Le ministère de la Culture a restitué le 1er avril 2022 le tableau de Marc Chagall, Le Père, auparavant affecté au musée national d’art moderne-centre de création industrielle et déposé au musée d’art et d’histoire du Judaïsme, aux ayants droit de son propriétaire spolié à Lodz (Pologne) en 1940, David Cender.
Cette restitution s’est faite en application de l’article 4 de la loi du 21 février 2022 relative à la restitution ou la remise de certains biens culturels aux ayants droit de leurs propriétaires victimes de persécutions antisémites.
Cette loi autorise la sortie des collections publiques de cette œuvre, ainsi que de 14 autres, en vue de leur restitution ou remise à leurs propriétaires légitimes.
Il est apparu, grâce à des recherches récentes, que Le Père, entré dans les collections nationales en 1988 par dation en paiement des droits de la succession de Marc Chagall, correspondait au tableau volé à David Cender en 1940 en Pologne, dans le cadre des persécutions antisémites nazies.
Luthier et musicien juif polonais, David Cender avait acheté le tableau à Varsovie en 1928. Il en a été spolié après son transfert au ghetto de Lodz en 1940. Déporté à Auschwitz, David Cender a survécu, tandis que sa femme et sa fille ont été assassinées. Après avoir émigré en France en 1958, il a entamé des démarches auprès des autorités fédérales allemandes pour obtenir réparation de ce vol, qui n’ont pu aboutir. David Cender est mort à Metz en 1966.
Le tableau de David Cender correspond au tableau Le Père, peint par Marc Chagall en 1911, qui était sorti du patrimoine de l'artiste au moment de la Première guerre mondiale ou peu après. Par la suite, l’artiste a racheté, sans doute entre 1947 et 1953, l’œuvre dont il ignorait le parcours si singulier.
L’histoire de ce tableau souligne une fois encore l’importance de la recherche de provenance sur l’historique des œuvres entre 1933 et 1945, qui vise à assurer que les biens culturels conservés dans les collections publiques n’ont pas été l’objet de spoliations antisémites pendant cette période. Plusieurs musées de France nationaux et territoriaux ont ainsi engagé des recherches visant à identifier les œuvres à la provenance incertaine, éventuellement spoliées, parmi celles acquises légalement depuis 1933, jusqu’à aujourd’hui. Ces travaux de recherche sont menés avec l’appui, le cas échéant, du ministère de la Culture.