La performance énergétique dans les bâtiments d’intérêt patrimonial
Le ministère de la Culture s’engage en faveur de la conciliation de la conservation du patrimoine avec les objectifs de performance énergétique voire d’efficacité énergétique.
Dans ce cadre, étudier les qualités intrinsèques d’un bâtiment d’intérêt patrimonial est primordial avant toute préconisation de travaux.
Éviter les travaux à caractère systématique
La recherche d’économies d’énergie doit éviter de conduire à des travaux à caractère systématique ayant pour résultat la modification irrémédiable des façades par pose d’isolations par l’extérieur, au remplacement de toutes les fenêtres et des menuiseries anciennes et à la dispersion de panneaux solaires en toiture, sans prendre en compte l’intérêt patrimonial et paysager du patrimoine bâti.
Conscients du risque de banalisation et de disparition d’une grande partie du patrimoine bâti, les architectes et les entreprises spécialisés proposent désormais des interventions cherchant à concilier de manière optimale les objectifs de performance énergétique et de préservation du patrimoine et de l’environnement bâti.
Privilégier les interventions durables
Cette approche spécifique et durable se traduit par la volonté de conserver ce qui fait l’essentiel du bâtiment, de mettre en valeur les qualités intrinsèques du bâtiment et de remployer ou recycler un maximum de matériaux. Cette démarche allie étude approfondie au préalable du bâti (inertie, ventilation), détection des ponts thermiques, recherche de solutions innovantes du point de vue technique, emploi de matériaux et de produits pérennes et sans risque pour la conservation à long terme des structures, du second œuvre et des décors architecturaux.
Il s’agit, par des études appropriées, de trouver des solutions pragmatiques et adaptées à chaque bâtiment d’intérêt patrimonial.
Une norme européenne de méthodologie pour aider à l’évaluation
Des actions ont été menées en ce sens dans le cadre de la production de normes européennes spécifiques et adaptées à la conservation du patrimoine culturel.
Ainsi, en juin 2017 a été publiée la norme NF EN 16 883 – Performance énergétique des bâtiments d’intérêt patrimonial.
Cette norme européenne, conçue par des praticiens et des professionnels du patrimoine, fournit des lignes directrices afin d’améliorer de façon durable la performance énergétique des bâtiments possédant une valeur historique, architecturale ou culturelle, tout en respectant leur intérêt patrimonial. Elle préconise une procédure de travail pour le choix des mesures, fondée sur l'investigation, l’analyse et la documentation du bâtiment et sur l’évaluation de l’impact de ces mesures par rapport à la préservation des éléments caractéristiques du bâtiment.
Chaque bâtiment d’intérêt patrimonial doit être considéré comme un cas particulier. L’intérêt patrimonial du bâtiment doit être évalué avec soin à l'aune de son contexte culturel régional, national voire international. Comprendre l’authenticité, l’intégrité et l’intérêt patrimonial du bâtiment permet de définir les éléments caractéristiques qu’il convient de préserver.
Les mesures préconisées doivent être conformes aux principes de conservation des bâtiments définis dans les chartes et réglementations internationales.
Entretenir avant tout
La norme rappelle aussi que le bon entretien du bâtiment patrimonial constitue la meilleure mesure de conservation. Toute mesure d’amélioration facilite donc l’entretien continu du bâtiment et de tout élément et matériau ajouté.
Respecter les caractéristiques
Toute intervention réalisée sur un bâtiment d’intérêt patrimonial doit respecter ses éléments caractéristiques, qui peuvent se présenter sous la forme de configurations spatiales, d’une apparence, d'une structure de construction et de systèmes techniques du bâtiment. Il convient d’éviter toute mesure entraînant une altération de ces éléments. Les interventions doivent être additives et, autant que possible, non invasives et réversibles afin de minimiser leur impact sur l’intérêt patrimonial.
Il est particulièrement recommandé que le choix des intervenants (architectes, bureaux d’études, diagnostiqueurs, auditeurs, entreprises) prenne en compte leur formation, leur qualification et leur expérience à intervenir sur des bâtiments d’intérêt patrimonial.
Le label expérimental Effinergie Patrimoine
Lancé en septembre 2019 pour une phase expérimentale de deux ans (prolongée d'un an), ce label est porté par le collectif Effinergie (association loi 1901) et a reçu le soutien du ministère de la Culture.
Le label expérimental Effinergie Patrimoine s'adresse aux maîtres d'ouvrage engageant des travaux de réhabilitation énergétique sur des édifices d'intérêt patrimonial, dont les immeubles classés ou inscrits au titre des monuments historiques.
Le label met en avant un triple objectif : des travaux au niveau basse consommation, des interventions engageant la préservation du patrimoine bâti, une amélioration de la qualité de vie dans ces bâtiments.
