Bonjour à tous,

Monsieur le Président, cher Jean-Luc Martin,

Monsieur le Directeur général, cher Jérôme Tréhorel,

Chers amis,

 

Je suis absolument ravie d’être parmi vous aujourd’hui.

On m’a soufflé que cela faisait treize ans que ce festival n’avait pas reçu la visite d’une ou un ministre de la Culture : il était temps.

Depuis quelques semaines, je parcours la route des festivals à travers la France et je dois vous dire que l’atmosphère et l’énergie qu’on retrouve ici ont quelque chose de bien spécial.

C’est d’abord grâce à vous, grâce à votre engagement, et je veux donc commencer par vous rendre hommage : merci à tous les membres de l’association des Vieilles Charrues, tous les partenaires, tous les mécènes, tous les bénévoles...

Si ce festival a pu voir le jour, c’est parce que des passionnés, des militants, des entrepreneurs comme vous sont là, depuis le début, pour se remonter les manches à croire à ce qui était d’abord un projet un peu fou et soutenir son développement.

Si j’ai tenu à pouvoir faire une étape par ici, dans ma tournée des festivals, ce n’est pas seulement parce que celui-ci est le plus grand… ni pour rattraper les treize années perdues … Mais parce que les Vieilles Charrues incarnent tout ce que je défends.

Je voudrais profiter d’être devant vous pour saluer les valeurs qui sont portées ici, qui rencontrent mes combats, mes convictions; et vous dire plus largement la politique que je porte pour que des festivals comme celui-ci puissent continuer à vivre partout en France.

Un mot de ce qui fait l’exemplarité de ce festival à mes yeux, d’abord :

Il y aurait beaucoup à dire, mais je voudrais évoquer un triple engagement : territorial, artistique, et citoyen…

La force des Vieilles Charrues, c’est un ancrage local, la relation tissée avec le territoire…

C’est le soutien de tout un tissu économique, politique, associatif.

Ce sont les partenariats, les actions de mécénat et de sponsoring développés avec des dizaines d’entreprises de la région. C’est la confiance que vous avez su nourrir auprès des élus que vous avez réussi à fédérer autour de votre projet.

Je me bats chaque jour pour la valorisation des initiatives culturelles comme celles-ci, qui voient le jour loin du cœur des métropoles, qui font la vie des zones rurales, des quartiers, des villes moyennes.

La culture joue un rôle essentiel. Non seulement elle crée du lien, mais elle crée de l’emploi, elle crée de l’activité, elle renforce l’attractivité.

C’était un vrai pari, que de lancer un festival au cœur de la Bretagne, loin du littoral, et de faire venir des artistes de renommée internationale ici : vous avez réussi.

Pour la politique territoriale que je défends, qui rencontre parfois des critiques, des scepticismes, vous offrez ce qu’il y a de plus précieux : vous offrez une preuve, un modèle de réussite.

L’exemplarité de ce festival, elle est ensuite dans son engagement artistique.

C’est le pari de l’éclectisme : la programmation de cette 27ème édition en est encore la plus belle illustration. L’un des plus grands défis de la politique culturelle, aujourd’hui, c’est de défendre la diversité contre l’uniformisation qui est charriée par la mondialisation : vous participez à ce combat et je veux vraiment vous en remercier.

Je veux aussi saluer la part belle faite aux artistes locaux, et le soutien qui est apporté depuis plus de vingt ans à l’émergence de jeunes talents.

Et enfin, si ce festival est exemplaire, c’est par son engagement citoyen.

Je pense au modèle vertueux d’implication des associations de bénévoles :

Vous êtes plus d’une centaine à soutenir ce festival, en mobilisant près de 7.000 bénévoles au total !

Et en retour, le don que vous reverse le festival vous permet de développer des activités, au service du territoire, au service de ses habitants, au service aussi de projets humanitaires bien au-delà de nos frontières.

Quand je parle d’engagement citoyen, je pense aussi à l’écologie évidemment : un enjeu qui m’est cher depuis bien longtemps et sur lequel vous êtes à l’avant-garde.

Pour toutes ces raisons, les Vieilles Charrues sont exemplaires : exemplaires de ce qui fait la force de la vie culturelle française ; et exemplaires de ce que je défends.

