L’aquarelle et la peinture tiennent une place importante dans l’œuvre de Pierre Gatier. Mais, avec cette exposition programmée jusqu'au 3 octobre, le Musée a choisi de mettre en évidence l’œuvre gravée de l’artiste et montrer ainsi un autre visage du travail original et remarquable de ce peintre et graveur.
Près de 130 œuvres et documents ont été rassemblés selon un parcours chrono/thématique. Elles proviennent à la fois de la collection du musée d’Art et d’Histoire Louis-Senlecq, de la collection Jacques Doucet (grand couturier, collectionneur et mécène avec lequel Pierre Gatier entretint des liens étroits) conservée à l’INHA et des pièces en possession de la famille de l’artiste.
Cet artiste, en prise avec l’Histoire (la Belle Époque, la Première Guerre mondiale…) est aussi un artisan passionné qui parvint à révéler toutes les potentialités expressives des différents procédés de gravure qu’il aborda. Trois périodes, illustrant aussi trois techniques dominantes et différents centres d’intérêts iconographiques, sont présentées : de 1900 à 1914, les eaux-fortes et aquatintes en couleurs ; de 1915 à 1918, les linoléums et enfin de 1922 à 1931, les burins et pointes sèches.
La Promenade des Champs-Élysées 1910 Eau-forte et aquatinte en couleurs Épreuve d’état avec dessin en remarque H. 37.9 × L. 52.9 cm Paris, Bibliothèque de l’INHA, Collections Jacques Doucet, EM GATIER 41 e Crédits photographiques INHA: Bibliothèque de l’INHA, collections Jacques Doucet
Les aquatintes et eaux-fortes en couleurs (1900-1914)
Les aquatintes que Pierre Gatier réalise jusqu’en 1914 ont pour dominante le Paris de la Belle Époque. Figure centrale des œuvres de cette période, l’élégante incarne véritablement la vie parisienne. L’artiste est soucieux de représenter la mode de son époque et on le retrouve pour quelques planches dans les salons de couture de son mécène et ami, le couturier Jacques Doucet (1853-1929) dont il fait la connaissance en 1908.
Le couturier lui achète des estampes, dessins et aquarelles pour la collection de sa bibliothèque d’Art et d’Archéologie, ouverte au public en 1909. Les aquatintes en couleurs réalisées entre 1902 et 1914 par Pierre Gatier sont les plus largement représentées dans la collection Doucet; elles correspondent à la première période d’activité du graveur et sont contemporaines de la constitution du cabinet d’estampes (1906-1914) par le mécène et ses collaborateurs, dont Albert Vuaflart (1871-1927), son secrétaire et le premier directeur de sa bibliothèque. Vuaflart se lie également d’amitié avec Pierre Gatier, il voit en lui un véritable imagier de la société de son temps et encourage l’artiste à rédiger deux traités sur la gravure.
Revue navale du 4 septembre 1911 passée par le Président de la République à Toulon 1911 Eau-forte et aquatinte en couleurs H. 36.7 × 52.2 cm Paris, Bibliothèque de l’INHA, Collections Jacques Doucet, EM GATIER 53 Crédits photographiques INHA: Bibliothèque de l’INHA, collections Jacques Doucet
Les aquatintes en couleurs ont aussi pour thématique la mer. Fils et petit-fils de marins, Gatier entretient un rapport particulier avec celle-ci. Il est, de plus, nommé peintre officiel de la Marine en 1907. Au-delà de l’aspect artistique qui le lie à l’univers marin, Gatier intègre la Marine pendant la Première Guerre mondiale et notamment le service de camouflage, pour lequel il va réaliser de nombreuses recherches sur la couleur et rédiger des traités. C’est aussi à cette période qu’il se tourne vers une nouvelle technique de gravure, la gravure sur linoléum.