Une réglementation qui prend en compte les contraintes techniques, architecturales ou patrimoniales
En 2022, en application de la loi Climat et résilience, la réglementation relative aux audits énergétiques réglementaires prévue par l’article L. 126-28-1 du code de la construction et de l’habitation prend en compte les « contraintes techniques, architecturales ou patrimoniales » et les propositions de travaux « doivent être compatibles avec les servitudes prévues par le code du patrimoine ».
- Décret n° 2022-780 du 4 mai 2022 relatif à l'audit énergétique mentionné à l'article L. 126-28-1 du code de la construction et de l'habitation
Ce décret, pris en application de l’article 158 de la loi Climat et résilience, qui prévoit l’obligation d’un audit énergétique pour la vente des logements en mono-propriété les moins performants, précise les qualifications et compétences des professionnels qui effectuent ces audits énergétiques.
L’article 2 du décret prévoit notamment que « lorsque les contraintes techniques, architecturales ou patrimoniales ou le coût des travaux font obstacle à l’atteinte de la classe B au sens de l’article L. 173-1-1 du code de la construction et de l'habitation, l’auditeur en justifie dans son rapport ». - Arrêté du 4 mai 2022 définissant pour la France métropolitaine le contenu de l'audit énergétique réglementaire prévu par l'article L. 126-28-1 du code de la construction et de l'habitation
En particulier, l’article 2 de cet arrêté rappelle que les propositions de travaux faites dans le cadre de l’audit énergétique « doivent être compatibles avec les servitudes prévues par le Code du patrimoine ».
L’article 3 précise, à titre dérogatoire, la classe de performance énergétique à atteindre en cas de caractéristiques techniques, architecturales ou patrimoniales et prévoit que « les six postes de travaux sont considérés comme traités dès lors que l’auditeur atteste qu’ils ont été portés à un haut niveau de performance en faisant appel aux meilleures techniques disponibles et compatibles avec les caractéristiques du bâtiment concerné ».
L’article 4 dispose que le rapport de synthèse établi lors de l’audit comprend notamment la justification des caractéristiques techniques, architecturales ou patrimoniales.
Exceptions aux critères de la rénovation énergétique performante :
Article R. 112-18 du code de la construction et de l’habitation
Les bâtiments entrant dans le cadre de l'exception prévue au cinquième alinéa du 17° bis de l'article L. 111-1 du code de la construction et de l’habitation sont ceux pour lesquels des travaux de rénovation performante :
1° Entraîneraient des modifications de l'état des parties extérieures ou des éléments d'architecture et de décoration de la construction, en contradiction avec les règles et prescriptions prévues pour :
a) Les monuments historiques classés ou inscrits, les sites patrimoniaux remarquables ou les abords des monuments historiques mentionnés au livre VI du code du patrimoine ;
b) L'immeuble ou ensemble architectural ayant reçu le label mentionné à l'article L. 650-1 du code du patrimoine ;
c) Les sites inscrits ou classés mentionnés au chapitre Ier du titre IV du livre III du code de l'environnement ;
d) Les constructions, en vertu des dispositions du règlement du plan d'occupation des sols applicable prises sur le fondement des articles L. 151-18 et L. 151-19 du code de l'urbanisme, et relatives à l'aspect extérieur des constructions et aux conditions d'alignement sur la voirie et de distance minimale par rapport à la limite séparative et l'aménagement de leurs abords, sous réserve du droit de surplomb pour une isolation thermique par l'extérieur prévu à l'article L. 113-5-1 du code de la construction et de l'habitation ;
2° Excéderaient 50 % de la valeur vénale du bien, évaluée par un professionnel dans le domaine de l'immobilier ;
3° Feraient courir un risque de pathologie du bâti, affectant notamment les structures ou le clos couvert du bâtiment. Ce risque est justifié par une note argumentée rédigée par un homme de l'art, sous sa responsabilité ;
4° Ne seraient pas conformes à toutes autres obligations relatives, notamment, au droit des sols, au droit de propriété, à la sécurité des biens et des personnes ou à l'aspect des façades et à leur implantation.
Diagnostic de performance énergétique
Les monuments historiques classés ou inscrits en application du code du patrimoine ne sont pas soumis aux dispositions relatives au diagnostic de performance énergétique en application du e) de l’article R. 126-15 du code de la construction et de l'habitation.
À consulter :
- L'offre documentaire du centre de ressources pour la réhabilitation responsable du bâti ancien [CREBA]
- Les fiches conseils Amélioration thermique du bâti ancien [ATHEBA] de Maisons Paysannes de France
- Le guide pour la réhabilitation du bâti en centre-bourg : Adapter le bâti ancien aux enjeux climatiques (DRAC Bourgogne-Franche-Comté)
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