Monsieur le Délégué général du Syndicat National du Jeu Vidéo, cher Julien Villedieu,

Mesdames et Messieurs,

Chers amis,

 

Je suis très heureuse d’être parmi vous aujourd’hui pour la présentation de cette nouvelle édition du baromètre annuel du jeu vidéo en France.

 

Merci à vous, cher Oskar Guilbert, de nous accueillir entre les murs de DONTNOD Entertainment. J’ai toujours trouvé que le travail des développeurs, des scénaristes, des graphistes et des designers de jeux vidéo était passionnant. L’occasion est rare de le suivre de près et je vous suis très reconnaissante de nous avoir ouvert vos portes. Je dois dire que j’ai été très marquée lors de ma visite par l’esthétique de Vampyr : cette immersion dans la noirceur de Londres à l’orée du XXe siècle, au temps de la grippe espagnole est prodigieuse. Ce jeu vidéo culturel, créatif, esthétique, qui s’appuie souvent sur un long travail documentaire, ou sur des échanges avec des universitaires est précisément celui que je veux promouvoir et auquel je suis très attachée. Je pourrais sans doute en dire autant de Life is Strange, dont le 5e épisode sort demain, et pour lequel je souhaite, bien entendu, tous le succès possible.

 

Pour les entreprises françaises du jeu vidéo, ce succès est justement au rendez-vous. Le baromètre du Syndicat National du Jeu Vidéo en fait état – merci à Julien Villedieu de nous l’avoir présenté : votre étude est chaque année plus précise, et donc chaque année plus précieuse pour tous ceux, et j’en fais partie, qui s’intéressent de près à l’avenir de cette industrie créative.

 

Oui, le succès est bel est bien là pour le jeu vidéo, qui se hisse aujourd’hui au deuxième rang des industries culturelles, juste derrière le livre : le CNC affirmait qu’en 2015, le chiffre d’affaires du secteur devrait atteindre 3,8 Mds€ en France.

Le dynamisme du secteur, et il faut s’en réjouir, crée chaque année de l’emploi. Dans les jeux vidéo, l’emploi est un emploi de qualité : les deux tiers des salariés du secteur sont en CDI. C’est la marque d’une confiance en l’avenir du secteur et de ses potentialités, bien sûr. Mais c’est aussi la preuve que les entreprises peuvent s’appuyer sur des techniciens et des créateurs de haut niveau, dont la compétence est reconnue, et disons-le, que personne ne veut voir partir. Nous avons la chance d’avoir en France des formations de très grande qualité en la matière, comme l’Ecole Nationale du Jeu et des Médias Interactifs Numériques [ENJMIN], adossée au CNAM et qui a fêté ses dix ans l’an dernier, ou encore SUPINFOGAME et l’ISAR, sans compter celles qui sont dispensées à l’Université, comme à Lyon.

 

Le succès du jeu vidéo en France, nous le devons bien sûr à des entreprises dont la renommée internationale n’est plus à faire, et dont les jeux sont célèbres. Mais nous le devons aussi – et surtout – à un tissu solide et diversifié de jeunes entreprises, dont fait partie DONTNOD Entertainment. La majeure partie d’entre elles sont d’ailleurs en Ile-de-France, ce qui fait du Grand Paris l’un des pôles majeurs du jeu vidéo sur le continent.

Ce succès, nous le devons aussi à la priorité que vous avez donnée à la création : les trois quarts des entreprises du secteur sont des développeurs, contre 60% en Europe. 80% des projets en cours sont des projets nouveaux. C’est la preuve qu’en la matière, la France est innovante. Les nouvelles générations de consoles, qui sont elles-mêmes des condensés d’innovation, ont ouvert les possibles. Avec le "multi-écran", le "cloud gaming" ou la réalité virtuelle, les opportunités de création ne manquent pas. Elles soutiennent la croissance du secteur, de même que le développement des jeux sur mobiles.

Ce succès, il est enfin le fruit d’une stratégie, assez largement partagée, et tournée vers l’international : le chiffre d’affaires à l’exportation est en croissance.

