Historique
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"En conflit avec les fidélités féodales, les oppositions nationales furent lentes à combattre ouvertement les ducs qui étaient des Valois. Le premier, Philippe le Hardi resta un étranger aux Pays-Bas et le chef gantois exilé Van den Bossche ne cessa d'exhorter ses contemporains à reprendre les armes. A la cour ducale, plus visiblement encore au gouvernement se pressèrent nombreux les Bourguignons, les Francs-Comtois, les Wallons, et, parmi les Thiois, les Brabançons prirent bientôt une influence prépondérante. Les administrations cenrales qui coiffèrent peu à peu les autorités traditionnelles, eveillèrent susceptibilité et mécontentements. Les résistances les plus spectaculaires éclatèrent dans les grandes communes qui vivaient à la limite de l'indépendance depuis deux siècles : à Bruges en 1436-1437, à Gand avec une particulière opiniâtreté de 1440 à 1453 (...). Dès son avènement Philippe le Hardi avait évoqué à sa juridiction le règlement d'une guerre privée alors en cours entre des familles du Westhoeck et du pays d'Alleu. C'était poser le problèmes des droits de l'Etat en face des usages consacrés par les traditions. Les gens du Cassellois considéraient indistinctement leurs coutumes comme bonnes, valables et suffisantes, faisant partie de leurs privilèges jurés par les comtes à leur avènement. Le droit de vengeance en était un élément important. Troisième Bourguignon aux Pays-Bas, Philippe le Bon soucieux de créer un état régulier condamnait les mauvaises coutumes. Comme lors de maintes guerres privées, où des revendications d'ordre fiscal avait jadis trouvé des occasions de s'exaspérer, un mécontentement latent dégénéra en drame au Westhoeck, quand le bailli de Cassel, Colard de la Clyte, seigneur de Renescure (le père de Philippe de Comines), personnage de premier plan dans l'entourage de Philippe le Bon, voulut, en rapport avec la dévaluation de la monnaie, élever sensiblement le taux des amendes dans la châtellenie. L'agitation se déclara en 1427. Fait étonnant à première vue, le menu peuple, distinct de prélats, nobles et vassaux, se montra le plus ardents à défendre les vieux usages. Il se peut que l'évêque de Thérouanne, chancelier du roi anglais de Paris, ait excité en sous-main ses diocésains contre Philippe le Bon. Toujours est-il que dans sa cité épiscopale, cinq cents habitants de la région de Cassel se réunirent et qu'ils envoyèrent au Parlement de Paris une plainte contre les agents du duc, coupables d'abus dans quinze paroisses de la châtellenie. En revanche, à Paris même, Philippe le Bon fit arrêter deux commissionnaires des Cassellois. Il fit faire aussi une enquête dans le Casselambacht et posa nettement la question de fond de ce conflit : on verra si je suis maître de mon pays et de mes sujets. En novembre 1427, il envoya une petite armée de 5000 hommes. Les insurgés disaient être 8000, mais ils étaient répartis en trois ou quatre points différents. Philippe le Bon essaya de négocier, sans résultat. En 1429, il mit en mouvement une seconde armée. En 1430, les Anglais prenaient position contre lui. Les insurgés devenaient de plus en plus violents. Entrés de force à Bailleul, ils y firent prisonnier le bailli comtal et le livrèrent aux Anglais à Amiens. Leur nombre, accru de beaucoup d'aventuriers étrangers se serait élevé à 30000. Le château de Renescure fut détruit : les révoltés multiplièrent méfaits et vilénies, grands et énormes excès. Sans organisation sérieuse, ils furent obligés de céder. En 1431, Philippe le Bon vint, un jour de pluie glaciale recevoir leur soumission. Les révoltés durent aller pieds nus de Cassel jusqu'au Nieppe, un hameau de Renescure, sur la route de Saint-Omer, précédés de la croix, du clergé, de leurs bannières : ils s'arrêtèrent devant le duc, tous sans armes, les mains jointes, sans chaperon et sans ceinture, à genoux, beaucoup s'enfonçant dans la vase. Six meneurs furent décapités à Cassel ; beaucoup furent bannis, même hors de l'Artois et du Brabant ; des confi scations nombreuses prononcées. Philippe le Bon n'acheva de régler cette affaire qu'en 1434. Il exigea que les coutumes fussent corrigées.
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