Le chantier de Notre-Dame de Paris
Dès le lendemain de l’incendie qui a frappé la cathédrale en avril 2019, le ministère et le Centre national de Recherche Scientifique (CNRS) ont mis en place un vaste chantier de restauration et de recherche scientifique regroupant des chercheurs et des laboratoires de toute la France et organisé en groupes de travail thématiques.
La cathédrale en feu, avril 2019, par Rémi Fromont, ministère de la Culture.
L’ouverture d’un chantier scientifique
Suite à l'incendie qui à frappé la cathédrale, de nombreux chercheurs ont rapidement affiché leur volonté de mettre leurs connaissances et leurs compétences au service de l’édifice, de ses œuvres d’art et du chantier de restauration.
Pour accompagner cet élan et organiser la vaste activité de recherche qui s’annonçait, le ministère de la Culture s’est rapproché du Centre national de la Recherche Scientifique (CNRS) pour coordonner un chantier scientifique qui soit l’occasion de nouvelles découvertes en parallèle du chantier de restauration.
Ce vaste chantier scientifique implique une cinquantaine d'équipes de recherche et laboratoires répartis dans toute la France et regroupe au total 175 chercheurs. Il apporte des informations utiles au chantier de restauration et renouvèle les connaissances sur l’édifice, son histoire, son environnement, et, plus largement, sur les cathédrales et sur le patrimoine.
Les résultats de ces travaux viendront enrichir un système d’information « monumental » innovant, véritable double virtuel de la cathédrale qui permettra de rassembler et de partager toute la connaissance produite sur le monument.
Le système d’information conçu dans le cadre du chantier scientifique intégrera progressivement les données produites par les différents acteurs : tant les acteurs du chantier scientifique (CNRS-Ministère de la Culture) impliqués dans la production de connaissances sur l’état actuel et les états antérieurs de la cathédrale (historiens, archéologues, architectes, ingénieurs, physiciens, chimistes…), que les acteurs impliqués dans la restauration de la cathédrale (Établissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame-de-Paris en tant que maître d’ouvrage, les maîtres d’œuvre, conservateurs, restaurateurs…).
Des groupes de travail thématiques
Le chantier scientifique CNRS/ministère de la Culture est organisé en 8 groupes de travail thématiques dont les responsables sont réunis tous les deux mois par les coordinateurs pour faire le point sur les projets de recherche, leur financement, leur état d’avancement, leur valorisation par le biais de conférences, de publications ou de contributions en ligne.
Ils sont formés de chercheuses et de chercheurs du Centre national de la recherche scientifique, du ministère de la Culture, de l’Université mais associent aussi des spécialistes étrangers.
Ils rassemblent des scientifiques de nombreuses disciplines : archéologues, historiens, historiens de l’art, anthropologues, physiciens, chimistes, ingénieurs, informaticiens... qui mettent leur science au service de Notre-Dame et du patrimoine.
Les huit groupes de travail
Le bois et la charpente
La charpente de Notre-Dame, principale victime de l'incendie, fut souvent comparée à une « forêt » en raison du grand nombre de poutres et de leur densité.
Cette « forêt » de Notre-Dame constitue un jalon très important dans l’histoire de la conception des charpentes. Certains de ses dispositifs structurels, uniques en leur genre, sont considérés comme les plus perfectionnés de leur temps.
En retracer l'histoire et en analyser les vestiges est une manière de restituer au public une partie de ce patrimoine.
L’acoustique
Les chercheurs du groupe de travail Acoustique étudient Notre-Dame dans le but de retrouver des acoustiques aussi proches que possible de celles qui ont pu accueillir le chant des orgues et des maîtrises et chœurs.
Contrairement à la pierre, au bois et au verre qui sont des entités solides, l'acoustique reste impalpable. Cette acoustique ne peut pas non plus rendre compte à elle seule la façon dont « sonnait » la cathédrale. Il convient donc aux chercheurs d’étudier également les ambiances sonores qui l’habitaient telles que les sons urbains (extérieur), les sons d’intérieur (les déplacements, les petites et les grandes cérémonies religieuses), les concerts…
Le métal
Ce groupe de travail du chantier scientifique apporte un nouvel éclairage sur l’usage du fer et du plomb dans l’édifice et nous invite à nous interroger sur l’évolution des pratiques liées à ces métaux au cours des siècles.
