Sur la base des avis du comité d'experts, composé d'artistes et designers, d’enseignant(e)s en établissements d’enseignement supérieur et de chercheuses et chercheurs, qui s'est réuni les 27 et 28 mai derniers, la DGCA a retenu 15 projets, déposés à titre individuel ou collectif, comme l’autorisait cette édition 2024 de l’appel à projets RADAR.
Cet appel à projets poursuit plusieurs objectifs :
- susciter des objets de recherche spécifiques aux champs des arts plastiques et du design ;
- explorer des méthodologies de recherche fondées sur la pratique plastique et la production d’œuvres ;
- encourager l’expérimentation de formats de restitution publique de la recherche ;
- soutenir l’expérimentation pédagogique de sensibilisation, d’initiation et de formation par et à la recherche ;
- fédérer des établissements autour de thématiques communes ;
- encourager les partenariats avec les autres établissements d’enseignement supérieur et les structures de création et de diffusion de leur territoire ;
- renforcer l’attractivité et la visibilité des écoles par le développement de partenariats et de coopérations à l’échelle européenne et internationale.
Lors du processus d’évaluation des candidatures, les membres du comité d’experts ont été particulièrement attentifs aux critères suivants :
- originalité et pertinence du positionnement scientifique et artistique des thématiques et axes de recherche proposés ;
- cohérence avec la stratégie de recherche de la ou des écoles impliquées ;
- cohérence de l’articulation du projet de recherche au projet pédagogique de l’établissement, et notamment, modalités de participation des étudiants ;
- qualité, diversité et pertinence des partenariats, notamment avec des établissements artistiques et culturels et d’enseignement supérieur et de recherche ;
- faisabilité du projet : adéquation des objectifs avec l’organisation, la méthodologie, le calendrier et les moyens.
Pour cette édition, une priorité a été donnée aux projets menés avec des partenaires internationaux.
Ce dispositif s’inscrit dans les orientations de la stratégie ministérielle de la recherche (SMR) et en particulier dans l’enjeu de structuration de la recherche dans les écoles supérieures de la Culture.
Les quinze projets lauréats sont les suivants :
- « Re/generative performance. Somapolitique du commun » porté par l’Ecole supérieure d’art Annecy Alpes ;
Ce projet de recherche de l’École supérieure d’art Annecy Alpes lancé pour deux années se développe autour de la question « Comment les pratiques de performance collective peuvent-elles donner à repenser et régénérer les conditions esthétiques et politiques du commun ? ». Son terrain d’investigation se situe au carrefour des arts visuels et des arts vivants, là où la performance donne à percevoir les dimensions gestuelles et somatiques de l’agir collectif. C’est le lieu d’une interrogation sur la somapolitique du commun dans la performance collective. Deux axes thématiques structurent ce programme : d’une part, le problème technologique qui dissocie corps et présence, mais aussi corps et intelligence à travers les progrès de l’Intelligence Artificielle ; d’autre part, le problème écologique qui oblige à redéfinir les frontières du corps et ses relations à la vie et à la matérialité non humaine.
Pour affronter ces problèmes, seront produites des expérimentations artistiques visant en particulier à éprouver les limites de l’IA générative dans des formats de scripts de performances collectives, ou à explorer les décentrements régénératifs suscités par la perspective écoféministe. Les expérimentations et la réflexion théorique menées s’appuient sur des partenariats solides avec Bonlieu Scène nationale à Annecy, ainsi qu’avec Le Générateur à Gentilly, l’ABAQ en Italie et l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.
- « What’s love got to do with it ? Emotions, musique et pratiques de narration expérimentale » porté par l’Ecole supérieure d’art et de design de Grenoble-Valence, avec l’Ecole supérieure d’art de Clermont Métropole ;
Ce projet porté par l’École supérieure d’art et de design de Grenoble-Valence avec l’École supérieure d’art de Clermont Métropole, est initié par Benjamin Seror et Melis Tezkan au sein d’un Atelier de Recherche et Création sur la place de la musique dans nos mémoires et son rôle dans la structuration de nos souvenirs. « What's Love Got To Do With It? » interroge, en tant qu’artiste, la manière dont les émotions nous informent sur le monde et la façon dont elles contribuent à générer des récits. Il s’agit d’envisager ce qui est engageant dans la prise en compte des émotions, notamment pour ce qu’elles révèlent des récits collectifs. Ce projet prendra forme au sein de l'atelier, pour construire à travers la production d’images, de gestes, de sons, par couches, au fil des invitations et des workshops. En accueillant des artistes visuel(le)s, musiciens et musiciennes, performeurs et performeuses, historiens et historiennes, curateurs et curatrices, auteurs et autrices, chaque rencontre permet de penser les mécanismes de création de sens au travers des objets que nous manipulons.
