mécène américain, directeur et vice-président de la Annenberg Foundation.
« Un Américain à Paris, grand mécène pour chacun » Mesdames et Messieurs Présidents et Directeurs,Mesdames, Messieurs, chers amis,Cher Gregory ANNENBERG WEINGARTEN,

Vous vous souvenez sans doute de cette scène d’Un Américain à Paris, le film merveilleux de Vincente MINELLI porté par la musique de GERSHWIN : Gene KELLY chante et danse devant un groupe d’enfants français et leur fait reprendre en chœur « I got ». Ce mot des enfants, qui veut dire « J’ai compris », me semble aussi pouvoir signifier « J’ai reçu » et, en effet, KELLY leur fait don, non seulement de sa danse et de son chant, mais de sa présence et de sa joie de vivre communicatives.
J’espère que vous me pardonnerez de penser à cette scène un peu fantaisiste, au moment de commencer une cérémonie beaucoup plus sérieuse et même solennelle, quoique profondément amicale. Mais vous comprenez bien pourquoi elle me vient à l’esprit : d’abord, Un Américain à Paris ; puis un amoureux de la voix – de l’opéra – et de la chorégraphie – du ballet et de la danse dans tous ses états ; enfin, ce geste de don, adressé à des enfants, français en l’occurrence : cela ne signifie nullement, bien sûr, que les Français soient des enfants ou que vous les considériez comme tels ! mais – j’y reviendrai – que les jeunes occupent, dans votre activité de mécène, une place tout à fait cruciale. Bref, c’étaient trop d’analogies, sans doute, pour que le cinéphile invétéré que je suis resté dans mes habits de ministre ne fasse pas, spontanément, ce rapprochement que me suggère la présence parmi nous d’un grand mécène américain et grand ami de la France.
À la tête de la Fondation ANNENBERG, dont vous êtes le Directeur et Vice-Président, vous œuvrez dans de multiples domaines de la Culture, au sens large, et je dirais universel, du terme : aux arts, à l’éducation, au bien-être de ceux qui ont besoin de notre aide et de notre soutien. Comme un célèbre humaniste français, mais dans un tout autre sens, vous pourriez dire, en effet : « Rien de ce qui est humain ne m’est étranger ».
Si vous vous intéressez aux arts sous toutes ses formes, c’est d’abord parce que vous êtes, bien sûr un artiste vous-même, et que vous avez la sensibilité, le talent et la connaissance intime de l’homme de l’art. Après vous être formé à la peinture à la prestigieuse Parsons School of Design de New York et à l’Ecole nationale supérieure des Beaux-Arts, ici à Paris, vous avez exposé avec grand succès dans ces deux pays que, déjà, vous avez mis en correspondance en cultivant leurs profondes affinités électives. C’est ainsi que vous avez soutenu, comme Mécène, des expositions mémorables au Centre Pompidou, consacrées en particulier à des artistes de Los Angeles ou, tout récemment, aux « Années parisiennes de CALDER ». Je ne saurais bien sûr faire la « liste vertigineuse » – comme dirait Umberto ECO en ce moment au Louvre – de tous les soutiens que vous apportez à nos musées : je mentionnerai, outre celui à l’association des Amis américains de ce même Musée du Louvre, votre contribution décisive à la création de FRAME, qui est, bien plus qu’un « cadre », un grand réseau de musées et un puissant levier d’échanges franco-américains, ainsi que votre aide – ô combien symbolique – à la restauration de la statue « L’Amérique » à Versailles, une aide qui vient s’ajouter et faire écho à la restauration de la Statue de la Liberté, à Ellis Island, à laquelle vous avez également apporté un concours déterminant.
Dans les mondes croisés de la culture franco-américaine, vous avez aussi une prédilection pour les arts de la scène et en particulier, je le disais en commençant, pour l’opéra et pour la danse. Au sein de l’association des American Friends of the Paris Opera & Ballet qui fait partie de votre Fondation, et en relation avec l’AROP et le réseau FEDORA, vous organisez, plus qu’un simple soutien, de véritables échanges et un authentique dialogue – je dirai presque un duo ou un pas de deux : ce sont des artistes américains qui viennent à Paris, des tournées de l’Opéra et du Ballet de Paris aux Etats-Unis, ou encore des coproductions, dans lesquels Américains et Français travaillent véritablement « de concert ». Je pense en particulier à l’admirable Tristan et Isolde magnifié par les vidéos de Bill VIOLA et la mise en scène de Peter SELLARS, donné il y a peu à l’Opéra de Paris puis aux Etats-Unis, qui est un très beau présent, un très beau cadeau.
