Madame la préfète de la région Pays de la Loire,

Mesdames et messieurs les parlementaires,

Mesdames et messieurs les élus,

Monsieur le directeur des BIS, cher Nicolas MARC

Monsieur le Directeur général de la SACEM,

Monsieur le Directeur général de la SACD,

Mesdames et messieurs,

Chers amis,

 

Je suis très heureuse d’être parmi vous aujourd’hui.

Je voudrais commencer par vous souhaiter une très belle année : tous mes vœux de bonheur, de santé, de réussite pour vous-même et pour ceux qui vous sont chers.

Cette année 2018, j’en attends beaucoup.

2017 a été une année charnière : avec l’impulsion d’une nouvelle ambition, d’une méthode, la définition de chantiers prioritaires.

L’année qui s’ouvre doit être celle de la concrétisation et de l’élan collectif.

J’ai entendu certaines inquiétudes, à l’égard notamment du processus de transformation « Action publique 2022 ».

Je vous le dis aujourd’hui à vous, acteurs du spectacle vivant : il n’y aura pas d’économies entre nous.

Pas d’économies de moyens.

Vos spectacles, vos pièces de théâtre, vos chorégraphies, vos concerts ne sont pas des postes d’économie.

Ce sont des ressources précieuses pour notre culture, pour notre pays, pour notre société.

Vos créations, vos prouesses sont une fierté pour la France.

Comme ministre de la Culture, je me suis engagée pour que la création soit confortée dans le budget 2018.

Pas d’économies de moyens entre nous, donc.

Pas d’économies de projets non plus.

Parce que le défi qui nous rassemble appelle les créateurs à être, plus que jamais, au cœur de la Cité.

Ce défi, c’est la lutte contre la ségrégation culturelle.

Contre les barrières qui excluent des millions de personnes en France de la pratique d’un art, qui les excluent de certaines professions culturelles, qui les excluent d’œuvres, de lieux, de salles fréquentés par d’autres.

Des barrières qui sont parfois financières, parfois sociales, parfois géographiques, parfois psychologiques.

Personne ne peut se satisfaire de cette situation.

Ce combat, vous l’avez à l’esprit chaque jour, je le sais. Parce qu’il n’y a rien de plus terrible pour un spectacle que de ne pas trouver son public. Ses publics. Tous les publics.

Ce combat, nous allons le mener ensemble.

L’art et la culture doivent être au cœur de la refondation de notre pacte républicain.

Pour cela, je souhaite une nouvelle donne de l’action publique, construite avec les collectivités territoriales.

Elles sont des acteurs majeurs du soutien au spectacle vivant – les élus nombreux dans cette salle, que je salue, le rappellent par leur présence –, et elles sont des partenaires privilégiés pour le ministère.

J’ai noué très vite le dialogue avec elles, pour définir un nouveau cadre de contractualisation. Un cadre qui soit à la fois :

-       Plus souple : c’est-à-dire qui s’adapte aux besoins des territoires et aux projets, et non l’inverse.

-       Plus dynamique : c’est-à-dire qui ne fige plus nos interventions, mais laisse de la place aux ajustements, à la réévaluation des besoins.

-       Plus solidaire, enfin : qui prévoit un volet adapté pour les populations et territoires les plus fragiles.

Nous avons travaillé à une déclaration commune. Je vous annonce que toutes les associations d’élus du Conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel, le CCTDC, ont signé cette déclaration. Nous la ferons donc paraître très prochainement.

Je souhaite qu’ensemble, nous puissions ouvrir une séquence nouvelle pour la création, faite d’expérimentations, de projets croisés ; marquée par un décloisonnement entre l’art et les autres champs de la société.

Je veux soutenir tous ceux qui innovent, qui osent, qui sortent du cadre. Ceux qui tentent des aventures différentes, qui n’auraient pas trouvé le soutien du ministère de la Culture il y a quelques années : aujourd’hui, nous leur faisons une place.

Je veux soutenir tous ceux qui se mobilisent pour aller à la rencontre de citoyens qui sans cela ne verraient jamais vos spectacles : ceux qui vont dans les hôpitaux, les prisons, les maisons de retraite…

Je veux soutenir les projets qui associent le public, qui le font participer à la construction du spectacle, qui encouragent la pratique amateur. Qui font vivre les droits culturels.

