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La médaille du brave général La Moricière Daniel Cariou. Les voyageurs qui traversent la localité habituellement paisible de Saint-Philbert-de Grandlieu (Loire-Atlantique) sont surpris de contourner un immense groupe de bronze faisant de l'ombre à l'église paroissiale : ce monument insolite - par ses dimensions - dans un chef-lieu de canton se dressait initialement à Constantine, préfecture du département du même nom, et il fut fondu à la mémoire du général Juchault de la Moricière, de la famille du maire de Nantes Juchault. En 1962, au moment de l'indépendance de l'Algérie, le groupe en bronze du général fut déménagé dans la terre de ses ancêtres. Créateur des zouaves pontificaux, le général Lamoricière bénéficie d'un second monument dans notre département, un tombeau dans la cathédrale de Nnates, faisant rien moins que le pendant du tombeau de François II par Michel Colombe. Les deux monuments du général, l'algérien et le " pontifical ", illustrent les deux facettes de sa vie. Son nom est porté par quantité de rues, par exemple à Nantes. Bien qu'originaire du vignoble nantais, Louis Juchault de la Moricière est né à Nantes en 1806. En 1830, l' Algérie est une terre de gloire pour les officiers. Polytechniciens, jeune officier du génie, la Moricière crée les zouaves, troupes indigènes recrutées dans la tribu des zouaouas très vite remplacés par des Français ayant conservé la même tenue. En 1962, il y avait encore deux régiments de zouaves en Algérie, le 3e et le 9e, l'un dans l'oranais et l'autre dans le constantinois. Jusqu'en 1833, l' Algérie est administrée au travers d'interprètes maures et juifs. Le général Voirol décide donc la création d'un bureau arabe, directement en prise avec les habitants et constitué d'officiers parlant arabe. La Moricière, qui a pris la peine d'apprendre l'arabe, est le premier chef du bureau. Son action pacifique et diplomatique, les résultas qu'il obtient sans tirer un coup de feu, le font très vite remarquer. En 1837, la Moricière est colonel. Il a trente et un ans. A l'assaut de la formidable position de Constantine, sous les ordres du général Damrémont, il commande une colonne de zouaves. Escaladant une brèche, il s'engouffre dans la ville, mais il est tout de suite grièvement brulé par l'explosion d'un magasin à poudre. On le croit aveugle et on l'évacue, mais son assaut fougueux à la tête des zouaves rest dans les mémoires. En 1844, sous les ordres de Bugeaud, la Moricière commande en second lors de la victoire de l'Isly. Toutefois, homme issu du génie, il crée des postes isolés, comme celui de Nemours, ce qui aboutira au massacre célèbre de Sidi-Brahim. Bugeaud lui dira : " vous autres messieurs, qui sortez du génie, vous avez le génie des fortifications, mais vous n'avez pas le génie de la guerre ". Prémonition de ce qui arrivera en Italie. Bugeaud perçoit à juste titre la Moricière comme son principal rival. Et c'est la Moricière, ayant pour chef d'état major le commandant Bazaine, qui reçoit la capitulation de l'émir Abd-el-Kader en 1847. Tous ces exploits amèneront le général au ministère de la guerre sous la seconde république. des colons baptiseront " Lamoricière " un gros bourg entre Tlemcen et Sidi Bel Abbès, et dans ce gros bourg, une dame Courtot (Félécie) émettra des monnaies privées vers 1920. 1848 marque en Italie un nouvel élan pour le Risorgimento. Durant cette période, les Etats du Pape sont pris en tenaille entre les Piémontais, qui agglomèrent bientôt toute l'Italie du nord, et le Royaume de Naples qui sera conquis par les Piémontais et les garibaldiens. Chrétien dévoué, ennemi politique de Napoléon III, général prestigeux dont la bravoure ne peut être mise en cause, la Moricière est appelé à Rome en 1860 pour organiser la faible armée pontificale : 17 000 hommes. Il crée les zouaves pontificaux sur le modèle algérien avec des volontaires catholiques fervents, canadiens, belges, bretons, vendéens. (Il fera école : le général Lee devra faire face aux zouaves ne w-yorkais de l'armée du Potomac lors de la guerre de Sécession). Mais Bugeaud l'avait dit, la Moricière était un homme de fortifications, mais pas un grand général en chef. Face aux Piémontais et aux volontaires garibaldiens hautement motivés, ses soldats pontificaux font mauvaise figure. Seuls les zouaves se battent efficacement. La Moricière est donc vaincu à Castelfidardo et capitule à Ancône. Il mourra en 1865. Les Etas du Pape rejoignent par lambaux le royaume d' Italie, sauf Rome protégée jusqu'en 1870 par Napoléon III. Alors, les Français devant quitter Rome pour défendre leur patrie, la ville sera annexée au royaume de Victor-Emmanuel. La médaille du général La Moricière (en cuivre et en argent) commémore, non son épopée algérienne, mais son séjour romain. Elle porte une abeille sur la tranche : on peut penser que Napoléon III, ennemi du général, n'aurait pas autorisé une telle frappe. Aussi est-ce probablement une initiative royaliste datant des débuts incertains de la IIIe République. On lit au droit : " C.LL. JUCHAULT DE LA MORICIERE, NE A NANTES LE V FEVRIER M DCCC VI (étoile) FORTISSIMA VIRTUS. IN VICTA FIDES (étoile) " le buste est signé A. ZOEGGER Au revers : " CONSIVI AC DVCI S. DEDIS APOS
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