En 2021, on constate d’indéniables progrès mais aussi la persistance d’obstacles importants avant de parvenir à une véritable égalité entre les hommes et les femmes dans le monde de la culture.

C’est un outil statistique précieux, dont la démarche inédite est célébrée à l’international. Comme chaque année, l’Observatoire de l’égalité entre hommes et femmes dans la culture et la communication, publié par le département des études, de la prospective et des statistiques du ministère de la Culture donne le pouls des principales tendances dans les secteurs culturels et des médias. Dans cette édition 2021, trois indicateurs - l'accès aux moyens de production, l'accès aux postes de direction et la présence des femmes dans la programmation artistique et dans les médias  - ont particulièrement retenu notre attention. Bonnes feuilles.

Accès aux moyens de production : un montant moyen des aides accordées souvent plus faible pour les femmes

En 2020, les commissions d’attribution d’aides à la création artistique du ministère de la Culture comprennent autant de femmes que d’hommes avec une présence plus importante des femmes pour la danse, compensée par une moindre présence en musique. Sur l’ensemble des disciplines du spectacle vivant, le montant des aides accordés est relativement égalitaire mais le théâtre fait exception : les femmes représentent 40% des récipiendaires des aides pour le théâtre mais 28% des montants.
Le Centre national du livre recense la part des demandes d’aide effectuées par les auteurs au titre du soutien à la création et à la traduction littéraire par domaine éditorial. En 2020, la part des femmes demandant des aides est de 47% ; or elles reçoivent 43% des aides, elles ont donc moins de chance d’obtenir une aide que les hommes. En revanche, elles reçoivent des aides d’un montant comparable à celles des hommes (-1%).

Dans le domaine du cinéma, en 2019, les avances sur recettes avant réalisation du Centre national du cinéma et de l’image animée pour mener à bien leur projet ont été attribuées à 41% de femmes réalisatrices ; il s’agit du taux le plus élevé enregistré depuis 2010.

Cependant, en 2018, le devis moyen des films d’initiative française réalisés par des femmes était de 2,9 millions d’euros, soit 35 % de moins que le devis moyen des films réalisés par des hommes (4,5 millions d’euros).

Accès aux postes de direction de l’administration culturelle et de ses opérateurs : le spectacle vivant encore loin de la parité

Au 15 février 2021, la situation a reculé (30%) après s’être améliorée en 2020 pour les postes de direction de l’administration centrale avec toutefois une présence des femmes surtout à des postes d’adjointes. Aux postes d’encadrement, les femmes sont moins présentes aux postes de chef de service : 36 %. Cependant, ce chiffre est en hausse par rapport aux deux années précédentes, et environ un poste de sous-direction sur cinq est occupé par une femme.

La part des femmes s’établit à 41 % aux postes de directeur régional des affaires culturelles au 15 février 2021 Dans ces établissements, elles sont plus souvent à des postes d’adjointe (30 %) et encore plus aux postes de secrétaire générale (75 %).

La situation s’améliore dans les établissements publics : alors que les femmes ne représentaient qu’un quart des dirigeants au 1er janvier 2014, elles sont désormais 43 %. Cette progression concerne l’ensemble des domaines d’activité, à l’exception du spectacle vivant où l’on ne compte qu’une femme pour 10 hommes aux postes de direction.

Si on observe une quasi-parité à la tête des directions générales des 40 musées nationaux qui ont un directeur général nommé au 1er janvier 2021, les femmes sont majoritaires à la direction des établissements correspondants avec 27 femmes pour 13 hommes. Ce sont les plus fortes proportions de femmes observées depuis 2014.

En archéologie préventive, la part des femmes parmi les chefs de service territorial reste stable autour de 32 %. Dans les services des archives départementales, les postes de direction sont occupés pour moitié par des femmes.
La part des femmes dirigeant les musées de France (hors musées nationaux) est stable depuis cinq ans, à un peu moins de la moitié des postes.