Je veux soutenir tous ceux qui se mobilisent auprès des nouvelles générations, pour que le spectacle soit une chance universelle : ceux qui vont intervenir dans des écoles, qui accueillent des enfants à leurs répétitions, qui montent avec eux des projets.

Je veux soutenir tous ceux qui vont jouer dans les territoires où les spectacles sont trop rares : dans les zones rurales, dans les quartiers, dans les centres-villes en déshérence.

Pour toucher tous les publics, il ne faut pas seulement les inciter à passer nos portes, il faut aller vers eux, dans les lieux qui leur sont familiers, sur les places publiques, dans les maisons associatives, les bibliothèques, les salles polyvalentes.

Je vais lancer un grand plan de soutien à l’itinérance dans les semaines à venir : pour que des troupes, des artistes, des productions partent sur les routes de France.

Je demande à toutes les DRAC, dès cette année, de libérer une partie de leur budget pour favoriser tous ces projets, permettre ces expérimentations, donner « carte blanche » à des artistes et à des créateurs pour conduire des projets auprès de territoires ou de publics oubliés.

Je voudrais aussi vous dire un mot d’un public qui appelle à une mobilisation toute particulière : les migrants.

Devant vous, devant les professionnels responsables et engagés que vous êtes, je lance ce soir un appel.

Offrons aux migrants un accueil digne de ce nom.

Vous êtes déjà nombreux à vous mobiliser.

Le monde culturel a le devoir d’agir.

Chacun, à son niveau, doit prendre sa part.

C’est notre honneur, celui de notre culture, celui de notre République qui en dépend.

J’appelle chacun à agir : ni par angélisme, ni par complaisance, mais par humanité, par esprit de responsabilité.

Agir pour rendre à ces personnes le droit de vivre normalement, à côté des procédures, des démarches, des files d’attente.

Agir pour leur rendre des repères, après des périples inimaginables, après l’arrachement à leur terre natale.

Agir pour leur offrir la chance d’un enracinement.

Agir, donc. Ensemble et maintenant.

Vous en avez tous le pouvoir.

Celui de rappeler à ces personnes que le rêve existe, de leur offrir des moments de grâce, en leur réservant une place pour assister à vos spectacles.

Vous pouvez leur rendre une dignité et une voix, en leur proposant un atelier de théâtre, de cirque, de danse. En mettant entre leurs mains un micro ou un instrument de musique.

Vous pouvez combattre les stéréotypes qui les frappent, agir pour leur droit à la considération, en racontant leur histoire dans vos spectacles ; en leur faisant une place dans vos programmations.

Engagez-vous. Je compte sur vous.

Le pendant de tout ce que je viens de décrire, de tous ces nouveaux projets, c’est l’évolution du cadre dans lequel ils s’inscrivent.

Pour que les idées neuves puissent s’épanouir, il faut un environnement en mouvement.

C’est mon troisième message : nous ne ferons pas l’économie de la transformation.

Pour réussir à accompagner la création et l’émergence, nous devons changer nos façons de faire.

Pour la politique culturelle, le statu quo n’est pas une option.

Nous devons changer notre approche, nos priorités, nos modes d’action. Briser certains tabous, lever certains carcans.

La nouvelle politique culturelle, c’est celle qui arrête d’opposer politique des publics et politique des artistes.

J’ai entendu les inquiétudes sur ce sujet.

Mais nous ne mènerons pas une politique de l’accès et de la diffusion « au détriment » de la création.

C’est une « fertilisation croisée », pour reprendre le joli mot de Jack RALITE, que vous avez souvent vu ici et pour lequel j’ai une pensée.

Toute l’ambition que je viens de décrire pour les publics n’existe pas sans les créateurs, sans les professionnels que vous êtes.

C’est vous, et vous seuls, qui pouvez toucher les spectateurs, en conquérir de nouveaux.

Quand on croit à vos spectacles, à ce qu’ils apportent au monde, on se bat d’abord pour les rendre possibles, et on se bat ensuite pour qu’ils soient à la portée de tous.

