Historique
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Attribution proposée par Stephan Perreau, mails et visite du 26/11/2012. Stephan Perreau : "L'un des principaux arguments est le traitement symptomatique des drapés et celui des visages. Les tissus sont en effet toujours disposés par Ranc de façon à mettre en valeur des plis légèrement anguleux, larges et octogonaux. Dans le portrait de Mme Dupuy, sur la droite, les mouvements du velours sont d'ailleurs creusés de petites incisions perpendiculaires que l'on retrouve, pour ne citer qu'elles, dans l'effigie d'Antoine Delaselle qui est conservée à Nantes et dans celle du marquis de Prie. Enfin, chose particulièrement frappante ici, le peintre rehausse ses effets de lumière sur les bords d'attaque des plis par des touches de blanc laissées souvent " à cru ", sans trop les fondre pour que le rendu soit franc sur une matière plus sombre. Les postures, certes classique à cette époque, sont communes à d'autres portraits de Ranc. Le portrait de Mr Dupuy peut ainsi être rapproché avec évidence d'un jeune homme au manteau rouge passé en vente publique en 1996, et qui propose le même type d'agencement : un drapé constitué d'un large pan au premier plan, supporté par l'épaule et le bras droit légèrement replié en arrière, tandis que l'autre s'avance au second plan. L'ordonnance de la cravate, débordante de la veste sous-jacente, rejoint aussi celle d'un grand portrait d'homme de la collection Elton John. L'effigie de Mme Dupuy présente également des éléments qui plaident en faveur de Ranc : la disposition enveloppante et protectrice du manteau qui enserre un buste s'avançant vers le spectateur mais aussi un goût pour les teintes sombres hérité de Rigaud. Ranc s'en affranchit cependant en proposant des fonds de paysages discrets mais crépusculaires, comme c'est le cas ici, laissant cependant une large place à l'élément architectural et drapé derrière un visage mis ainsi en valeur. Mais ce qui frappe surtout, c'est le traitement des carnations et la grande vérité de la ressemblance. On sent largement le métier acquis au contact de Rigaud. Les deux modèles âgés forment ainsi des images très présentes que l'on ne peut s'empêcher de rapprocher avec le visages de celui d'un des morceaux de réception de Ranc à l'Académie, celui de Nicolas Van Plattenberg peint en 1703 avec l'aide de son maître. Le creusement très réaliste des paupières qu'on y retrouve est assez parlant, mêlé d'une certaine mélancolie tout à fait unique chez Ranc. A la même époque, l'artiste peint, dans la même veine, le portrait de l'académicien Eusèbe Renaudot en cheveux naturels. Dix ans plus tard, et lorsqu'il figure les traits du greffier Jean Olivier, il procède du même réalisme. Ranc est également le seul, à son époque, à rehausser les joues de ses modèles d'un rose très prononcé, poudrant le haut des pommettes et le nez d'une teinte très caractéristique qui met en valeur le cercle des yeux. On le voit particulièrement dans le visage de Mme Dupuy. Concernant leur datation, je pense qu'ils sont très contemporains des effigies citées plus haut, soit des années 1695-1700, à une époque où Ranc subit encore l'influence de Rigaud chez qui il travaille dès 1694, avant de s'en affranchir dans les années 1710 avec des visages davantage " porcelainés " ; voir aussi : Portrait de Monsieur Dupuy (1986.1.1)
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