Le verre
La cathédrale Notre-Dame-de-Paris est éclairée par plus de 120 verrières datant du XIIIe au XXe siècle. Lors de l’incendie, la voûte a su remplir son rôle de bouclier en isolant plus de 3000m2 de surfaces vitrées et les pompiers ont réussi à maîtriser l’action de l’eau pour préserver la globalité des vitraux.
Une équipe transdisciplinaire apporte ses compétences dans le projet de restauration. Elle saisit aussi cette occasion pour étudier et valoriser les vitraux et tout particulièrement ceux du XIXe siècle, moins connus, mais représentant un ensemble important réalisé sous l’autorité d’Eugène Viollet-le-Duc.
La pierre et le mortier, décor monumental
L’incendie n’a pas seulement détruit la charpente de Notre-Dame mais il a aussi endommagé ses structures en pierre (voûtes, murs, colonnes). L’action de la chaleur ou de l’eau déversée pour éteindre le feu a en effet altéré la solidité des voûtes, l’état des maçonneries… qui doivent donc faire l’objet de diagnostics techniques.
C'est pourquoi un groupe de travail rassemblant une trentaine de spécialistes de la pierre, issus de différents domaines scientifiques a été constitué pour travailler sur ces questions.
Ces recherches offriront aussi l’opportunité unique de mieux connaître le processus de construction d’une grande cathédrale gothique.
Les structures
Ce groupe de travail s’intéresse à l’évaluation structurale des éléments qui constituent l’ossature de la cathédrale (structure maçonnée, charpente bois, beffrois …). II analyse aussi les actions qui peuvent s’exercer sur cette dernière, par le feu ou le vent.
Le numérique
L’ambition de ce groupe est de construire un “écosystème numérique” de la cathédrale. Ce système d’information monumental innovant est conçu pour accompagner l’étude scientifique et la restauration de la cathédrale au fur et à mesure du chantier de restauration.
Toutes les connaissances produites à l’occasion du chantier de restauration et du chantier scientifique pourront y être agrégées et seront ainsi rendues accessibles à différents types d’utilisateurs.
Ces axes de réflexion croisent plusieurs problématiques posées par le chantier de restauration comme la confrontation des différents états temporels, l’analyse de l’état sanitaire de la cathédrale, ou encore la restitution des formes disparues.
Émotions et mobilisations
Les vives réactions et mobilisations suscitées suite à l’incendie montrent que Notre-Dame n’est pas constituée que de pierres, de bois ou de vitraux. Tout autant que ses tours ou ses sculptures, elle est aussi formée de représentations et d’imaginaires collectifs qui la font exister aux yeux du monde.
Pour étudier ces aspects de l’incendie et de ses conséquences, anthropologues et sociologues se penchent au chevet de la cathédrale et suivent les étapes de sa restauration au sein du groupe de travail Émotions/Mobilisations.
La foule assiste en silence à l'incendie depuis le pont de la tournelle par Godefroy Paris, Créative Commons.
Documenter Notre-Dame : rassembler les archives et les photographies pour les mettre à disposition du projet de restauration
Avant toute intervention sur un monument historique, une importante étape documentaire s’impose. L’objectif est d’établir un diagnostic et un projet précis pour que la conservation et la restauration s’effectuent dans les règles de l’art et le respect de l’œuvre originelle.
Les bases de données du ministère de la Culture (Mérimée, Palissy et Mémoire) ont été enrichies et illustrées par la Médiathèque de l’architecture et du patrimoine afin de donner accès à toute la documentation photographique disponible, aux notices des objets mobiliers et aux inventaires des archives de la restauration de la cathédrale Notre-Dame.
En parallèle, un recensement des archives disponibles a également été réalisé par les Archives nationales qui disposent des fonds antérieurs à la Révolution et de ceux de l’administration des Cultes (Ministère de l’Intérieur) au cours du XIXe siècle. Un dossier conjoint sur ces ressources a été réalisé sur le portail France Archives.
Le ministère de la Culture et le CNRS mettent à disposition de plus amples informations sur les détails et le déroulement du chantier et du programme scientifique de la cathédrale sur un site internet dédié.
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