Je suis très heureux de vous accueillir pour vous présenter le projet de la Tour Médicis de Clichy-Montfermeil.
Il y a quelques jours, j'ai proposé à des journalistes de visiter la Tour. Elle n'est pas en état d'accueillir un public nombreux, mais je tenais beaucoup à la faire connaître, car elle est en elle-même un atout majeur, une chance qu'il faut saisir : la capacité d'accueil, la densité qu'elle offre sont des avantages considérables pour un équipement culturel, qui doit pouvoir
recevoir du public, ménager des espaces plus intimes d'étude et de travail, et faciliter la circulation et les échanges.
Réhabilitée, son aspect extérieur repensé, la Tour sera le symbole de l'avenir du quartier et de son ouverture au monde, un symbole de progrès et de réussite.
Cette visite a été, je le crois, convaincante. La couverture par la presse a été dense et positive, avec de très nombreux d'articles dans la presse écrite, une douzaine de sujets à la radio et à la télévision, et une large présence sur la toile.
Ceci n'était pas gagné d'avance, tant ce projet comporte une part d'utopie qui peut dérouter. Sans doute, une fois encore, c’est l'utopie qui va nous faire avancer.
Aujourd'hui j'ai voulu recevoir rue de Valois, avec Maurice Leroy, tous ceux qui peuvent apporter un soutien au projet : intellectuels, artistes, responsables d'établissements culturels et d’enseignements artistiques, mécènes, représentants de pays amis. Les élus des collectivités territoriales d'ores et déjà engagées dans le soutien au projet, au premier rang desquels figurent Xavier Lemoine, maire de Montfermeil et Olivier Klein, maire de Clichy-sous-Bois, sont là également, ou représentés, et je les remercie de leur présence active et déterminante.
Je tiens également à remercier de leur présence les représentants des pays que ce projet concerne et intéresse [Etats-Unis, Qatar, Maroc].
Tout nous invite à nous engager ensemble pour réaliser ce projet exaltant. Il est le symbole de la transformation du territoire de Clichy-sous Bois et de Montfermeil et de l’ambition culturelle du Grand Paris.
La construction de milliers de logements, le remodelage urbain qui l'accompagne, l'arrivée prochaine du métro, puisqu'une des 56 gares de la grande boucle de métro du Grand Paris sera implantée là, à quelques mètres de la Tour, tout cela va changer radicalement la vie des habitants.
L'engagement citoyen, politique, professionnel des acteurs du développement et du progrès de ce territoire, est, lui aussi, remarquable. Je veux saluer en particulier l'action pour la culture de ses maires, Claude Dilain maintenant sénateur, Xavier Lemoine et Olivier Klein.
Cette action est ancienne, elle a déjà porté beaucoup de fruits. L'initiative de Jérôme Bouvier de réaliser en 2006 deux manifestations, « Clichy sans clichés » et « Des nouvelles de la banlieue » a elle aussi marqué les
esprits. Jérôme Bouvier est le premier à m'avoir fait découvrir la Tour et cette idée d’une villa Médicis au coeur d’un quartier sensible ; il participe aujourd'hui activement à l'élaboration du projet. Il souhaite jouer à l’avenir un rôle actif dans l'association de préfiguration que nous allons prochainement mettre en place.
Un tel projet ne peut se concrétiser que s’il est compris et partagé par tous les partenaires. Il doit faire l’objet d’une véritable "co-construction".
En son coeur, il y a l'accueil d'artistes du monde entier et de toutes les disciplines. Il nous faudra faire preuve d’innovation, tant sur les conditions de sélections des artistes, que sur celles de production des oeuvres et des modes de médiation avec la population. Il existe en effet de multiples talents qui peinent à s‘exprimer et à trouver des débouchés dans les
territoires des grandes agglomérations françaises : avec la Tour Médicis, le projet culturel du Grand Paris offrira un laboratoire pour toutes les métropoles régionales.
Les démarches de résidences de création méritent aussi d’être rénovées. Les artistes le savent : leur exigence de qualité et leurs protocoles créatifs sont étroitement liés au territoire qui les accueille. Ils savent qu’il est plus difficile d’oeuvrer dans un contexte où l’art ne va pas de soi que dans un lieu où il est d’emblée légitime. Les artistes ne bénéficieront pas d’une
complaisance acquise de la part du public ; et ils auront l’ardente obligation de prendre en considération tous ceux avec qui et pour qui on travaille, à Paris comme à Clichy-sous-Bois et à Montfermeil. Ne nous leurrons pas : être en résidence à Clichy Montfermeil sera plus exigeant que d’être pensionnaire de l’Académie de France à Rome.
C’est aussi pour ces raisons que les motivations qui conduiront les artistes à venir travailler dans la Tour seront profondes, j’en suis convaincu. Y joueront certainement leur intérêt pour la ville contemporaine, pour les conditions offertes ou encore pour le partage de l’art ; leur désir, aussi, de vérifier la capacité de l’art à exister hors des espaces qui lui sont dévolus. C’est pourquoi nous comptons tous sur l’équipe de la Tour Médicis et les artistes de toutes les disciplines pour que, précisément, ces conditions et cette exigence puisse faire émerger les projets les plus forts.