Au-delà de ses singularités, ce festival est emblématique de milliers d’autres en France, qui reposent sur la passion et la générosité de professionnels, élus, associatifs.

Des festivals qui sont partis de rien, et qui jouent aujourd’hui un rôle décisif pour le territoire, les artistes, les citoyens. Qui occupent une place majeure, incomparable et irremplaçable dans la vie des Français.

L’exemplarité, l’Etat doit la soutenir et la valoriser.

Nous aurons une politique à la hauteur de ce que vous représentez pour la France.

Nous aurons une politique à la hauteur des défis que vous rencontrez.

Je veux en dire un mot, car j’ai entendu les interrogations qui ont pu émerger ces dernières semaines.

Ma première décision – et c’est la première marque de mon engagement pour les festivals, de ma détermination à prendre vos problématiques à bras le corps – fut la nomination d’un référent permanent au sein de mon ministère.

Il n’y avait pas d’interlocuteur clairement identifié pour les festivals jusqu’ici.

J’ai donc décidé d’en nommer un : Serge Kancel, qui est là aujourd’hui avec nous et que je remercie pour son engagement.

En arrivant au ministère, l’an dernier, j’ai par ailleurs été frappée par le manque de données et de visibilité que nous avions sur le paysage festivalier français. Or sans données, on ne peut pas dérouler de politique adaptée. C’était un travail colossal, mais un passage obligé.

J’ai demandé à Serge de dresser un panorama du paysage des festivals en France, qui est désormais disponible sur le site du ministère.

Près de 2.000 festivals ont déjà été répertoriés. Il en existe davantage. Serge va poursuivre son travail et la plateforme a aussi vocation à être alimentée par les organisateurs, les associations, les élus locaux, de façon collaborative.

Ce panorama peut avoir l’air anecdotique, mais c’est une innovation décisive.

C’est d’abord un précieux outil d’information, pour tous les Français, qui peuvent désormais accéder à la carte des festivals dans leur région.

C’est par ailleurs un outil indispensable pour nos politiques publiques.

C’est un outil d’observation. Il va permettre d’étudier l’évolution du paysage d’année en année, la pérennité des festivals, les créations et les disparitions.

Et c’est un outil de pilotage et de suivi pour nos politiques, nos subventions.

Il va nous permettre d’agir de façon plus efficace, plus juste, aux défis que les festivals indépendants peuvent rencontrer en France.

La densité et la diversité de l’écosystème des festivals français sont aujourd’hui fragilisées par différents facteurs.

Je voudrais évoquer trois grands défis :

La variation des subventions publiques, d’abord, qui est liée aux contraintes budgétaires mais qui fragilise les festivals qui en dépendent.

Le panorama dressé par Serge Kancel comporte des données sur le niveau de soutien apporté à chaque festival et nous permettra d’améliorer le pilotage.

On compte 600 festivals subventionnés par le ministère de la Culture ou par les établissements que sont le Centre national du livre, le Centre national des variétés, et le Centre national du cinéma.

J’ai demandé à Serge un travail concerté sur la rédaction d’une circulaire définissant précisément les critères de soutien public aux festivals.

Je souhaite ce travail en concertation avec les élus et les professionnels. Il est en cours et devrait être finalisé dans quelques semaines.

Deuxième enjeu : la prise en charge des coûts de sécurité, dans le contexte d’une menace terroriste toujours élevée.

Dans une circulaire du 15 mai, le ministre de l’Intérieur avait rappelé les règles en vigueur pour la facturation des services d’ordre. Des difficultés localisées ont pu survenir dans l’interprétation du texte et j’ai donc alerté Gérard Collomb.

Nous avons donc communiqué ensemble, début juillet, pour réaffirmer l’attachement de tout le gouvernement aux festivals, mais aussi la priorité que constitue la sécurité des artistes et du public.

Le ministre de l’Intérieur a rappelé aux préfets la nécessité de faire preuve de discernement dans l’application des instructions, pour que la facturation des services d’ordre soit toujours compatible avec l’équilibre économique des festivals et ne fragilise pas les événements. Nous avons aussi rappelé qu’une évolution du montant facturé devait systématiquement être discutée avec l’organisateur, et suffisamment en amont des événements.

Les services de mon ministère en région se rapprocheront des préfets pour étudier la situation à la moindre complication.