Dans la prolongation de l’Unité de recherche en art de l’ESAD Grenoble « Hospitalité » et de son festival des Gestes de la Recherche, il s’agit de développer une recherche ancrée dans la pratique et la pédagogie, avec des moments d’échange et de restitution publics tout au long du projet. Il permettra ainsi de mettre en lumière la performance à l’échelle territoriale, nationale et internationale avec des partenaires de premier plan tel le Centre chorégraphique national, le Ciel et l’Association pour la Création et la Recherche sur les Outils d’Expression de l’INP à Grenoble, l’École Supérieure d’Art de Clermont Métropole, ou Centrale Fies en Italie.
- « Les Intrigantes » porté par l’Ecole européenne supérieure d’art de Bretagne, avec les écoles nationales supérieures d’art de Bourges et de Limoges ;
La trame appartient au vocabulaire textile et à celui de l’intrigue, du complot, du théâtre, de la criminologie et du cinéma. Tisser, tramer et nouer ont longtemps été associés au travail des femmes. Les objets textiles, quant à eux, sont équivoques, instables, ambigus, et multifacettes. Ils sont adaptables, pliables et transportables. L’art textile est un art d’intervention tout autant que d’exposition.
Ce projet de recherche porté par l’École européenne supérieure d’art de Bretagne avec les écoles nationales supérieures d’art de Bourges et de Limoges offre un panorama étendu des pratiques et des pensées textiles, tant modernes que contemporaines. Nous nous concentrerons cette année 2024-2025 sur les défis spécifiques liés à l’exposition des textiles : comment jouer des multiples facettes des objets textiles ? Comment en présenter les processus de fabrication ? Comment donner à voir le temps long de leur élaboration ? Quelle puissance et traction politique cette pensée souple peut-elle porter ?
Séances collectives de discussion en ligne avec les écoles partenaires, lecture de textes, appréhension d’un panorama large d’œuvres et de pratiques, discussion autour des projets personnels des étudiantes et étudiants, conférences d’artistes et designers, seront suivis d’un temps fort d’exposition et de symposium à Quimper en février 2025.
Ce projet de séminaire est co-conçu avec Cécile Vignau, designer textile, Clara Salomon, lissière et artiste de l’ENSAD Limoges, Ida Soulard, historienne de l’art de l’ENSA Bourges, et Eva Taulois, artiste, de l’EESAB Quimper.
- « Queering the Exhibition – Queering the Archive » porté par l’Ecole nationale supérieure d’art de Bourges, avec l’Ecole supérieure d’art et de design de Tours-Angers-Le Mans ;
Ce projet de recherche, porté par l’École nationale supérieure d’art de Bourges avec l’École supérieure d’art et de design de Tours-Angers-Le Mans, dirigé par Frédéric Herbin, Andreas Maria Fohr (ENSA Bourges), Sandra Delacourt et Fred Morin (ESAD TALM-Tours), en collaboration avec Benoît Buquet (InTRu – EA 6301 – Université de Tours), mobilise le champ de pensée et l’agentivité queer pour réenvisager les pratiques de l’exposition et de l’archive. Il s’appuie sur un contexte spécifique : d’une part, l’actualité curatoriale montrant un intérêt des institutions nationales pour les œuvres et thématiques touchant aux identités non hétéronormées ; d’autre part, une histoire à documenter des espaces locaux ayant contribué à questionner les normes de genre/sexualité (l’ENSA Bourges, l’association Emmetrop [Antre Peaux], le festival Désir… Désirs et l’ESAD TALM-Tours). Interface entre ces deux dimensions, notre projet porte un regard depuis des géographies marginales sur un mouvement d’abord étasunien et élaboré à partir des grands centres urbains. Il s’attache aux pratiques de collecte, d’identification et de classement constitutives aux fonds d’archives et aux collections, et aux dispositifs de mise en exposition et de médiation, qui construisent autant de discours/récits où œuvres et documents s’inscrivent. Ces techniques qui modèlent les savoirs et leur transmission, dessinent des processus qui peuvent rejoindre ceux de la création contemporaine : prélever, installer, mettre en récit, nous les confrontons à la possibilité d’un « agir queer », d’une « ouverture à ce qui dévie » (Ahmed) : testant leur capacité à accueillir sans catégoriser, définir, institutionnaliser des gestes et des manières d’agir autrement et souvent dissidentes.
