La Biennale de Lyon est une manifestation profondément inscrite dans le
paysage national et international de l’art contemporain. Les organisateurs,
les artistes invités, les oeuvres choisies et l’intérêt du public en ont fait la
preuve depuis plus de vingt ans.
Par leur ampleur, ces manifestations jouent un rôle essentiel dans
l’éducation du regard. La Biennale de Lyon a fait le choix de la prospective
plus que de l’oecuménisme, et c’est ce qui fait toute sa force. Le
foisonnement de la création, l’expérience esthétique inédite : c’est ce que
résume le titre magnifique « Une terrible beauté est née. »
La Biennale de Lyon, c’est aussi un très bel exemple de la coopération
étroite entre l’action de l’Etat et des collectivités territoriales qui l’accueillent
et la soutiennent. Je ne peux que me réjouir de pareils rendez-vous, de la
place qu’ils font à l’art dans les dynamiques de notre société. De même
que la Biennale de Design de Saint-Etienne, la Biennale de Lyon témoigne
en Rhône-Alpes de la réalité de la politique de décentralisation à laquelle le
ministère de la Culture est profondément attaché. À Lyon, vous vous êtes
engagé, cher Gérard Collomb, dans une démarche très ambitieuse pour
l’art contemporain, qu’il s’agisse du réaménagement des rives de la Saône
sur vingt-cinq kilomètres, du Parc de Miribel-Jonage ou encore des
commandes publiques pour le quartier des Etats-Unis : autant de projets
de grande envergure auxquelles mon ministère est étroitement associé.
Outre les partenaires publics de la Biennale, ce sont aussi nombre de
partenaires privés qui donnent aujourd’hui à une pareille entreprise les
moyens nécessaires de son action. Qu’ils en soient ici tous remerciés. Il
est désormais clair dans l’esprit de tous que c’est l’alliance intelligente et
efficace de l’ensemble des pouvoirs publics - Etat, région, département,
ville - et des partenaires privés qui assure la réalisation d’un tel événement
et sa reconnaissance vis-à-vis de publics de tous horizons.
La Biennale de Lyon, c’est aussi une manifestation qui rayonne, avec le
déploiement des plates-formes « Veduta », où l’on peut voir la
démocratisation culturelle à l’oeuvre dans la communauté urbaine de Lyon
- et vous savez mon attachement à cette dimension de notre action
culturelle -, et « Résonance » avec l’Institut d’Art Contemporain de
Villeurbanne et dans toute la Région Rhône-Alpes.
Deux plateformes qui accroissent sa diffusion et sa visibilité auprès du
public. C'est là l'occasion de renforcer les articulations existantes entre la
Biennale et les réseaux des professionnels de la création, de la diffusion,
de la recherche et de la formation dans le domaine de l’art contemporain
en Rhône-Alpes.
Cette année, la onzième édition poursuit la réflexion sur le thème de la
transmission que la commissaire invitée, Victoria Noorthoorn, à la suite de
Hou Hanrou en 2009, a développé au travers d'un propos et d'une
approche qui reflètent un état d'alerte permanent et témoignent d'un esprit
inattendu. À l'abri des fluctuations du goût et des seules stratégies
marchandes, des modes et des sectarismes, on touche à la manière dont
l’expérience esthétique modifie les règles du jeu de la connaissance, de
l'imagination, de la perception et de la mémoire – celles de l’artiste, celles
du spectateur, dans leur rapport au monde, dans leur rapport à « l’autre »,
qui avait été le thème d’une des biennales précédentes dirigée par le
regretté Harald Szeeman. De nouveaux regards sur un monde en
mouvement : c’est aussi tout le sens de la participation de trois galeries
tunisiennes à la troisième édition de Docks Art Fair sur l’esplanade de la
Sucrière.
Dans le paysage international foisonnant des biennales où règnent parfois
le ponctuel et l’éclat médiatique, la Biennale d’art contemporain de Lyon
est avant tout une biennale d'auteur. En mettant en scène un regard
singulier, elle assume pleinement une dimension pédagogique forte, à
destination notamment des jeunes créateurs – je pense en particulier aux
étudiants des quatre établissements d’enseignement supérieur des arts
plastiques de Rhône-Alpes : Lyon, Saint-Etienne, Grenoble-Valence et
Annecy. Allier l’exigence pour mettre en scène les tendances les plus
novatrices de la création contemporaine, tout en donnant la priorité à la
médiation des oeuvres et leur compréhension par le grand public : c’est là
une ambition que partagent pleinement, et de longue date, mon ministère
et les collectivités territoriales. Faire l’expérience du doute, de la
contradiction, de l’enthousiasme aussi, cela doit pouvoir être partagé par
un public le plus large possible : c’est la force d’une exposition
internationale de ce calibre, qui essaime dans toute la ville de Lyon à
travers de multiples sites.
Michel de Certeau, dans un passage célèbre de L’invention du quotidien,
décrivait les flux de circulation des piétons vus depuis le sommet des Twin
Towers de New York, et les limites de leur rationalisation : ce qui
échappera toujours à cette vision d’en haut, à toutes les volontés de
contrôle et à toutes les fictions du surplomb, c’est précisément le sens que
chacun donne à son parcours. Entre la Sucrière, le Musée d’art
contemporain, la Fondation Bullukian, l'usine T.A.S.E., chacun va pouvoir
dresser sa propre cartographie, partager des parcours toujours singuliers,
retrouver aussi « l’inquiétante familiarité de la ville », cet espace qui
s’invente à chaque pas. La création contemporaine se prête pleinement à
cette expérience sociale et citoyenne unique, et c’est le propre
d’événements d’exception comme la Biennale de Lyon de la rendre
possible.
Je vous remercie.