La restauration de la rose de la cathédrale de Soissons consécutive aux dégâts de la tempête Egon du 12 janvier 2017 a débutée en janvier 2020 et s’achèvera à la fin de cette année.
Une étape cruciale de l’opération est arrivée, avec l’achèvement de la taille et de la sculpture des pierres, en grande partie réalisées dans la loge de taille aménagée dans l’ancien cloître.
Avant de procéder au remontage progressif des pierres du réseau neuf sur la façade occidentale, l’Agence Olivier Weets maître d’œuvre et la Direction régionale des affaires culturelles (DRAC) Hauts-de-France, maître d’ouvrage avec l’accord et la participation de la paroisse et le partenariat culturel de la Ville de Soissons, ont souhaité marquer cet évènement par la présentation de la nouvelle rose au grand public. Les vitraux récemment restaurés de l’œil central représentant le Christ en Gloire ainsi que les nouveaux remplages sont exceptionnellement montés « à blanc » et exposés dans la nef de la cathédrale pendant une courte période (mai-juin 2021).
Cette importante action culturelle permet de valoriser le travail des différents intervenants impliqués sur ce chantier. Le travail des artisans, tailleurs de pierre, maçons, sculpteurs, vitraillistes et restaurateurs de vitraux, ferronniers d’art, détenteurs des techniques anciennes mais aussi ouverts aux apports de la modernité, incarne le dialogue entre le passé et le présent. Le partage de ce savoir-faire avec les visiteurs est l’occasion de créer de nouvelles opportunités, d’ouvrir de nouvelles perspectives en nouant aussi, des liens avec le futur.
La cathédrale de Soissons et la tempête Egon
Achevée aux alentours de 1240, la rose de la façade occidentale de la Cathédrale Saint-Gervais-Saint-Protais de Soissons s’inscrit dans l’historique de ce fécond mouvement architectural.
Elle a été partiellement détruite par la tempête Egon du 12 janvier 2017 et fait aujourd’hui l’objet d’une ambitieuse opération de reconstruction sous la maîtrise d’œuvre d’Olivier Weets, architecte en chef des Monuments historiques et sous la maîtrise d’ouvrage de la Conservation régionale des monuments historiques (CRMH) de la DRAC Hauts-de-France.
Les études de diagnostic
Une étude de diagnostic préalable a été diligentée et financée par la CRMH. Dirigée par l’agence Olivier Weets, l’équipe était composée d’architectes, ingénieurs, historiens, restaurateurs de vitrail et économistes de la construction.
Grâce au remontage à blanc des remplages dans la nef de la Cathédrale au démarrage des études, il a été possible de confirmer l’existence de diverses natures de matériaux hétérogènes pour chaque composante de la structure : différentes pierres mise en œuvre (Laversine, Crouy, Saint-Pierre-Aigle), différents métaux et sections pour les goujons (fer, laiton, cuivre – carrés ou ronds) ainsi que différentes natures de joints (mortier au sable-chaux, hydraulique type ciment Portland, plomb), confirmant ainsi que les précédents travaux de restauration ont été partiels et limités à des reprises en sous-œuvre.
L’examen des relevés lasergrammétriques avant-sinistre a démontré que la structure présentait diverses déformations provoquées par l’action des charges climatiques et permanentes : une ovalisation par écrasement de l’œil central et de la moitié supérieure des remplages de l’ordre de 20cm, un écartement dans l’axe vertical de la structure (rendant la lancette axiale supérieure plus large que toutes les autres), ainsi que la formation d’un faux-aplomb vers l’intérieur de l’édifice de l’ordre de 7cm.
Ainsi, l’étude de diagnostic préalable a pu révéler que, lorsque la rose a été frappée par la tempête, elle se trouvait dans un état limite d’équilibre. La modélisation 3D a par ailleurs pu confirmer ce défaut structurel.
En plus des dégâts mécaniques provoqués par la chute des pierres, les relevés ont permis d’identifier une grande hétérogénéité de dimensions des éléments de remplage, les colonnettes présentaient, par exemple, des longueurs très variables entre elles.
Les vitraux de style Art déco de Jean Gaudin (1931) ont, quant à eux, fait l’objet d’un minutieux travail de dépose, d’inventaire, d’identification, de diagnostic d’état sanitaire et de conservation. Environ 90% des panneaux pourront être récupérés.
Le parti prix de la restauration
Dès le départ, la maîtrise d’ouvrage a exprimé la volonté de restaurer la rose à l’identique avec, tant que possible, le réemploi des matériaux d’origine. Toutefois, le principe de restauration en conservation des remplages anciens n’a malheureusement pu être retenu. En effet, la remise en œuvre d’éléments si fragilisés mécaniquement d’une part et si hétérogènes d’autre part, aurait inévitablement conduit à un nouvel effondrement à plus ou moins long terme, si la rose était soumise à nouveau à des contraintes similaires (les claveaux remplacés en 1931 étaient déjà à nouveau fracturés).
Le programme de travaux proposé par Olivier Weets, architecte en chef des Monuments historiques et validé par les services patrimoniaux de la DRAC consiste donc à reconstruire la rose du XIIIe siècle « à l’identique » avec une symétrie parfaite en reproduisant d’une part les moulures et le décor sculpté des éléments déposés, et d’autre part en augmentant légèrement l’épaisseur des remplages, ce qui améliorera l’inertie de la structure sans porter atteinte au rapport entre les « vides » et les « pleins » qui, à Soissons, confèrent une grande légèreté visuelle de l’ensemble.
L’emploi de la roche dure de la Croix Huyart banc H4, dont les données pétro physiques se rapprochent des pierres d’origine, a été retenu selon les préconisations du Laboratoire de recherche des monuments historiques (LRMH) et de l’architecte des bâtiments de France, conservateur de la cathédrale.
Les vitraux seront restaurés par une équipe de restauratrices spécialisées en vue de leur remise en œuvre et de leur adaptation dans le réseau en pierre neuve.
L’ancien réseau de pierre a été déposé en conservation et est actuellement exposé au Musée Saint-Léger de Soissons dans le cadre de l’exposition « La Rose et la Tempête ».
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