« Écrire, c’est parler à la mort mais lui mentir », écrivait Michel Schneider dans ses Morts imaginaires, livre spectaculaire d’intelligence, couronné en 2003 par le Prix Médicis, où le psychanalyste réfléchissait l’auteur.

Avec une œuvre abondante, protéiforme et singulière, l’écrivain aura donc, jusqu’à hier, démystifié la mort. C’est en lisant, en écrivant – ses deux mains - et par un transfert de l’intimité de l’auteur, que cet inconditionnel de Montaigne, Pascal, Orwell, Proust ou Baudelaire, appréhendait l’existence et son achèvement.

Partisan d’une forme fictionnelle et impersonnelle du récit de soi, l’écrivain avait aussi choisi de servir l’État en passant l’ENA et en intégrant successivement le ministère de l’Économie et des Finances, la Cour des Comptes et, en 1988, le ministère de la Culture, qu’il a quitté, homme libre, au bout de trois ans. Notamment pour reprendre sa plume et tirer de son expérience une critique étayée et emportée, La Comédie de la culture.

En ardent gardien de l’intérêt général, Michel Schneider s’est efforcé à la Direction de la Musique et de la Danse de mettre en œuvre une politique nationale musicale et chorégraphique, fondée sur sa foi en l’éducation et la pratique artistique pour former les publics de demain et « transformer la consommation passive et indifférenciée en pratique musicale ».

Son engagement s’expliquait aussi par sa passion pour la musique, qu’il pratiquait en pianiste talentueux et qu’il explorait en plongeant dans la vie de ses interprètes et compositeurs adorés, Glenn Gould, ou Robert Schuman.

D’étonnantes biographies dont les merveilleuses pages révèlent un flamboiement génial et une blessure intérieure, aussi fine qu’émouvante, palpable également dans Comme une ombre, hommage masqué et sensible à son frère suicidé, perdu par la guerre d’Algérie. « L’homme aux livres », comme il s’était lui-même surnommé, a eu pour dernière compagne littéraire Marilyn Monroe. Après un ouvrage récompensé par le prix Interallié, Marilyn, dernières séances, consacré aux rapports troubles de son psychanalyste avec la star, Michel Schneider s’est intéressé à ses relations amoureuses.

Marilyn, les amours de sa vie paraîtra en octobre « à titre posthume » plutôt que sans lui car, en le lisant, nous entendrons à nouveau chanter sa voix.

J’adresse à ses enfants, Vanessa Schneider et François Schneider, ainsi qu’à tous ses proches, mes sincères condoléances.