- « Brain Roads : explorer les formes de la neuroplasticité » porté par l’Ecole supérieure d’art et de design de Reims ;
Brain Roads est un projet interdisciplinaire franco-allemand qui ambitionne de créer de nouvelles formes graphiques et des outils interactifs pour représenter et explorer le modèle fonctionnel du cerveau humain. Il réunit designers graphiques, ingénieurs, chercheurs en neurochirurgie et en sciences humaines et sociales. Les pratiques de neurochirurgie sont guidées par les technologies de tomographie comme l’IRM. Des traitements algorithmiques additionnels créent un jumeau numérique du cerveau du patient. Ces technologies non-invasives – destinées à l’analyse, la planification pré-opératoire et la navigation chirurgicale – s’interfacent avec nous par l’image. Pour faire progresser ces représentations, le groupe de recherche mobilise des concepts interdisciplinaires afin de développer des modèles et des prototypes qui introduisent de nouveaux paradigmes dans la visualisation. Le projet procède par itérations expérimentales successives pour enrichir la démarche de design. Nourri par de nouvelles approches de la matière, des modèles et des techniques, il ouvre des perspectives en matière de neurochirurgie, d’expression des dynamiques neuroplastiques et de diffusion des connaissances.
Brain Roads, porté par l’Ecole supérieure d’art et de design de Reims, avec le Cluster excellence Matters of Activity, Image, Space, Material de la Humboldt-Universität de Berlin, est un projet bilatéral France-Allemagne, avec pour partenaires en France Télécom SudParis – Institut Polytechnique de Paris, l’Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis, le CHU de Reims, le CHU Gui de Chauliac à Montpellier, et en Allemagne la Weißensee Kunsthochschule Berlin et la Charité - Universitätsmedizin de Berlin.
- « Belle morue » porté par l’Ecole supérieure d’art et de design Le Havre-Rouen ;
Ce projet de l’École supérieure d’art et design le Havre/Rouen porte sur la beauté du vivant à partir d’un terrain de recherche circonscrit, l’Islande, et d’un objet d’études au premier abord insolite : la morue. Et si la morue permettait de repenser nos représentations de la beauté ? L’harmonie d’un écosystème sur la base de critères fonctionnels prend désormais le pas sur une considération de la beauté des formes et des couleurs. Cela implique de prendre en compte les écosystèmes locaux, la biodiversité, la préservation des paysages océaniques et côtiers ainsi que l’habitat. Ses vertus médicinales, régénératrices et alimentaires, inscrites dans les traditions des Vikings, instaurent une proximité entre les humains et le poisson dont une figure-limite est la sirène de la mythologie nordique, être hybride, mi-poisson-mi-humain. Dans cette perspective, comment concilier tradition et innovation, soin de l’animal et soin de l’humain ?
Dans ce projet de recherche, la morue nordique (Gadus morhua) est questionnée au croisement d’enjeux écologiques et géographiques (pêche industrielle et guerres de la morue), scientifiques (recherches médicale et biochimique), esthétiques (redéfinition de la beauté du vivant), artistiques (productions plastiques). Ce projet engage une coopération entre l’ESADHaR, l’EPHE-PSL, l’Université des arts de Reykjavik et l’Institut Faire Faces à Amiens. Il réunit chercheurs, artistes et étudiants dans un groupe de recherches interdisciplinaire et international.
- « Environnement et paysage entre le Japon (Okinawa) et la Réunion » porté par l’Ecole supérieure d’art de La Réunion ;
Ce projet porté par l’École supérieure d’art de La Réunion questionne le poids économique de l’exploitation de la canne à sucre et sa traduction en poids symbolique (et en formes plastiques). On peut définir Okinawa et La Réunion par leur insularité et leur statut administratif vis-à-vis d’une « métropole ». Leur situation géographique est favorable à la culture de la canne à sucre ; son exploitation économique y est encadrée administrativement et politiquement. Dans plusieurs œuvres littéraires et artistiques de La Réunion et d’Okinawa, la canne à sucre est un motif récurrent. Les champs de canne à sucre sont ainsi à la fois paysages typiques de ces deux espaces insulaires et signes de modalités d’exploitation de cette plante.