Un bilan d’étape de la circulaire du 15 mai sera fait à l’automne dans le cadre du comité interministériel de suivi de la sécurité des établissements et événements culturels.

C’est un enjeu que je suis avec la plus grande attention, comptez sur moi.

La sécurité des artistes et des festivaliers est notre priorité.

Troisième sujet de préoccupation : le risque de concentration dans le secteur.

Depuis quelques années, on assiste à des rachats de festivals par des grands groupes, ce qui a pour conséquence la hausse en cascade des cachets des artistes, que les petits festivals indépendants ne peuvent plus assumer, et ce qui entraine des risques de captation du public, d'uniformisation de l'offre artistique.

J’ai entendu les alertes sur le sujet, et je n’ai donc pas attendu pour agir.

J’ai décidé de lancer une mission interministérielle, en lien avec les collectivités territoriales et les acteurs des festivals, avec trois objectifs :

-       Tout d’abord, prendre la mesure du phénomène ;

-       Ensuite : identifier les mauvais joueurs éventuels, repérer les pratiques qui sortiraient du cadre des règles normales de la concurrence ;

-       Troisièmement : faire émerger des pistes d’action pour le gouvernement.

Nous prendrons les mesures qui s’imposent.

Sans attendre, j’ai souhaité pouvoir formaliser les principes que je défends dans une « Charte des festivals », que mon ministère va diffuser. A travers ce document, j’ai tenu à réaffirmer un engagement politique en faveur des festivals, de leur rôle sur les territoires et de l’écosystème culturel qu’ils créent.

Cette Charte, c’est une forme de « code de bonne conduite », un pacte d’engagement et de solidarité qui rappelle ce qui fonde le « fait festivalier » dans notre pays, et l’importance de le protéger.

Elle a vocation à être diffusée à partir d’aujourd’hui dans tous les festivals : aux organisateurs, aux élus, aux bénévoles, aux artistes.

Elle a déjà rencontré un écho favorable parmi plusieurs associations d’élus locaux, et j’entends continuer à travailler avec eux.

Par cette Charte, nous nous engageons à soutenir les festivals qui sont « exemplaires » sur le plan de la diversité et de l’excellence artistiques ; exemplaires sur le plan de l’ouverture au public, avec des actions de sensibilisation, des efforts tarifaires ; exemplaires sur le plan de l’empreinte territoriale ; exemplaires sur le plan économique, en termes d’attractivité, d’emploi, de structuration de la filière culturelle ; exemplaires sur le plan de la responsabilité sociale et environnementale.

Nous nous engageons aussi à accorder une attention particulière aux festivals émergents et à ceux dont le modèle économique est fragile.

Quand je parle de « soutien », je pense aux subventions mais pas seulement.

Le rôle de mon ministère ne s’arrête pas là. Vous en êtes l’illustration.

Vous offrez la démonstration que des événements exemplaires peuvent aussi vivre hors soutien étatique, grâce au mécénat notamment. Ça ne veut pas dire que nous ne sommes pas derrière vous.

Les directions régionales de mon ministère sont aussi là pour accompagner des actions de formation, de médiation, de diffusion des bonnes pratiques, d’éducation artistique et culturelle. Mon ministère peut favoriser les ponts, les mises en relation.

Le rôle de l’Etat, en continu, c’est également de garantir les libertés de création, de programmation et de diffusion qui font la sève de notre vie culturelle.

Et le rôle de mon ministère, c’est aussi de déployer les politiques qui favorisent l’accès de tous aux événements comme celui-ci.

C’est le sens du Pass Culture que nous sommes en train de développer, pour les jeunes de 18 ans.

Votre festival a très vite proposé d’être partenaire : nous allons signer dans quelques instants un accord pour que l’offre des Vieilles Charrues soit disponible sur le Pass Culture. Vous êtes l’un des premiers festivals à signer.

C’est une immense satisfaction pour nous, je veux vous en remercier.

Ce Pass Culture est une aventure inédite pour mon ministère.

C’est une chance immense pour la jeunesse de notre pays.

C’est une chance pour tous les acteurs culturels des territoires, et notamment les festivals comme celui-ci. Merci de l’avoir saisie.

Merci encore pour votre engagement, merci pour le modèle que vous offrez.

Merci à tous.