Audiovisuel public : les femmes en tête aux postes de direction

Au 1er janvier 2021, les femmes occupent trois des cinq postes de présidence des entreprises de l’audiovisuel public. Les comités de direction de ces entreprises de l’audiovisuel public sont composés pour un peu moins de la moitié par des femmes en moyenne, avec des disparités selon les groupes : l’Institut national de l’audiovisuel affiche ainsi une part de femmes moins importante dans ces instances (4 femmes pour 11 membres en 2021). Cet indicateur était dans l’ensemble stable depuis 2016, mais la situation en début d’année 2020 accuse une légère baisse. S’agissant de la direction des antennes de l’audiovisuel public, les femmes sont minoritaires à France Médias Monde ainsi qu’à Radio France.

Au-delà de ces fonctions de premier plan, la parité est moins assurée, et elle l’est inégalement selon les métiers exercés. Par exemple, au sein du réseau France 3, les femmes sont plus présentes dans les fonctions de ressources humaines, d’administratrice de production et à la communication. Après une nette amélioration entre 2017 et 2020 la part des femmes dans les fonctions de rédacteur en chef sur France 3 se stabilise autour de 30% ; pour la même fonction à France Bleu, la parité est presque atteinte (48%). La part des femmes continue de progresser parmi les membres des conseils d’administration des entreprises de l’ensemble de l’audiovisuel public, depuis 2016.

En comparaison, au sein des 100 premières entreprises des secteurs culturels en termes de chiffre d’affaires en 2018, hors établissements publics et entreprises de l’audiovisuel public, on trouve moins d’une femme pour 6 hommes aux postes de président, directeur· général ou encore de gérant, au 1er janvier 2021. C’est dans le secteur de la presse que ce ratio est le plus faible (1 pour 10), et dans celui de la publicité qu’il est le plus élevé (plus d’une sur 3).

La part des femmes aux postes de direction des structures culturelles soutenues par le ministère de la Culture progresse

Au 1er janvier 2021, la part des femmes aux postes de direction des structures culturelles soutenues par le ministère de la Culture progresse. Fonds régionaux d’art contemporain, centres d’art, centres de développement chorégraphique, scènes nationales, centres chorégraphiques nationaux, orchestres, scènes de musiques actuelles, pôles cirques, centres dramatiques nationaux et régionaux, opéras, centres nationaux de création musicale, centres nationaux des arts de la rue… : les structures labellisées dans le cadre du programme Création artistique, hors structures nationales, connaissent une proportion de femmes à leur tête de 38 % en moyenne en 2021. Ce chiffre est en progression lente mais quasi constante depuis 2013. La parité s’observe à la direction administrative des orchestres tandis que les chefs d’orchestre restent très majoritairement masculins. La situation est particulièrement défavorable aux femmes dans les centres nationaux de création musicale, les scènes de musiques actuelles et les opéras. En revanche, elles sont beaucoup plus nombreuses que les hommes à la direction des centres chorégraphiques nationaux et plus nombreuses que les hommes à la tête des FRAC. Au 1er janvier 2018, elles dirigent particulièrement peu de structures au budget intermédiaire, notamment ceux compris entre 5 et 10 millions d’euros.
Dans les établissements de l’enseignement supérieur culture, les femmes restent minoritaires parmi les directeurs, surtout dans les écoles de spectacle vivant (26% en 2020).

Présence des femmes dans les programmations artistiques et dans les médias : les œuvres des femmes restent moins visibles, moins acquises et moins programmées que celles des hommes

Dans le secteur du spectacle vivant et de la danse, les femmes réalisent en moyenne 38% des représentations programmées, qu’elles interviennent en termes d’écriture, d’adaptation, de scénographie, de mise en scène, de chorégraphie ou de traduction. Les œuvres programmées écrites par une femme sont moins présentes (29 %) et c’est dans le domaine de la traduction des œuvres programmées qu’elles sont le plus représentées (44 %) ainsi que dans les fonctions de chorégraphe.
Dans la programmation des théâtres nationaux, la part des femmes autrices a progressé mais reste très faible : 26% en 2018-2019, contre 5% dix ans auparavant).

Sur environ 1 300 représentations d’opéra, moins d’une sur cinq est mise en scène par une femme au cours de la saison 2020-2021. Les créations féminines figurent davantage dans le répertoire destiné au jeune public (40%). Les femmes sont très minoritaires dans la direction musicale, l’écriture des livrets et surtout dans la composition.