Notre étude vise à historiciser les passages de la valeur économique de la canne à sucre à sa valeur symbolique et esthétique, par une mise en forme de données / matériaux recueillis par les différents chercheurs et chercheuses engagés dans le projet, d’abord, puis par un recoupement des problématiques et formes thématiquement similaires bien qu'issues de champs disciplinaires distincts (textes littéraires, articles en économie et en histoire, œuvres audiovisuelles et plastiques), enfin par la présentation de ce travail lors de séminaires et d’expositions qui auront lieu au Japon et à La Réunion.
Ce projet de l’APILab (ESA La Réunion) est en partenariat avec l'unité de recherches Océan Indien : Espaces et Sociétés (OIES) de l’Université de La Réunion et l’Université Chuo à Tokyo.
- « Matériaulogie des images » porté par l’Ecole nationale supérieure de la photographie d’Arles ;
Ce projet, porté par l’École nationale supérieure de la photographie d’Arles, en partenariat avec l’université Toulouse Jean Jaurès, regroupe une quarantaine de chercheurs et d’étudiants en art. L’enjeu est d’aborder l’image (sa conception, sa fabrication, sa capacité réflexive) par l’angle matériel, c’est à dire d’essayer de la repenser à partir des substances imageantes que sont les matériaux du monde (matériaux physiques purs ou composites comme la terre, le minéral, le végétal, mais aussi processus biologiques ou chimiques comme la bioturbation ou la fermentation). Dans ce projet, les matériaux sont placés au cœur de la réflexion : en les comprenant comme des puissances d’agir, il s’agit d’expérimenter leurs propriétés imageantes, la manière dont ils peuvent faire image et, ce faisant, façonner des formules de subjectivité. Cette perspective engage une tout autre manière de penser les images et invite à chercher, au plus proche des éléments du monde, de nouvelles manières de les fabriquer. Il s’agit d’expérimenter les rapports de co-constitution des images avec d’autres formes d’existants, les éléments du monde physique. Cette recherche se propose d’appréhender l’image comme un « autre vivant » par lequel des formes de vie adviennent, et par là, d’étudier les interrelations entre les images et leurs milieux. Dans cette visée, s’opère un décentrement, qui fait passer d’un regard anthropocentré à un regard écocentré, attentif aux relations entre les êtres et les milieux, ainsi qu’aux relations entre les formes, les forces, les images et les supports.
Véritable recherche par l’art, ce projet propose d’inventer d’autres modalités de recherche entre travail de terrain (que nous préférons qualifier de « relation au monde »), forte interdisciplinarité (esthétique, théorie des images, philosophie, anthropologie, humanités écologiques, mais aussi emprunts épistémologiques ou méthodologiques aux sciences dites dures, notamment pédologie, géosciences, biologies « alternatives » comme celle de Lynn Margulis, etc.), savoirs situés et expérimentations plastiques. Il ne s’agit pas seulement d’un geste de décloisonnement des savoirs, mais plus essentiellement d’une structuration de la recherche et de la création permettant d’envisager et de décrire des modes d’apparition, de figuration et de transformation des images.
- « Type versus Standard » porté par l’Ecole nationale supérieure d’art et de design de Nancy, avec l’Ecole supérieure d’art et de design de Saint-Étienne ;
Au-delà d’établir l’agilité de la notion allemande de Typen en design, la recherche propose des résultats : hypothèses historiques (textes et faits des chercheurs en sciences humaines et sociales et sur le design) et prototypes ou protocoles tangibles (artefacts et productions des chercheurs en design, des designers et des étudiants).
Typen en français – comme en anglais - a été́ traduit par « standardisation ». Or la « typification » ou « typisation » est tout à fait différente du système fixiste et déterminé de la norme induit par le « standard ». En réintroduisant le caractère dynamique du type, il s’agit d’imaginer que les transformations nécessaires des méthodes de conception à l’ère des transitions climatiques et énergétiques demandent fluidité et souplesse. Dans le cadre du design des transitions, Typen vs Standard n’est donc pas une simple redécouverte historique, mais veut réarticuler les fondements entre design et production alors que nos modes de consommation doivent profondément évoluer.
