Dans nos villes, dans tous nos territoires, il existe des initiatives
remarquables, très souvent d’origine associative, qui servent l’une des
principales ambitions portées par le ministère de la Culture et de la
Communication depuis sa création : la démocratisation culturelle. Ces
actions n’ont pas toujours la visibilité qu’elles méritent. C’est pourquoi j’ai
tenu à relancer ces outils importants que sont les conventions territoriales
de développement culturel entre l’Etat et les collectivités territoriales, qui
donnent corps à l’engagement des pouvoirs publics dans ce domaine. Ce
sont ainsi plus de soixante conventions qui sont en cours de finalisation, et
qui seront signées d’ici à la fin de l’année, sur l’ensemble de nos territoires.
Quarante d’entre elles concernent le milieu rural : j’ai eu le plaisir de signer
la première avec la Communauté de Sancy-Artense, en Auvergne. Celles
qui concernent les territoires urbains, pour leur part, doivent pouvoir
s’appuyer sur des manifestations d’envergure, afin d’en assurer les gains
en termes de mobilisation et de visibilité : c’est précisément le cas à
Bordeaux avec Evento.
Permettez-moi de rappeler l’esprit de ces conventions : elles visent à
mettre en lumière le fait que les services et les établissements culturels de
l’Etat et des collectivités ont tout intérêt à coordonner leurs démarches
avec le tissu associatif dans la réalisation de leurs objectifs en matière de
culture partagée. Nos politiques en faveur de la démocratisation culturelle,
profondément inscrites dans l’histoire de mon ministère, doivent être
actualisées : c’est tout le sens de la consultation nationale que j’ai
effectuée durant l’année qui s’est écoulée. La création contemporaine,
notamment, nous offre, dans les domaines des arts plastiques et du
spectacle vivant, des moyens inédits pour repenser notamment ce qu’on
appelle la médiation. À Bordeaux, Evento nous offre à ce sujet un cadre
d’expérimentation formidable.
Cette convention cadre en faveur de la démocratisation culturelle, que
nous signons aujourd’hui, a donc pour objectif cette mise en cohérence du
développement des projets culturels à destination des publics peu familiers
ou éloignés des pratiques culturelles.
Je suis particulièrement heureux de pouvoir signer aujourd’hui cet
engagement commun avec le ministre d’Etat Alain Juppé, Bordeaux
ouvrant ainsi la voie pour d’autres engagements qui seront pris sous peu
dans la région Aquitaine avec Villeneuve-sur-Lot dans le Lot-et-Garonne et
le Piémont Oloronais dans les Pyrénées-Atlantiques.
Agir en faveur de la cohérence et de la visibilité des actions de
démocratisation culturelle à Bordeaux, c’est : Garantir en ce sens la
mobilisation des grandes institutions culturelles bordelaises : l’Opéra
national, le Théâtre national de Bordeaux Aquitaine, la médiathèque, les
musées, les archives ; C’est encourager les démarches artistiques dans le
cadre de l’opération de restructuration urbaine « Euratlantique », opération
d’intérêt national, qui profite du dispositif du 1% artistique et social ; C’est
soutenir les expérimentateurs, qui nous offrent de nouvelles perspectives
dans un domaine où les formes d’expressions artistique et les modes de
médiation sont en constante évolution ; C’est se donner les moyens
d’identifier un quartier qui servira de point focal pour ces expérimentations,
le quartier de Bordeaux Maritime en étant un bel exemple.
La convention que nous signons marque également le soutien renouvelé
de l’Etat à Evento pour sa deuxième édition, placée cette année sous la
houlette de Michelangelo Pistoletto. À Bordeaux, Evento représente en
effet la plateforme idéale pour l’expérimentation des projets au service de
la culture partagée : avec notamment la participation des écoles primaires
et les collèges de la ville dans « ville mobile » ; avec le « chantier des
savoirs partagés », qui nous invite, au coeur du quartier Saint-Michel, à
repenser l’espace urbain ; avec le « chantier mobile », cette installation
nomade qui couvrira l’ensemble de l’agglomération.
À cela s’ajoute le soutien au festival « Chahuts », porté par l’association
des arts de la parole dans le quartier Saint-Michel, qui représente une
formidable occasion, dans un quartier marqué par l’histoire des différentes
vagues d’immigration, d’inciter les citoyens à exprimer leur sens critique et
à explorer de nouvelles voies de réappropriation du territoire urbain, avec
l’appui de l’Office national de diffusion artistique et Hors les murs, le centre
national de ressources des arts de la rue et des arts du cirque.
Les médiathèques, enfin, ne peuvent qu’être évidemment au coeur de cette
mobilisation pour la démocratisation culturelle. Sont ainsi envisagés une
bibliothèque éphémère sur un bateau dans le quartier de Bordeaux
Maritime, la modernisation du service Diderot destiné aux non et
malvoyants, qui pourra essaimer sur tout le réseau municipal de la lecture
publique, et une redynamisation du portage à domicile. Aller au devant des
publics que l’on désigne pudiquement comme « éloignés », c’est en effet
encourager de nouvelles formes de socialisation, c’est agir aussi pour que
l’accès à l’offre culturelle soit moins dépendant des effets d’intimidation
sociale, afin de reconquérir un lectorat. Ces actions de médiation qui seront
co-financées par l’Etat peuvent s’appuyer sur le très fort engagement de la
Ville de Bordeaux pour la lecture publique, notamment en matière
d’équipement et de rénovation, engagement que je tiens tout
particulièrement à saluer ce soir.
La démocratisation culturelle n’est une ambition pertinente que si nous
nous donnons les moyens de répondre aux nouvelles réalités de la société
française du début du XXIe siècle. Je pense à l’individualisation des
pratiques culturelles, à la persistance des fractures sociales et
générationnelles, et des inégalités d’accès à l’offre culturelle, dans les
quartiers sensibles, dans le monde rural. Combattre l’indifférence face à la
culture, renforcer l’équilibre culturel de nos territoires, encourager les
pratiques amateurs, favoriser en ville l’inclusion des quartiers et des zones
périurbaines : autant d’objectifs que nous partageons entre mon ministère,
les collectivités et les réseaux d’association. C’est tout le sens de cette
convention que de les articuler au sein d’un projet commun, et je suis très
heureux que la Ville de Bordeaux et Alain Juppé partagent pleinement
cette ambition.