Les linogravures (1915-1921)
La Première Guerre mondiale marque une rupture dans l’œuvre de Pierre Gatier: il délaisse l’aquatinte en couleurs pour la linogravure en noir et blanc, radicalement différente esthétiquement parlant (taille très marquée et traitement brut des figures). Cette technique, qui s’est développée en Europe à la fin du XIXe siècle, se rapproche de la gravure sur bois d’un point de vue de la facture mais utilise un matériau peu onéreux, plus souple et facile à travailler. Bien que ce soit en premier lieu l’aspect pratique (peu de matériel et la possibilité de réaliser des petits formats facilement transportables) et financier qui pousse Gatier à se tourner vers la linogravure, les linoléums de l’artiste ont une réelle force expressive et témoignent aussi de l’impact du contexte de la guerre sur sa création. De 1915 à 1921, Pierre Gatier produit près d’une soixantaine de linogravures.
Tea for two, galerie des Champs-Élysées (Le Lido) 1928 Burin État définitif. Épreuve 11/30 H. 21.2 × L. 14 cm Collection Félix Gatier ©Collection Félix Gatier/ Jean-Michel Rousvoal
Les burins et pointes sèches (1922-1931)
Après la guerre, Pierre Gatier abandonne la linogravure et se tourne vers le burin et la pointe sèche. Il s’adapte ainsi à l’évolution du goût en matière d’estampe : si la technique de l’aquatinte qu’il affectionnait avant 1914 est un peu passée de mode, la gravure au burin connait un regain d’intérêt entre les deux guerres. Les cent trente pointes sèches et burins réalisés entre 1922 et l’année de la mort de Pierre Gatier, uniquement gravés au trait et en noir et blanc, sont de plus petits formats que les gravures de la Belle Époque. Dans une vingtaine de planches, on retrouve les sujets parisiens : les scènes de bars, music-halls et cinémas offrent des compositions complexes savamment ordonnées et témoignent de l’évolution de la culture urbaine. Parallèlement aux scènes de la vie parisienne, l’artiste réalise aussi des paysages de campagne, de mer ou de montagne inspirés par ses voyages et différents lieux de résidence.
Rencontre avec Caroline Oliveira, directrice du Musée de l'Isle-Adam
Pourquoi avoir répondu à l'appel à projet pour cette exposition ?
"Nous pensions que cette exposition par son sujet inédit - il s'agit en effet de la première exposition consacrée à l’œuvre gravé de Pierre Gatier et la première exposition d'envergure consacrée à cet artiste - pouvait parfaitement entrer dans le cadre de cet appel à projet. De plus, notre conseiller DRAC nous a vivement encouragé à participer à cet appel à projet et le service des musées de la DRAC Ile-de-France, très enthousiaste à la lecture de notre projet, nous a soutenu dans l’élaboration de celui-ci.
Vue d'une salle de l'exposition consacrée à Pierre Gatier © Musée d’Art et d’Histoire Louis-Senlecq
"travailler sur un sujet véritablement inédit"
La plupart des œuvres présentées n'ont encore jamais été montrées au public. La dernière exposition consacrée à Pierre Gatier a été organisée par le Musée Carnavalet en 1988 et elle se concentrait sur ses œuvres en lien avec la vie parisienne. Il s’agissait donc ici de travailler sur un sujet véritablement inédit.
Vue d'une salle de l'exposition consacrée à Pierre Gatier © Musée d’Art et d’Histoire Louis-Senlecq
Cet artiste, dont le musée possède une vingtaine d’œuvres dans ses collections (aquarelles, gravures et huiles sur toile) a rapidement suscité mon intérêt, en particulier sa production gravée. En découvrant le catalogue raisonné de son œuvre gravé (édité en 2004 par Félix Gatier, le fils de l'artiste) dans la bibliothèque du musée j'ai pu constater la richesse et l'originalité de cette production gravée.