Je ne choisis donc pas entre les deux : je me battrai pour les professionnels comme je me battrai pour les publics.

Je veux un nouvel élan pour la création.

Et pour cela, il faut lui redonner du temps.

Je veux laisser aux artistes du temps pour la recherche, en développant les résidences, la présence des artistes en permanence dans les lieux.

C’est aussi la meilleure façon de favoriser les rencontres avec les publics : en ouvrant l’accès aux répétitions, en organisant des rencontres hors des représentations.

 

Pour donner un nouvel élan à la création, nous devons aussi moderniser notre système d’aides publiques.

Vous connaissez ses limites, vous êtes les premiers à en souffrir.

Aujourd’hui, trop souvent, les demandes d’aide sont un parcours du combattant. Il faut passer par plusieurs guichets, composer des dossiers interminables, attendre et recommencer.

Avec le système actuel, par ailleurs, la part d’aides qui revient in fine au projet artistique est insuffisante.

Et aujourd’hui, aux yeux de beaucoup, le ministère de la Culture apparaît en censeur plus qu’en facilitateur.

Tout cela doit changer : pour vous, pour nous.

Nous devons bâtir un système d’aides plus simple, plus fluide, plus juste.

Un système qui fait de la place pour la nouvelle création, pour les propositions inédites, inclassables, pour les expérimentations.

Un système qui évalue chaque projet pour son intérêt artistique, territorial, social, avant de regarder s’il coche tel ou tel critère.

Aucun artiste, aucun entrepreneur ne doit retourner chez lui son dossier de demande sous le bras, au seul motif que son projet ne rentre dans aucune « case ».

Ce nouveau système, nous ne le construirons pas sans vous. Nous avons besoin de votre diagnostic et de vos suggestions.

C’est le sens de la concertation actuellement menée par la Direction générale de la création artistique du ministère.

Pour donner un nouvel élan à la création, enfin, nous devons améliorer la situation de ceux qui en vivent.

Nous devons répondre à la paupérisation de vos professions.

Nous devons soutenir l’emploi pérenne dans le spectacle. C’est l’objet du FONPEPS, Fonds national pour l'emploi pérenne dans le spectacle. Les entreprises du spectacle doivent le mobiliser dès que possible.

Concernant le régime spécifique d’assurance-chômage des intermittents, le Président de la République s’est engagé à le préserver, pendant la campagne. Je veux ici vous réaffirmer solennellement cet engagement. L’accord signé en 2016 est un bon accord, juste et équilibré.

Soutenir la création, enfin, c’est se battre pour le pouvoir d’achat des artistes. C’est ce que j’ai fait cet automne pour garantir aux artistes-auteurs une compensation dans le cadre de la réforme de la CSG.

Vous pouvez compter sur moi pour mener et gagner les batailles, pour faire entendre les voix des professionnels de la culture dans les réformes d’ensemble menées par le gouvernement.

Un mot sur la Maison commune de la musique, enfin. Les consultations sur le rapport de Roch-Olivier MAISTRE sont en train de s’achever. Je vais prendre connaissance des remarques et j’annoncerai mes décisions.

La nouvelle politique culturelle, c’est aussi celle qui cesse d’opposer l’offre publique et l’offre privée.

Je me bats contre l’idée qu’il y aurait d’un côté une culture « légitime » – celle que l’Etat reconnaît et soutient ; et de l’autre côté, il y aurait une culture dont l’Etat se désintéresse ou qu’il déconsidère –  ce n’est pas le cas.

Il y a d’ailleurs déjà des coopérations qui se font, entre le public et le privé, dans le théâtre notamment.

C’est un sujet important, qui est devant nous, et sur lequel je veux réfléchir.

Voilà mesdames et messieurs,

Chers amis,

Les ambitions que je porte pour le spectacle vivant, et à travers ce que vous représentez, les ambitions que je porte pour le pays.

Vous faites vivre la liberté : liberté de création, liberté de parole et d’expression. Vous portez, dans votre engagement pour les publics, le combat pour l’égalité. Vous des artisans de la fraternité. La France a besoin de vous, plus que jamais.

Merci pour ce que vous lui offrez, merci pour votre engagement.

Meilleurs vœux pour 2018.