Jusqu’au 30 avril, 100% L’EXPO met en lumière les talents récemment issus de l’enseignement supérieur culture. Une présentation disruptive et décapante.

Puiser parmi les talents fraîchement issus des écoles de l’enseignement supérieur culture pour présenter un regard inédit sur la création de demain, tel est le pari de 100% L’EXPO, une initiative originale lancée il y a quatre ans par le Parc et la Grande Halle de la Villette, à Paris.

Un pari brillament tenu, si l’on en juge par le succès des précédentes éditions.

Cette année, 100% L’EXPO, va plus loin. Plus d’écoles – et de structures – participantes (neuf participent à cette édition, les Beaux-Arts de Paris, les Arts Déco, le Fresnoy, Arles, les Ateliers, la Fémis et, pour la première fois, la Villa Arson, Kourtrajmé, le CNDC d’Angers, ainsi que la Fondation Culture & Diversité). Plus de diversité des pièces présentées (photographie, stylisme, design, peinture, installation, vidéo, performance…). Plus de publics concernés (le grand public, bien sûr, mais aussi les professionnels, galeristes et collectionneurs, particulièrement attentifs à ce vivier de créateurs). Au total, une vitrine grandeur nature de la création d’aujourd’hui.

Inès Geoffroy, cheffe de projet pour les expositions à la Villette, nous en dit plus.

Inès_détail.PNG

Inès Geoffroy, 100% L’EXPO réunit une soixantaine d’œuvres très diverses. Un vrai défi pour assurer une présentation homogène…

Une des caractéristiques principales de cette exposition est le fait qu’elle soit collective. Nous n’avons donc fixé aucune thématique préalable, mais les œuvres retenues entrent en dialogue d’elles-mêmes. Sans doute doit-on cette capacité de dialogue entre les œuvres au travail de l’équipe scénographie de La Villette qui assure un ajustement très précis avec les artistes. Mais on le doit surtout à la qualité des pièces elles-mêmes qui invitent le public à déambuler et à s’attarder ici ou là, dans un espace foisonnant.

Sans titre (lo-fi), 2021. Vue d’exposition Plaisir Solide, en duo avec Charlotte Perrin, 3 bis f, Centre d’Art d’Aix-en-Provence - 6 ©HBELLENGER.jpg

Quand on pénètre dans la grande Halle, on va trouver un premier espace très libre et dégagé avec de grandes installations qui, par exemple, peuvent interroger l’exotisme aujourd’hui. Puis on trouve un espace plus construit, plus labyrinthique, où les artistes traitent plutôt de questions d’intériorité, d’intimité, et aussi… de confinement.

Ainsi, malgré la grande diversité des techniques et des médiums, les thèmes peuvent se rejoindre : le genre, le féminisme, le multiculturalisme. L’éco-anxiété aussi, comme, par exemple, chez les jeunes designers qui expérimentent des objets simples dans l’esprit d’une économie circulaire… Et puis, bien sûr, les artistes n’ont pas à assumer nécessairement un art engagé : beaucoup se recentrent sur des recherches simplement esthétiques !

Magalie MOBETIE Anba tè adan kò © Magalie Mobetie production Le Fresnoy – Studio national des arts contemporains.jpg

L’entrée de 100% L’EXPO est gratuite. D’abord conçu pour le grand public, l’événement attire les professionnels, un très large éventail où chacun trouve son compte ?

L’exposition commence dès le Parc, avec les œuvres originales de trois autres artistes invités, et invite ainsi jusqu'aux visiteurs occasionnels à entrer sous la Halle. Quant aux professionnels, ils nous ont intégré dans leurs circuits. Plusieurs artistes, par exemple Marilou Poncin, ont trouvé leur galerie grâce à l’exposition. Quelques photographes ont fait la couverture de Fisheye magazine, et Jean Claracq, fait exceptionnel pour un artiste de cet âge, a eu les honneurs de la fondation Vuitton. Cette année, le collectif « diamètre/a » va amplifier le phénomène, nous l'espérons, en programmant des rencontres artistes/professionnels, ces derniers venant de tout le territoire.

th membrane et paysage - valerie-boubert ┬® jbguey (6)-Kokou Ferdinand Makouvia.jpg

Par ailleurs, à 100% L'EXPO, les artistes se rencontrent entre eux ! Cette émulation est féconde, elle les conduit parfois à créer en duo, ou à former des collectifs de création.

100% L’EXPO est maintenant sur sa lancée. Comment la voyez-vous évoluer dans un proche avenir ?

Pour le moment, nous souhaitons rester sur la scène française (une scène française déjà bien internationale, car le rayonnement de nos écoles supérieures culture fait venir de nombreux élèves étrangers), pour solliciter plus d’écoles en régions, et expérimenter encore nos diverses collaborations avec les artistes et leurs écoles d’origine.

100% L’EXPO restera toujours dédiée à la jeune création, mais va sans doute se tourner un peu plus vers des collectifs d’artistes, un peu plus vers les régions, un peu plus vers la performance. Nous aimons bien notre côté un peu empirique, qui évolue d’années en années en fonction des propositions. L’essentiel sera de demeurer cette vitrine de l’art contemporain et de ses jeunes créateurs.

De jeunes artistes issus de  l'enseignement supérieur culture

Plus d'une soixantaine d'artistes sont présents cette année à la grande Halle de la Villette, issus de neuf écoles supérieures culture. Regard sur quatre d'entre eux, emblématiques des thématiques les plus saillantes : la recherche poétique, les questions du genre, de l'identité, des technologies intrusives, du multiculturalisme et des décolonisations...

 

Siouzie Albiach, On the Edge, Sakura, Japon, 2019.jpg

Siouzie Albiach (ENS de la photographie d'Arles, 2020) présente une série photographique initiée en 2018 au Japon. Ambiances ambiguës, paysages évidés, "On the Edge" est un regard sur un territoire en même temps qu'une lecture sensible et personnelle d'un pays.

 

Alessandro de Marinis, GIANGO ET PONCHO, Mama, photographie, 2020-21.jpg

Alessandro de Marinis (Arts décoratifs, 2021) mêle à son travail son éducation religieuse du sud de l'Italie, son homosexualité, sa gémellité, sa relation à sa mère. L'artiste crée un univers personnel animé de figures complexes, de violence sociale et d'une inébranlable affection pour son frère jumeau.

 

Céleste ROGOSIN Clear Jail Minotaur © Céleste Rogosin production Le Fresnoy – Studio national des arts contemporains-2.jpg

Céleste Rogosin (Le Fresnoy, 2021) relie le Minotaure à l'enfermement et au système carcéral. Avec l'aide des nouvelles technologies, l’œuvre interroge le spectateur au carrefour de l'identité, de la technologie et du pouvoir, esquissant les formes de résistances plastiques et sonores qu'appelle une époque de surveillance généralisée : "Clear Jail Minotaur"

 

Black Witches are braves warriors against Carl, the devilish boy, 2020-Dimitri Milbrun - 2.jpg

L'univers plastique de Dimitri Milbrun (Beaux Arts de Paris, 2019) oscille entre le fantastique et un diagnostic des stigmates de la violence coloniale au cœur de la culture noire. Collages, détournements, superpositions, frénésie de la répétition, autant de pratiques esthétiques enracinées dans son éducation chrétienne, ses traumatismes personnels, la bande-dessinée, l'imagerie punk, l'animation et ses origines caribéennes.