Chris Marker nous a quittés. Il avait choisi de simplifier son vrai nom :
Christian-François Bouche-Villeneuve, pour mieux endosser la tenue de
camouflage du cinéaste globetrotteur, de « l'artisan bricoleur » qu'il aura été
pendant plus de soixante ans. C'était un artiste éclectique et engagé, le
parfait honnête homme du XXIe siècle alliant l'actualité politique du monde,
le goût du beau et les techniques numériques.
Cinéaste, documentariste, photographe, mais aussi éditeur, traducteur,
philosophe, essayiste, poète, et même illustrateur, Chris Marker était partout
présent, pour témoigner, dénoncer. Parachutiste pendant la Résistance,
missionné par l'Unesco dans les années 50 pour « mettre le cinéma au
service de l'éducation de base », son oeuvre gardera l'empreinte indélébile
de sa tendresse pour toutes les révolutions culturelles. Il a signé « La
Jetée » en 1962, qui lance sa célébrité, « Le Joli Mai » ou « Le Fond de l'air
est rouge », ses films majeurs. Il aimait collaborer avec d'autres cinéastes et
artistes de toutes sortes, voire de simples ouvriers. « Les Statues meurent
aussi », avec Alain Resnais, contre le colonialisme, ou « Lettre de Sibérie »,
dialoguent avec de mémorables portraits de Tarkovski ou de Kurosawa, où
transparaît sa propre vision esthétique et humaniste.
Le public avait pu admirer son oeuvre et sa fascination pour internet et l’art
numérique avec une rétrospective aux Rencontres d'Arles 2011 (300 oeuvres
photographiques créées entre 1957 et 2010).