Type vs Standard est un projet collectif, porté par l’École nationale supérieure d’art et de design de Nancy avec l’École supérieure d’art et de design de Saint-Étienne, dirigé par G. Bertrand (ESADSE), M. Favart (Université de Strasbourg) et C. Geel (Ensad Nancy- Paris Saclay). Projet lauréat de l’appel à projets 2024 du Réseau national des Maisons des Sciences de l’Homme (MSH), il est aussi soutenu par la Misha, la MSH Paris-Saclay, l’ACCRA-UR 3402, le CRD– Ens Paris-Saclay / Ensci-Les Ateliers et l’Ensad Nancy. Il bénéficiera d’une diffusion en science ouverte sur Problemata.org. Résolument européen, des partenaires belges et allemands en font partie.
- « Play>Urban Mayotte-Strasbourg 25-26 » porté par la Haute école des arts du Rhin, avec l’Ecole supérieure d’art de La Réunion ;
Play>Urban, porté par la Haute école des arts du Rhin (HEAR) est un programme de recherche-création de l’atelier de Scénographie à la HEAR à Strasbourg, qui s’intéresse aux esthétiques de la socialité et aux pratiques artistiques en milieux urbains. Lors de résidences en immersion, ici à Mayotte (depuis 2011, Johannesburg, Strasbourg, Bruxelles, Medellin et Conakry) mixant recherche et pratique, nous puisons dans l’ordinaire et le remarquable de la vie pour inventer, avec des habitants et des artistes locaux, des gestes performatifs, de théâtralité, tissés des récits, des témoignages, des spéculations nourries d’histoires sociales, de ce qui fait la singularité du quotidien dans un milieu, de ce qui se joue dans les gestes, les corps, les musiques, les rêves et les aspirations, les manières de vivre ensemble. On prête encore trop peu attention à la puissance des esthétiques de la vie quotidienne et à la dimension artistique des façons de faire et c’est ce que Play>Urban travaille à expérimenter.
Un ensemble de propositions sera visible en fin de résidence lors de présentations publiques sur l’île de Petite-Terre, où est implanté le Royaume des Fleurs, la structure artistique qui co-réalise le projet. Des étudiants et enseignants de la HEAR, de l’ENSATT à Lyon et de l’École d’Art du Port à la Réunion, des artistes de la région (Madagascar, Tanzanie, Comores…) et des chercheurs se joindront au projet. En 2026, un événement sera organisé à la HEAR Strasbourg, qui fera retour sur la résidence mahoraise.
- « Riken no ken, le regard éloigné » porté par l’Ecole supérieure d’art d’Avignon ;
Le projet Riken no ken se construit autour d’une collaboration entre l’École Supérieure d’Art d’Avignon et l’université d’art de Musashino à Tokyo. Il prend pour titre l’expression par laquelle Zeami désigne la capacité de l’acteur de Nô à se percevoir en imagination depuis le point de vue du spectateur. La formule métaphorise ici le désir d’articuler les échelles du local et du global (avec leurs problématiques sociétales et environnementales), en nourrissant l’appréhension d’un contexte donné de l’apport d’un regard extérieur éloigné. D’autres enjeux découlent des spécificités des deux cursus de l’ESAA, Création et Conservation-Restauration. Émanant d’un Atelier de Recherche-Création inscrit dans le champ des cultures numériques, le projet s’attachera à une analyse critique des outils mis en jeu (courriels, visioconférences, réseaux sociaux...), sondant leurs incidences sur l’information véhiculée et les envisageant comme médiums artistiques et espaces d’exposition potentiels. Il s’agira aussi de nourrir les pratiques de conservation des spécificités de l’approche japonaise qui privilégie, plutôt que la préservation de l’objet dans sa matérialité, celle de son idée, de son principe et des savoir-faire qui lui sont associés.
Le projet s’appuiera sur le soutien de l’Institut français de Tokyo et du Grenier à Sel (lieu d’art avignonnais) pour développer des ateliers collaboratifs à distance, des mobilités entrantes et sortantes, des séminaires, des expositions et des publications.