Dans ce domaine, les exemples ne manquent pas ; souvenons-nous du Musée Précaire Albinet que Thomas Hirschhorn installa avec le Centre Pompidou et la souriante autorité d’Yvane Chapuis qui nous a rejoints sur ce projet. À ce sujet nous savons aussi que ce qu’ont produit les Laboratoires d’Aubervilliers entre 2001 et 2009 est, pour nous tous, une référence.
En plus des résidences d'artistes, le projet de la Tour Médicis devra comprendre une école. Les jeunes sont l'atout majeur de ce territoire! Ils sont un véritable réservoir d'énergie, de créativité, d'inventivité. Il faut les aider à accéder à la formation aux métiers artistiques et culturels, autant dans le secteur des arts plastiques et visuels que des arts appliqués, du patrimoine ou des techniques du spectacle. Ce sont des domaines qui offrent de réels débouchés professionnels.
Je souhaite que les artistes tirent profit d'un séjour à Clichy-Montfermeil, et que les jeunes puissent apporter, dans le cadre de formations auxquelles les artistes eux-mêmes contribueront, leur vision du monde, leur expérience, leur talents propres.
Le projet pourra accueillir une programmation culturelle ouverte sur le monde avec des concerts, des spectacles, des expositions. Elle devra être conçue pour attirer la population proche et, bien au delà, le public parisien et francilien.
Le chemin à parcourir pour réaliser ce projet n’est pas sans aléas ; il devra vraisemblablement se faire par étapes. La direction générale de la création artistique et le secrétariat général du ministère de la Culture et de la Communication sont d’ores et déjà fortement mobilisés, ainsi que la direction régionale des affaires culturelles sous l'autorité du préfet de région Daniel Canepa. Jérôme Bouet et Yvane Chapuis assurent depuis trois mois une mission essentielle de pilotage et de coordination.
Votre soutien, cher Claude Dilain, cher Xavier Lemoine, cher Olivier Klein, acquis dès l'origine, même avant que je ne découvre moi-même la Tour, sera déterminant.
Bertrand Delanoë et Claude Bartolone m'ont fait savoir qu'ils approuvaient la démarche.
De grandes entreprises privées ont été contactées et plusieurs d'entre elles ont fait connaître leur intérêt. Celles d'entre elles qui sont ici aujourd'hui savent que nous sommes désireux de bâtir avec elles un mode de partenariat spécifique et adapté à chacune d'entre elles. Elles peuvent trouver dans la Tour Médicis un moyen de développement et de valorisation de leur action de mécénat.
Des discussions ont été entamées avec l'Institut Français, l'Ecole nationale supérieure des beaux arts, la Cité de la musique, le Centre Pompidou, le Château de Versailles, le musée du Quai Branly, l'Ecole nationale supérieure des arts décoratifs, l'Ecole du Louvre, l’Institut national du patrimoine, le Centre de formation professionnelle aux techniques du spectacle, la Cité nationale de l'histoire de l'immigration, le Centre d'éveil artistique d'Aulnay-sous-Bois. Elles se poursuivent avec d'autres
établissements publics, ainsi qu'avec le tissu extrêmement riche et dense des institutions culturelles franciliennes et parisiennes.
Une école étudie la possibilité d'organiser une filière d'accueil de jeunes qui auraient reçu une préparation à la Tour Médicis. D'autres établissements publics proposent des partenariats pour offrir leur scène à des artistes en résidence à Clichy-Montfermeil, pour travailler sur la mémoire du quartier, ou pour accompagner des interventions artistiques sur le territoire proche. Ces pistes sont très riches : elles pourraient faire de Clichy-Montfermeil un territoire d'attraction et permettre une ouverture sur le Grand Paris à des établissements publics implantés au coeur de la capitale.
Le projet de la Tour Médicis s'inscrit ainsi pleinement dans le Grand Paris, avec de nombreux autres projets qui contribueront à faire du 1% artistique des gares de la grande boucle du métro une réalité à court terme.
Nous allons aussi rechercher pour la Tour Médicis des partenariats à l'étranger. De grandes universités, des fondations, des gouvernements, pourraient conclure des accords de longue durée pour des résidences d'artistes. La France est très sollicitée dans ce domaine et son image culturelle est excellente : nous devons tirer parti des expériences antérieures comme celle de la Cité internationale des arts à Paris, qui a conclu des accords avec une cinquantaine de pays. Nous devons le faire tout en préservant la cohérence d'un projet artistique spécifique à la Tour Médicis.
La réhabilitation de la Tour et son fonctionnement ultérieur donneront ainsi lieu à une diversité des financements, publics et privés, français et internationaux. Dans ce domaine, nous devons imaginer un scénario budgétaire qui tienne compte de la conjoncture économique. Si je souhaite aussi inscrire ce projet parmi les actes majeurs de mon mandat, c’est aussi
parce qu’il peut constituer, par son innovation, par sa légitimité culturelle, artistique et sociale dans un contexte éminemment lié à la politique de la ville, une initiative qui pourra être exemplaire du partenariat entre l'Etat et les collectivités territoriales, entre le secteur public et le secteur privé, entre la France et des pays amis dans le monde.
Ce que nous sommes en train d’inventer ensemble, c'est un projet original, un projet qui mise sur l'avenir, sur la jeunesse, sur l'ouverture au monde, sur la capacité des artistes et de l'art à transformer la vie. C’est un projet qui doit beaucoup à votre confiance, dont je tiens à vous remercier chaleureusement ce soir.