Alors que le numérique a bouleversé en profondeur les modes de production de l’information, les Archives nationales font le point, à l’occasion d’une séquence consacrée à ces enjeux, les 7, 8 et 9 décembre, à Paris, sur leur stratégie de transformation numérique.

Simplifier l’accès aux décrets de naturalisation, optimiser l’utilisation de l’ensemble de ses inventaires ou déchiffrer les discours politiques ? Tels sont quelques-uns des défis pratiques pour lesquels les Archives nationales vont solliciter, samedi 8 et dimanche 9 décembre, la communauté des développeurs et des programmeurs à l’occasion d’un hackathon, labellisé par la Semaine de l’innovation publique, portant sur un sujet d’intérêt général : la Cité et le citoyen.

Autre temps-fort de cette séquence : le lancement, vendredi 7 décembre, sur le site parisien des Archives nationales, de la première phase de la plateforme ADAMANT (Administration Des Archives et de leurs Métadonnées aux Archives nationales dans le Temps). Cet outil permettra de répondre aux enjeux de l’ensemble du processus archivistique. Les explications de Françoise Banat-Berger, directrice des Archives nationales et maître d’œuvre de cette séquence.

A travers le lancement de leur nouvelle plateforme d’archivage et l’organisation d’un hackathon, les Archives nationales mettent l’accent, dans une séquence qui va se tenir les 7, 8 et 9 décembre, sur leur stratégie de transformation numérique. Où en est-on de cette démarche de longue haleine ?

Cette stratégie a commencé à l’occasion de l’installation des Archives nationales sur le site de Pierrefitte-sur-Seine, avec la refonte de notre nouveau système d’information, en lien étroit avec la sous-direction des systèmes d’information du ministère de la Culture, et l’ouverture de la salle des inventaires virtuelle (SIV). L'ouverture de cette salle permet à tout internaute de consulter les quelque 26 000 inventaires rétro-convertis ou produits nativement sous forme numérique, décrivant nos archives - et, s’il le souhaite, de commander les documents à distance pour venir les consulter dans nos salles de lecture. La SIV donne également accès à nos 15 000 notices décrivant les organismes ou les personnes qui nous versent les archives. Plus de 8 millions de documents nativement papier, qui ont fait l’objet d’une opération de numérisation, sont également consultables en ligne.

Notre objectif prioritaire est de mieux faire connaître la magnifique offre numérique issue des fonds des Archives nationales

L’objectif a alors été de mieux faire connaître cette magnifique offre numérique, en s’ouvrant à d’autres portails (notamment le portail France-Archive) ; en développant des partenariats avec Wikimédia France (pour établir des alignements entre nos notices et celles de Wikipédia, ou encore verser sur Wikimédia Commons de très beaux documents iconiques des Archives nationales). La démarche s’est poursuivie par la publication, sur la plateforme d’open data du ministère, d’un certain nombre de ces ressources et par l’inscription forte des Archives nationales dans la feuille de route sémantique du ministère, notamment pour favoriser l’alignement de nos données et métadonnées vers des ressources externes. Enfin nous avons pris la décision, en juillet 2017, d’autoriser la réutilisation libre et gratuite de l’ensemble de nos ressources libres de droits.

Parallèlement nous participons très activement au grand programme interministériel VITAM avec le développement par l’État d’une solution logicielle libre d’archivage électronique, que nous avons intégrée dans notre système d’information, dans le cadre du projet ADAMANT. Cette solution permet de prendre en charge, conserver et donner l’accès à des archives nativement numériques.

Le lancement de la première phase d’ADAMANT renvoie à l’organisation structurelle de la politique d’archivage numérique des Archives nationales tandis que le hackathon placerait davantage le curseur du côté de la question des usages. En quoi ces deux dimensions sont-elles complémentaires ?

C’est le 29 novembre prochain, soit la journée internationale de la préservation numérique, que nous mettons en service la première version de notre plateforme d’archivage électronique. Cette version se concentre sur le transfert et la prise en charge des archives nativement numériques (fichiers bureautiques, messageries). Les versions 2 et 3 ont pour objectif d’élargir la typologie des archives entrant dans la plateforme et surtout d’ouvrir les fonctionnalités de consultation et d’accès sur intranet puis sur internet et enfin de réutilisation. Cette extension de notre système d’information pose la question de la convergence des accès aux archives papier et aux archives numériques, et plus largement,  des nouveaux usages, besoins et donc outils à développer pour ce faire, en termes d’affichage de l’information, d’interfaces aisées de navigation et de recherche, et aussi d’ouverture vers des bases de données externes à notre écosystème numérique. Nous avions commencé à aborder ces réflexions avec des usagers lors d’une journée de barcamp organisée en décembre dernier ; un an plus tard, le hackathon vient interroger les sujets de la qualité de données et de leur représentation, et propose des défis pour concevoir des outils plus adaptés aux nouveaux besoins.

