Un régime de responsabilité en cascade
La loi a posé comme corollaire obligé de la liberté de communication, le principe d’une présomption de responsabilité pénale du directeur de la publication, liée à l’exercice de la responsabilité éditoriale.
La loi a ainsi souhaité protéger l’individu en lui offrant un interlocuteur unique et identifiable, puisque le nom du directeur de la publication doit être mentionné sur chaque revue. Le directeur de la publication, présumé responsable, est censé avoir eu connaissance des écrits et en avoir approuvé la publication. La poursuite des autres participants à l’infraction de presse est exercée selon le droit commun de la complicité (article 121-7 du code pénal).
Cette responsabilité ne joue que pour les infractions définies dans la loi de 1881 ainsi que pour les infractions prévues par le code pénal pour lesquelles il a été prévu un renvoi à cette responsabilité spécifique. Il existe 20 renvois de cette nature.
Doit en particulier être cité l’article 227-28 du code pénal étendant l’application de la responsabilité éditoriale aux infractions des articles 227-18 à 227-23 :
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- provocation de mineurs à l’usage de stupéfiants ;
- provocation de mineurs à la consommation habituelle et excessive de boissons alcooliques ;
- provocation de mineurs à la mendicité ;
- fixation, enregistrement ou transmission de l’image d’un mineur présentant un caractère pornographique.
Dans toutes les autres hypothèses, le régime de responsabilité pénale de droit commun prévaut.
Aucune dérogation n’est établie aux principes du droit civil qui rendent chacun responsable du préjudice causé par sa faute ou son imprudence.
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Un régime procédural spécifique
L’exercice de l’action publique et la procédure devant la juridiction de jugement sont régis par des règles très spécifiques et contraignantes limitant les poursuites.
Mise en mouvement de l’action publique
- Règles de prescription : L’article 65 prévoit que l’action publique et l’action civile résultant des infractions prévues par la loi se prescrivent par trois mois révolus à compter du jour où ils auront été commis, ou du jour du dernier acte d’instruction ou de poursuite s’il en a été fait (délit instantané et non continu). Cette courte prescription a été établie dans l’intérêt de la presse, articles de journaux et émissions de radio et de télévision ayant un caractère éphémère, les poursuites ne doivent pas avoir lieu quand l’effet nocif de l’article a depuis longtemps disparu.
En outre, l’article 65-2 prévoit que le délai de prescription de trois mois des actions publiques et civiles fondées sur une infraction prévue par la loi du 29 juillet 1881 est rouverte au profit d’une personne mise en cause sur des faits pouvant être qualifiés pénalement, à compter d’une décision pénale définitive intervenue sur ces faits et la mettant hors de cause.
- Action du ministère public
Conformément au principe de droit commun, la poursuite des délits et contraventions par la voie de la presse relève de l’action du ministère public. Six exceptions ont toutefois été prévues par l’article 48 de la loi où une plainte préalable conditionne l’exercice de l’action publique par le parquet :
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- injure ou diffamation envers les cours, tribunaux
- injure ou diffamation entre un ou plusieurs membres de l’une ou l’autre chambre
- injure ou diffamation envers un juré ou témoin
- offense aux chefs d’Etat étrangers
- diffamation ou injure envers les particuliers
Poursuites
En vertu de l’article 50 de la loi, le réquisitoire introductif d’instance doit obligatoirement reproduire les faits délictueux et indiquer les textes applicables. Cette disposition qui a pour but d’éviter des poursuites non motivées, est exorbitante du droit commun.
La plainte avec constitution de partie civile doit répondre aux mêmes exigences en articulant et qualifiant les faits poursuivis, fournissant toutes indications de temps et de lieu, toutes précisions sur la nature des passages ou propos incriminés et sur leur définition pénale.
D’une manière générale, le ministère public peut agir, soit par voie d’information préalable, soit par voie de citation directe. Quant à la partie lésée, elle ne peut recourir à cette dernière procédure que dans les cas limitativement énumérés à l’article 48 de la loi (injures, diffamation).
La citation directe peut émaner du Procureur de la république ou de la personne lésée. Le délai de citation est de 20 jours, réduit à 24 h en cas de diffamation ou d’injure contre un candidat pendant la période électorale.
L’article 53 prévoit en outre que la citation doit préciser le fait incriminé, le qualifier et indiquer le texte de loi applicable à la poursuite. Les formalités ainsi prescrites protègent les droits de la défense et la liberté d’expression.
En matière correctionnelle, sont exclues la convocation par procès-verbal et la comparution immédiate.
Les inculpés qui ont une résidence en France ne peuvent être placés en détention provisoire (article 52).
A quelque stade de la procédure qu’il intervienne, le désistement du plaignant ou de la partie poursuivante arrêtera l’action engagée (article 49).
Preuve
La vérité des faits diffamatoires ne peut pas être prouvée (article 35) :
- lorsque l’imputation concerne la vie privée de la personne
- lorsque l’imputation se réfère à des faits qui remontent à plus de 10 ans
- lorsque l’imputation se réfère à un fait constituant une infraction amnistiée ou prescrite ou qui a donné lieu à une condamnation effacée par la réhabilitation ou la révision.
Saisies
Pour toutes les infractions de presse résultant de la loi de 1881, la saisie des exemplaires d’une publication, limitée à quatre exemplaires, ne peut être ordonnée que par le juge d’instruction que s’il y a eu omission de dépôt judiciaire en vue de fournir la preuve matérielle de l’infraction.
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