Avec Jorge Semprún, nous perdons tout à la fois un écrivain majeur mais aussi un grand témoin de notre temps, de ses combats et de ses drames.
Exilé, résistant, déporté, cet homme qui a mis bien souvent sa vie en jeu, cet écrivain qui a su prendre les risques de ses engagements, aura connu aussi la joie d’être reconnu par ses contemporains – tant en Espagne, où il fut un ministre de la Culture passionné par sa tâche, qu’en France, où l’auteur majeur qu’il était devenu avait choisi la langue française comme seconde patrie.
Le brillant romancier élu à l’Académie Goncourt a également été un remarquable scénariste, celui de quelques-uns des plus beaux films d’Alain Resnais ou de Costa-Gavras, de « La Guerre est finie », de « Stavisky », de « Z », de « l’Aveu ». Pour le cinéma, comme dans ses romans, Jorge Semprún savait magnifiquement transposer ce qui faisait le cœur même de ses préoccupations et de son inspiration : la liberté, la dignité et l’honneur de la condition humaine. Jorge Semprún, pour qui « l’indicible, c’est ce qu’on ne peut pas taire », restera pour nous tous l’une des plus belles figures du penseur engagé au service de l’idéal européen.