- « L’océan comme méthode » porté par l’Ecole des beaux-arts de Nantes Saint-Nazaire ;
L’océan comme méthode, porté par l’École des Beaux-Arts Nantes Saint-Nazaire, permet de mobiliser des complicités intellectuelles et artistiques inédites (entre étudiantes et étudiants de licence de Saint-Nazaire, de master et doctorat de Nantes, enseignantes et enseignants, intervenantes et intervenants) autour d’un projet commun inscrit sur le littoral entre Saint-Nazaire, Nantes et Lorient, et en étroit contact avec l’Institut Sup’Imax de Dakar, l'Institut des Humanités, Arts et Sciences de l'université de Bahia et avec l’île de Mozambique afin de considérer d’autres réalités, récits historiques, savoirs et points de vue. Dans ces ports, infrastructures, institutions, traces du passé et segments de la réalité contemporaine témoignent des activités qui s’y sont jouées ou s’y déploient aujourd’hui : commerce des matières premières, des humains, des espèces marines ou végétales, tourisme de masse, productions diverses, réseaux énergétiques, aéronautique et organisations militaires, établissements scientifiques de recherche, ou encore travailleuses et travailleurs du monde entier. Facteurs de la mondialisation depuis des siècles, les océans sont aujourd’hui menacés par les activités humaines et posent des enjeux mondiaux majeurs. Perçus comme des archives interconnectées, des interrelations humaines et non-humaines, guidées par des courants qui se chevauchent, se rencontrent et divergent, leurs mouvements rythmiques s'envisagent comme technique d’écriture, espaces superposés et enchevêtrés.
À partir d’enquêtes collectives in situ, utilisant divers modes opératoires, de séminaires, de workshops structurés en deux axes « L’océan en nous » et « Décoloniser l’océan », les étudiantes et étudiants définiront des projets individuels et collectifs montrés lors d’expositions. Une édition réunissant des contributions des artistes et chercheurs et chercheuses invités ou partie prenante du projet sera réalisée.
- « Nouvelles gestualités » porté par l’Ecole nationale supérieure d’art et de design de Limoges ;
Ce projet porté par l’École nationale supérieure d’art et de design de Limoges place les gestes de métier des céramiques comme « archives vivantes » et sources d’étude qui nourriront des travaux de création en lien avec les technologies immersives, robotiques, numériques et les intelligences artificielles génératives dans le champ de l’art et du design. Programme de recherche située, il prend comme point d’appui le territoire du Limousin en tant que corpus vivant de savoir-faire traditionnels et d’innovations liés aux céramiques et souhaite engager un lien fort avec la péninsule ibérique. À partir de modalités exploratoires croisées (immersion, expérimentations, enquêtes, récoltes et archivages) sur le geste, l’objectif est de faire émerger des processus en cours de transformation que les étudiants de l’Ensad Limoges peuvent réinvestir en art et en design dans une logique d’hybridation des pratiques.
Ce projet place les étudiants dans différentes situations d’investigations, de rencontres et d’apprentissage des savoir-faire liés aux céramiques : acteurs économiques et culturels, entreprises de production et travaux de chercheurs en territoire limousin mais également national et européen. De plus, les étudiantes et étudiants exploiteront les possibilités d'interactions liées à la captation des mouvements et aux intelligences artificielles génératives, celles-ci entremêlant des savoir-faire traditionnels avec des outils numériques de pointe. Les résultats attendus avec ces technologies se retrouveront directement exploités dans les créations des étudiantes et étudiants en art et design. Le projet Nouvelles Gestualités, qui unit production de connaissances (recherche) et transformation créative (action) à partir des gestes de métier des céramiques, cherche à amplifier le champ des pratiques et des connaissances techniques par le biais des nouvelles technologies mais aussi par le partage et l’analyse de l’expérience individuelle et collective. Ainsi, les méthodologies croisées et les coopérations intercatégorielles voulues par le projet Nouvelles Gestualités permettent de revisiter non seulement le rapport aux savoirs mais également cherche à ouvrir des voies autres dans les manières de « fabriquer ».