 

Le succès du jeu vidéo français est dû également à sa haute qualité : une création artistique innovante, un esthétisme recherché, des graphismes perfectionnés, une narration de plus en plus approfondie, et des jeux de plus en plus enrichis de contenus historiques ou culturels.

 

Tout cela est la marque de votre talent et de votre savoir-faire. C’est aussi la marque d’une stratégie globale qui marche, celle que nous portons à vos côtés, et qui permet aujourd’hui à la France d’être dans le trio de tête des pays les plus attractifs en la matière, juste derrière les Etats-Unis et le Canada. Nous avons mis en place des mesures pour cela.

Je pense bien entendu au crédit d’impôt pour le jeu vidéo, qui permet de déduire 20% des dépenses engagées sur des projets qui contribuent à la diversité et à la création française et européenne. La décision que le gouvernement a prise de l’élargir en 2014 aux jeux pour adultes, classés 18+ par le système PEGI, a permis d’attirer ou de relocaliser, sur notre territoire, des projets narratifs innovants et ambitieux. Son efficacité ne fait aucun doute : ce sont près de 50M€ d’investissements qui ont été relocalisés en France.

 

Grâce à un système de barème encore plus exigeant, ce sont des critères culturels qui seront là-aussi mis en avant. Car le jeu vidéo figure en bonne place parmi nos industries culturelles. Et avec lui, au-delà des métiers hautement qualifiés d’ingénierie informatique et de programmeur, nombre de métiers artistiques lui sont attachés : dessinateurs, designers, graphistes, modeleurs, musiciens, scénaristes…

 

Cette politique de soutien que nous menons, je la crois essentielle pour être à vos côtés face aux défis qui vous attendent. Julien Villedieu les a évoqués. Vous devez d’abord affronter les mutations structurelles induites par la dématérialisation, qui a des conséquences directes sur les attentes des joueurs et sur la commercialisation des jeux. Cela vous contraint à vous adapter en permanence, dans un contexte de plus en plus concurrentiel, où les nouveaux entrants sont créatifs, mais aussi fragiles.

 

Le fonds d’aide au jeu vidéo porté par le CNC et par Bercy peut apporter des éléments de réponses, puisqu’il finance la pré-production, et soutient depuis 2010 la création de propriétés intellectuelles. Il encourage ainsi les entreprises à conserver leurs droits, et à mieux structurer l’activité.

 

Je n’ignore pas non plus le défi que représente pour vous l’accès au financement. Je sais que les studios de production ont du mal à attirer les établissements financiers. Par conséquent, leurs investissements sont le plus souvent autofinancés, ce qui les rend d’autant plus fragiles, car il les prive à la fois d’une visibilité financière à moyen terme et de moyens de promotion et de diffusion des jeux.

 

Face à ce défi, l’Etat est à vos côtés. Il l’est avec le crédit d’impôt ; il l’est aussi via l’Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles. De fait, L’IFCIC a mis en place un fonds de garantie pour le jeu vidéo. Il pilote aussi, en partenariat avec la Caisse des Dépôts, un fonds d’avances remboursables aux entreprises de l’image animée et du numérique. Le sous-fonds jeu vidéo, déjà doté de 5M€, devrait être abondé de 15M€ très prochainement par la CDC. Il pourra prêter jusqu’à 2M€ d’avances participatives aux entreprises du secteur sur un ou deux ans. Il devrait contribuer lui aussi à mieux structurer l’activité, en soutenant en priorité ceux qui portent des projets de développement à l’international. Pour le jeu vidéo, c’est là quelque chose d’indispensable.

 

Voilà en quelques mots ce que je retiens de cette nouvelle édition du baromètre : la France est forte de ses talents et de sa créativité. Elle est forte de tous ceux qui créent, innovent et promeuvent un jeu vidéo de qualité sur son territoire. Le gouvernement continuera d’être à vos côtés, pour les années qui viennent, parce qu’il croit en vous. Il croit en vos capacités à créer de l’emploi et à faire rayonner la France et la culture française.

 

Je vous remercie.