Dans la programmation d’un échantillon de festivals emblématiques de musique en 2019, les femmes sont très minoritaires, avec 14% de femmes programmées dans les festivals de musiques actuelles, et 22% dans les festivals de musique classique.

Dans les arts plastiques, les acquisitions d’œuvres réalisées par des femmes par le Fond national d’art contemporain sont stables à 47% en 2019. Les œuvres de femmes acquises par les fonds régionaux d’art contemporain sont en baisse en 2019 (38 % contre 58 % en 2018), mais la série est fluctuante et il est difficile d’en dégager une tendance pour la période 2011-2019. La part des artistes femmes exposées dans les fonds régionaux a, quant à elle, augmenté sur la même période : elles représentent un peu moins d’un tiers des œuvres exposées en 2019, contre à peine un quart les années précédentes.
Pour les centres d’art une amélioration s’est dessinée en 2018 et on observe une baisse légère en 2019 avec 38% de femmes exposées. L’observation de quelques grandes expositions au cours de la période 2013-2019 montre que la parité est dépassée parmi les commissaires de ces expositions.

En 2019, dans le secteur du cinéma, les femmes réalisatrices de longs-métrages restent minoritaires, les trois quarts des films étant réalisés par des hommes. Cette part évolue peu depuis dix ans. Les femmes sont plus nombreuses en proportion à réaliser des courts-métrages (39 % en 2019, une part en augmentation sur dix ans).

En 2019, sur les 35 000 détenteurs de la carte de presse, 48 % étaient des femmes. Celles-ci sont un peu moins représentées dans les métiers de rédacteur en chef (40 %), de reporter photographe (23 %) ou de directeur de publication ou de rédaction (30 %). Elles sont au contraire surreprésentées parmi les secrétaires de rédaction (64 %) ou encore les producteurs et réalisateurs (62 %). L’effet de génération est très net : les femmes sont plutôt majoritaires jusqu’à l’âge de 45 ans mais sont minoritaires au-dessus de 46 ans.

En 2019, les femmes figurent de manière contrastée parmi les experts invités de programmes de télévision : la parité est atteinte à TF1 et pratiquement à France Ô. Par genre de programme, elles restent quelque peu plus présentes à l’antenne pour les fictions (41%) et les programmes de divertissement (40 %).

Observatoire de l'égalité entre les hommes et les femmes dans la culture et la communication, édition 2021, département des études, de la prospective et des statistiques, ministère de la Culture

 

Nominations, accès au soutien public… : les objectifs de la feuille de route 2020-2022

Outil pionnier dans le combat pour l'égalité mené par le ministère de la Culture, la feuille de route 2020-2022 dresse la liste des principaux objectifs à atteindre dans le secteur culturel. Deux d'entre eux ont été des marqueurs importants de cette période : la politique d'accès des femmes aux postes de direction ; et le conditionnement du versement des aides à la lutte contre les violences sexuelles et sexistes.

« À un objectif initial de progression de la part des femmes au sein des postes de direction, dont on constate la nette augmentation à la tête des établissements publics nationaux, s’ajoute désormais un arsenal d’actions concrètes ; en tête, figure le conditionnement du versement des aides à la lutte contre les violences sexuelles et sexistes. Ainsi, les structures de la musique, du cinéma, de l’audiovisuel et du jeu vidéo doivent désormais respecter des engagements précis pour obtenir des financements. D’autres secteurs culturels et artistiques (livre, spectacle vivant, arts visuels…) doivent suivre, à brève échéance  ».

Parmi les autres mesures visant à améliorer la représentation des femmes dans le monde culturel, on retiendra une des actions fortes du Centre national du cinéma (CNC). « Depuis le 1er janvier 2019, le CNC applique un bonus de 15 % au soutien financier mobilisé pour les films dont les principaux postes artistiques et techniques respectent la parité. L’extension de ce critère aux productions audiovisuelles ainsi que dans le cadre du fonds d’aide au jeu vidéo est envisagée. En parallèle, le Centre national de la musique (CNM) travaille à la mise en œuvre d’un dispositif qui liera le montant des aides allouées à la place des femmes dans les projets présentés par les institutions et entreprises du secteur musical ».