Grâce à vous et à votre Fondation, ces échanges prolongent un dialogue très ancien entre artistes américains et artistes français, dont la relation entre George GERSHWIN et Maurice RAVEL est, vous le savez, tout à fait emblématique.
Vous savez, comme Gene KELLY, faire danser Paris : non seulement au Ballet de l’Opéra de Paris, mais à l’Académie américaine de danse de Paris et aux Etés de la danse de Paris. C’est, maintenant, un autre film qui me vient aussi à l’esprit : je pense bien sûr à Everybody Says I Love You, de Woody ALLEN, cette chorégraphie franco-américaine à la fois réjouissante et si fortement symbolique !
Mais je le disais, votre action ne se limite pas aux arts, à l’art pour l’art. Grand humaniste, vous portez une attention particulière à l’éducation, que ce soit, notamment, au Centre d’art et de sciences à l’Ecole active bilingue Jeanine MANUEL, à Librairie américaine de Paris, au Mémorial de la Shoah bien sûr – ou encore dans le domaine humanitaire : je pense à votre action dans le domaine si important de l’accès à l’eau en Afrique, en relation avec CARE ; mais aussi en faveur enfants péruviens, avec Médecins du monde – des associations indispensables dont je salue les présidents, aujourd’hui présents.
Je ne peux, je l’ai dit, que donner une idée d’ensemble de vos activités, que vous menez avec la complicité de votre épouse, Mme Regina ANNENBERG WEINGARTEN, dont je salue aussi chaleureusement la présence parmi nous, à vos côtés. Mais je voudrais souligner l’attention particulière que vous portez aux enfants, à leur éducation et à leur développement, à ces enfants qui chantent en chœur « I got » dans Un Américain à Paris. Je veux parler du site internet international que vous avez contribué à créer, pour eux, au Centre Pompidou, de l’espace éducatif pour les jeunes que vous avez mis en place au Musée des Arts décoratifs, mais aussi bien sûr, du projet éducatif en faveur des jeunes défavorisés, que vous venez de mener au Musée du Louvre, en collaboration avec le ministère de la Culture et celui de l’Éducation nationale. Je n’oublie pas bien entendu votre collaboration avec l’association L’Envol pour les enfants européens, dont le nom lui-même évoque l’ambitieux programme d’action.
Ce mécénat en direction des jeunes et en particulier de ceux qui sont, au départ, les plus éloignés de la culture, entre, vous le savez, en parfaite consonance avec ma conception de la Culture que j’aime à appeler la « culture sociale » ou la « culture pour chacun », c’est-à-dire une culture ancrée dans la réalité sociale de notre pays, sans aucune exclusive et, par conséquent, capable de prendre en compte toute la diversité de la société et des individus qui la composent, et sache s’ouvrir à tous les horizons dont ils sont porteurs.
En somme, vous parvenez à créer un pont de générosité entre les cultures, entre les générations, entre nos deux pays, et plus généralement entre les hommes.
Un proverbe, chinois je crois, dit : « La difficulté, dans ce monde, n’est pas d’amasser beaucoup d’argent, mais de savoir comment bien le dépenser ». Je crois, cher Gregory ANNENBERG WEINGARTEN, que vous savez à merveille résoudre ce « casse-tête chinois », et nous vous en sommes extrêmement reconnaissants.
Grâce à votre générosité sans égale, grâce à votre goût incomparable, nous voilà riches d’un soutien des plus précieux. Vous nous offrez bien plus que de l’argent : la joie de partager une haute idée de la culture et de son rôle dans la société. Au nom de chacun des Français, je tiens à vous exprimer ici ma gratitude pour ce geste d’amitié que vous témoignez à votre pays d’adoption. Vous êtes un Grand Mécène, non seulement pour l’art et les artistes, mais pour chacun de ceux qui ont besoin de votre soutien. Vous n’êtes jamais, si j’ose cette comparaison un peu audacieuse, comme la fourmi de la Fable de La Fontaine, et si vous dites comme elle : « Vous chantiez, j’en suis fort aise, Eh bien dansez maintenant », c’est en donnant – aux talents qui en valent la peine – les moyens de chanter et de danser, à Paris, à New York et ailleurs : le tout, bien sûr, sur la musique d’Un américain à Paris…
En signe de reconnaissance, cher Gregory ANNENBERG WEINGARTEN, j’ai le grand honneur de vous remettre la médaille de Grand Mécène et de Grand Donateur de la Culture.