », je parle d’ailleurs de « passeport culturel », car l’idée est d’accompagner l’entrée dans l’âge adulte et dans la citoyenneté par la culture.
Enfin, nous portons un principe de diversité.
Pour que la transmission nourrisse la « composition française » comme dit Mona Ozouf, elle doit ouvrir aux arts et à la culture dans leur diversité. Nous savons, pour cela, pouvoir compter sur l’exigence des acteurs culturels et éducatifs.
Cette communauté d’ambitions doit désormais se traduire en actes.
La triple responsabilité que le ministère de la Culture souhaite assumer tient en trois mots : accompagner, mobiliser, et former les acteurs de la transmission artistique et culturelle.
Accompagner, d’abord. Dès l’année prochaine, le ministère de la Culture va significativement renforcer son soutien aux actions d’éducation artistique et culturelle. Le budget augmentera de 35 millions d’euros, pour être porté à 114 millions d’euros.
Nous avons ensuite un rôle de mobilisation et de responsabilisation à jouer, au niveau national. J’ai annoncé deux initiatives la semaine dernière, nous allons renforcer l’engagement de nos propres établissements en matière d’éducation artistique et culturelle.
Et toutes les conventions que nous signons comporteront désormais un volet dédié à ces actions : toutes les structures que nous soutenons devront mener des actions spécifiques en direction de tous les jeunes et des publics « éloignés ».
Le mouvement doit s’ancrer directement sur le terrain : ce sont les acteurs culturels et les structures scolaires qui doivent pouvoir librement s’organiser, en fonction des réalités locales, des ressources culturelles à proximité.
J’ai une conviction : ce n’est pas l’uniformité qui mène à l’universalité. C’est le pragmatisme, et la capacité à l’innover. Vous en offrez un parfait exemple ici, je voudrais saluer l’engagement des collectivités territoriales de la Région, qui mène une politique particulièrement active en matière de lecture publique et exemplaire en matière d’éducation artistique et culturelle.
Le ministère de la Culture jouera enfin un rôle dans la formation des « passeurs » de culture. Les premiers sont les artistes et les créateurs eux-mêmes. Nous allons engager un travail au sein de nos propres structures d’enseignement supérieur pour les former davantage aux missions de transmission. Les passeurs, ce sont également les enseignants qui jouent ce rôle.
C’est une mission essentielle, qui demande une réinvention permanente : en fonction des publics, en fonction des contenus et savoirs que l’on cherche à transmettre. Vous le savez, vous qui participez à ces Rencontres de l’Histoire : on ne doit jamais cesser de s’interroger sur la manière dont on cherche, dont on étudie, et dont in fine on transmet. Le ministère de la Culture sera là pour mettre ses ressources à disposition et appuyer la formation des futurs enseignants à l’EAC.
Voilà, mesdames et messieurs,
Le projet qui est le nôtre aujourd’hui. La meilleure façon de construire l’avenir, pour la génération qui est la mienne, c’est d’en laisser les clés à celle qui y arrive. Notre responsabilité n’est pas de penser pour elle, mais de lui donner les moyens de son autonomie.
Nous devons pour cela lui transmettre un héritage : linguistique, artistique, historique. C’est à partir de ce que l’on nous cède que l’on prend son autonomie.
Mais nous avons aussi, par l’école, à nourrir l’émancipation : pour que l’héritage ne soit jamais un carcan, toujours un ferment. C’est le rôle de la lecture, de l’éducation au sens critique, de la pratique artistique.
Avec ce projet, notre volonté est de rappeler que le ministère de la Culture n’est pas seulement un ministère des arts. Mais aussi un ministère de la mémoire, de la langue, de l’être-ensemble. Un ministère du sens.
Nous portons, dans le moment de grands bouleversements qui est le nôtre, une responsabilité toute particulière. Nous sommes déterminés à l’assumer.
Je vous remercie.