Lors du hackathon, les Archives nationales invitent la communauté des développeurs à imaginer des solutions concrètes sur des sujets aussi différents – et passionnants – que la simplification de l’accès aux décrets de naturalisation, l’interopérabilité des référentiels des Archives nationales, l’optimisation de l’utilisation de l’ensemble des inventaires des Archives nationales ou le déchiffrage des discours politiques. En quoi ces défis participent-ils d’une réappropriation des archives par les citoyens ?

Cette réappropriation repose sur plusieurs enjeux : disposer de données d’une qualité supérieure et pouvoir s’aligner sur d’autres bases de données externes, ceci afin de pouvoir apporter des réponses beaucoup plus riches aux requêtes ; enrichir les réponses en intégrant de la reconnaissance automatique de caractères manuscrits ou imprimés, d’images, de structures ; imaginer d’autres formes de navigations (frise chronologique, cartographie etc.) prenant en compte bien davantage l’expérience utilisateur ; disposer d’outils de visualisation permettant d’évaluer qualitativement et quantitativement la ressource ou encore d’outils permettant des analyses lexicométriques, sémantiques des contenus ; permettre aisément à l’internaute d’enrichir les métadonnées par des annotations ; développer des usages ludiques, touristiques à partir de nos ressources ; développer des parcours de recherche intuitifs et simples pour par exemple retrouver un dossier de naturalisation ou un acte notarié.

Tout ceci suppose une appropriation bien plus importante de nos archives par les citoyens, le dispositif même du hackathon visant à demander à des usagers (chercheurs, archivistes, bibliothécaires, développeurs, data scientists, ergonomes, graphistes, designers, communautés des humanités numériques, généalogistes, entreprises de services du numérique..) qui, pour certains, ne connaissaient pas jusque-là les archives, de répondre à nos défis et donc de construire des objets, des prototypes, correspondants précisément à leurs besoins.

Archives nationales : les 8 défis du hackaton > défi n°1 : Le citoyen à l’honneur : optimiser la base de la Légion d’honneur et faciliter son accès aux citoyens / défi n°2 : Actes du citoyen, citoyen en actes : analyser et visualiser les archives des notaires de Paris (XVIIe – XXe siècles) / défi n°3 : Le politique parle au citoyen : déchiffrer et analyser les discours politiques / défi n°4 : RTFM ! Read The French Mountain : comprendre l’évolution du paysage de montagne à travers la photographie / défi n°5 : Ils sont devenus citoyens français : simplifier l’accès aux décrets de naturalisation / défi n°6 : Les clés d’accès à quatorze siècles d’histoire : optimiser l’utilisation de l’ensemble des inventaires des Archives nationales / défi n°7 : Les archives dans le web de données : améliorer l’utilisation des référentiels des Archives nationales, favoriser leur interopérabilité / défi n°8 :  Observatoire des entrées d’archives : optimiser le suivi et la visualisation du registre des entrées annuelles

Samedi 8 et dimanche 9 novembre, rendez-vous au Liberty Living Lab pour un hackathon sur le thème de la citoyenneté. L’équipe gagnante se verra remettre un prix de 4 000 euros dotés par les Archives nationales et bénéficiera d’une résidence de six mois offerte par le Liberty Living Lab.

ADAMANT, la plateforme d'archivage numérique des Archives nationales

Vendredi 7 décembre, marquera l'ouverture de la plateforme ADAMANT (Administration Des Archives et de leurs Métadonnées aux Archives nationales dans le Temps). Premier projet à voir le jour dans le cadre de VITAM, un programme interministériel destiné à la diffusion des données numériques de l’État, cet outil, conçu par les Archives nationales et la sous-direction des systèmes d'information du ministère de la Culture, permettra de mieux assurer la continuité du service public en garantissant la conservation sécurisée dans le temps des données numériques versées par l’État et ses opérateurs ainsi que leur accès.

Les Archives nationales conservent actuellement un patrimoine de plus de 200 millions de fichiers numériques, qui vient enrichir le trésor national que constituent les 350 kilomètres d'archives papier. ADAMANT donne une nouvelle ambition aux Archives nationales : celle de favoriser la diffusion des contenus archivés, dans une logique de données ouvertes.