Nouvelles gestualités est dirigé par Indiana Collet Barquero, historienne du design, Fabrice Cotinat, artiste visuel en charge des ateliers photo, vidéo, son, et Jessie Derogy, designer céramique en charge des ateliers céramiques au sein de l’Ensad Limoges, en partenariat avec l’École des Arts de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Le Laboratoire du Geste à Paris, Le Lieu Multiple à Poitiers, la Cinémathèque de Nouvelle-Aquitaine, les manufactures Haviland et Bernardaud à Limoges, le Pôle Européen de la céramique de Limoges, l’Entreprise Ceramica Cumella en Catalogne (Espagne), le Super Modern Art Museum (SPAMM), l’École des hautes études en sciences sociales, les Écoles supérieures d’art d’Angoulême (ÉESI) et de Pau (ESAD).
- « La Fraude. Revue de recherche sur ce qui fait commun et nous transporte » porté par l’Institut supérieur des beaux-arts de Besançon ;
La Fraude est une revue de recherche, entièrement conçue par un groupe d’étudiantes et d’étudiants de l’Institut Supérieur des Beaux Arts de Besançon, dont la trame thématique repose sur le réseau de bus bisontin.
Au sein de la revue, nous pointons la force de l’expression transports en commun : qu’est-ce qui nous transporte - dans tous les sens du terme ? Qu’avons-nous en commun ? Nous explorons la ville à travers son réseau pour tisser du lien entre les lieux, entre les gens. Nous nous inspirons des mouvements du transport en commun, caractérisé par des départs et des arrêts, pour montrer la façon dont le transport est essentiel au rythme, à la respiration d’une ville. Nous lisons la ville et ses enjeux sociaux en nous appuyant sur la carte du réseau des arrêts de bus. Ensemble, nous réfléchissons à la façon dont les expériences sociales, le réel, l’environnement, sont le terreau de la recherche et de la création, en prônant d’emblée une transversalité des pratiques. La revue est le lieu dans lequel les étudiantes et étudiants en école d’art s’inspirent des pratiques des chercheurs et chercheuses en sciences humaines et sociales pour produire des formes. Elle est un lieu d’ancrage dans le territoire, dans lequel se révèle son potentiel théorique, critique et poétique.
Les numéros se succèdent à la manière d’un itinéraire du réseau de transport bisontin : chaque numéro part du nom d’un arrêt de bus de la ville. Celui-ci est un prétexte pour explorer des thématiques de recherche variant à chaque numéro.
La Fraude est un projet porté par l’Institut supérieur des beaux-arts de Besançon, avec pour partenaires le LaSA - Laboratoire de sociologie et anthropologie de l’Université de Besançon (UR 3189) et l’IRIS - Institut de recherche interdisciplinaire sur les enjeux sociaux, Paris (UMR8156 - U997).
- « Art / Design des terres » porté par l’Ecole nationale supérieure d’art de Dijon.
Ce projet de recherche, porté par l’École nationale supérieure d’art de Dijon résonne avec l'appel des naturalistes des terres à « (re)lancer un réseau des naturalistes en lutte pour qui la pratique ne doit pas se résumer à la seule contemplation ou à l'inventaire du désastre. » Son ambition tout autant théorique que pratique consiste à tenter de comprendre, en tant qu’artistes et designers, comment rendre possibles des cohabitations entre des êtres vivants, humains et non-humains. Sur le plan méthodologique, cet objectif demande un effort de décentrement systématique. Il s’agit pour la créatrice ou le créateur de tenter de désanthropocentrer les usages, notion fondamentale d'un large spectre des designs.
À l'invitation d’Olivier Hamant nous explorons les manières de transposer les qualités de robustesse du vivant aux cadres objectifs de l’art et du design. Rappelons ici que cette capacité des êtres à survivre à une perturbation des milieux s'opère au détriment de leur performance. Cette adaptation suppose donc un renversement du paradigme performatif de nos disciplines. Elle suppose également que nous comprenions intimement l'altérité. C'est pourquoi nous proposons de traverser les points de vu(i)e des espèces « nuisibles ». Elles agissent en recherche en tant que critique experte de la robustesse des infrastructures et du design des territoires. Il nous faut enfin une matière située, des lieux à partir desquels créer et expérimenter ce qui nous relie. Pour sentir/penser avec la terre, il faut y aller, dessiner depuis le terrain. Ce projet est réalisé en étroite coopération avec Arcade, Design à la campagne, le Musée Buffon de Montbard, le Maquis et l’Université de Bourgogne.
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Composition du comité d’experts de l’édition 2024
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