L’œuvre représente la sainte Famille lorsqu’elle quitte la Terre Sainte pour se rendre en Egypte, fuir les persécutions d’Hérode et échapper au Massacre des Innocents. La Vierge Marie et l’Enfant Jésus sont perchés sur un âne tenu par Joseph, lui-même précédé par un ange qui lui montre le chemin. Sur un fond d’architecture de ruines à l’antique et au milieu d’une végétation luxuriante de palmiers-dattiers, des anges graciles accompagnent le cortège et cueillent des fruits aux arbres pour nourrir l’enfant et ses parents, ce qui donne à la scène son autre titre, Le Miracle des dattes.
A la suite d’un prêt au musée Fabre de Montpellier en 2019, pour l’exposition De marbre blanc et de couleurs consacrée à la chapelle Deydé, le tableau a été transporté en juin 2020 à Marseille auprès du Centre Interdisciplinaire de Conservation et de Restauration du Patrimoine (CICRP). Il y a bénéficié d’une étude complète et d’une restauration fondamentale qui ont duré plus de deux ans.
Confié aux mains de conservateurs-restaurateurs qualifiés, il a pu bénéficier de l’expertise des équipes du CICRP et des moyens techniques de l’atelier de peinture, notamment pour des photographies sous différentes lumières.
Si l’œuvre était globalement dans un état de présentation convenable, elle avait néanmoins subi des altérations qui réduisaient à la fois sa stabilité physique et son aspect esthétique. La toile était très détendue, malgré la présence d’un rentoilage réalisé au milieu du 20e siècle en même temps que le montage sur un châssis fixe en bois : le rentoilage a été conservé, mais le châssis remplacé par une structure en aluminium plus légère.
Le principal désordre résidait dans la présence d’une grande pièce d’incrustation en partie basse, qui avait été posée pour remplacer une zone lacunaire. La toile ancienne avait sans doute été découpée pour s’adapter à la forme d’un autel ou d’un tabernacle, et, au 19e siècle, le motif avait été entièrement repeint pour compléter l’image, assez maladroitement car les pieds des personnages et pattes de l’âne se raccordaient mal à l’anatomie initiale. Il a finalement été fait le choix de conserver cet ajout, car il ne posait pas de problème majeur pour la tension de la toile et fait partie de l’histoire de l’œuvre.
Le nettoyage a par ailleurs mis en évidence l’existence de six générations différentes de vernis successifs, et trois repeints plus ou moins débordants, attestant des précédentes campagnes de restauration. Le retrait progressif de ces repeints a été suivi d’un masticage des lacunes par un enduit blanc, puis la retouche illusionniste dans les manques pour redonner continuité de lecture aux motifs, et enfin la pose d’un nouveau vernis protecteur.
Le cadre en bois doré, datant du début du 19e siècle et très lourd, est quant à lui resté à Montpellier, mais a fait l’objet d’un nettoyage et d’une reprise des dorures avant le remontage de l’ensemble.
L’œuvre a été posée aux murs dans la chapelle Deydé, aujourd’hui consacrée à saint Roch, après avoir procédé au déplacement de deux autres grands tableaux. Alors qu’elle était présentée depuis la fin du 19e siècle dans le bas-côté gauche de la nef, elle retrouve ainsi son emplacement d’origine, telle qu’elle était peut-être accrochée au 17e siècle. Même si les détails très fins de la peinture de Carlone ne peuvent pas être vus de près, le visiteur de la cathédrale peut désormais mieux admirer le mouvement qui anime la scène, le doigt de l’ange guidant à la fois la sainte Famille et pointant vers le chœur de la cathédrale.
La restauration du tableau a été réalisée par Iris Brunner, Marie Connan et Josef Vojtek, conservateurs-restaurateurs spécialisés en peinture de chevalet, sous la maîtrise d’ouvrage de l’État (Drac Occitanie, conservation régionale des monuments historiques), propriétaire de l’œuvre. Elle a représenté un coût total de 92 593 € TTC pour l’étude, les travaux et l’installation.
La restauration a été suivie par un comité scientifique associant Alain Chevalier, directeur du musée de la Révolution française - domaine de Vizille (Département de l’Isère), et Pierre Stépanoff, conservateur du patrimoine au musée Fabre de Montpellier, tous deux spécialistes de la peinture ancienne.
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