Printemps. Mode, 1907 1907 Eau-forte et aquatinte en couleurs H. 31.4 × L. 19.9 cm Paris, Bibliothèque de l’INHA, Collections Jacques Doucet, EM GATIER 20 e Crédits photographiques INHA: Bibliothèque de l’INHA, collections Jacques Doucet
Ma rencontre en 2017 avec Rémi Cariel (co-commissaire de l'exposition, actuellement conservateur en chef du patrimoine, chargé des peintures, sculptures et arts graphiques au musée national des Châteaux de Malmaison et Bois-Préau), qui était alors chargé de valorisation des collections à l'Institut national d'histoire de l'art, a véritablement permis de lancer ce projet d'exposition. Pierre Gatier occupe une place importante au sein de la collection d’estampes de la bibliothèque de l’INHA : cent cinquante-cinq œuvres de l'artiste, issues des collections de Jacques Doucet, y sont en effet conservées. Pour l’INHA, ce projet d'exposition allait permettre de valoriser ce fonds sans équivalent d’estampes et de témoigner des liens de Pierre Gatier avec le couturier et collectionneur Jacques Doucet. Pour le musée d'Art et d'Histoire Louis-Senlecq il s'agissait de rendre hommage à cet artiste qui œuvra sur son territoire. La rencontre avec les descendants de l'artiste et les prêts exceptionnels qu'ils ont tout de suite consentis à faire au musée ont achevé de nous convaincre de réaliser ce beau projet d'exposition.
Chez le couturier ou Le Salon de M. Doucet, rue de la Paix 1911 Eau-forte et aquatinte en couleurs H. 26.9 × L. 45.4 cm Paris, Bibliothèque de l’INHA, Collections Jacques Doucet, EM GATIER 45 b Crédits photographiques INHA: Bibliothèque de l’INHA, collections Jacques Doucet
Avec votre équipe, quelles ont été vos premières réactions à l'annonce de cette distinction ? Comment l'avez-vous apprise ?
Nous avons été particulièrement heureux d'apprendre que le ministère de la Culture nous avait attribué ce label Exposition d'intérêt national. C'est notre conseiller pour les musées à la DRAC qui m'a contactée pour me faire part de cette très bonne nouvelle.
Autoportrait 1902 Pointe sèche H. 30 × L. 24.6 cm Paris, Bibliothèque de l’INHA, Collections Jacques Doucet, EM GATIER 2 Crédits photographiques INHA: Bibliothèque de l’INHA, collections Jacques Doucet
Pressentiez-vous que l'exposition consacrée à l'œuvre de Pierre Gatier serait labellisée ?
Nous l'espérions vivement et nous pensions avoir des chances de l'obtenir grâce à l'important travail scientifique entrepris et les différents partenariats mis en place pour réaliser cette exposition.
Comment s'organise-t-on pour réunir à la fois dans une exposition : un discours muséal innovant, une approche thématique inédite, une scénographie et un dispositif de médiation destinés aux publics les plus variés, tout particulièrement dans le cadre de l'éducation artistique et culturelle ?
Cette exposition s'insère tout d'abord dans le projet scientifique et culturel du musée qui vise notamment à valoriser les artistes ayant un lien avec notre territoire. Pierre Gatier a vécu à L'Isle-Adam et à Parmain, ville voisine, de 1920 à 1929. A L'Isle-Adam il s'est lié d'amitié avec le docteur Louis Senlecq qui est à l'origine de la création du musée adamois et notre collection compte une vingtaine d'œuvres de l'artiste.
Pierre Gatier est l’auteur d’une œuvre riche et protéiforme dans lequel l’aquarelle et la peinture tiennent une place importante. Mais à travers cette exposition, c’est l’œuvre gravé de l’artiste, dont le corpus varié révèle une véritable originalité, que nous avons choisi de mettre à l’honneur. Il s'agissait également de resituer la production de cet artiste dans l'histoire de l'estampe du début du XXe siècle ; cette contextualisation historique fait d'ailleurs l'objet d'un article de Marianne Grivel, professeur d'histoire de l'estampe et de la photographie (Centre André-Chastel, Sorbonne Université) dans l'important catalogue qui accompagne l'exposition.
"mettre en lumière les différentes techniques de gravures de Pierre Gatier"
Nous avons par ailleurs choisi de proposer un parcours chrono-thématique aux visiteurs afin de mettre en lumière les différentes techniques de gravures abordées par Pierre Gatier qui correspondent véritablement à des périodes précises de sa vie d'artiste : de 1900 à 1914, les eaux-fortes et aquatintes en couleurs qui ont pour thème principal la vie élégante parisienne ; de 1915 à 1918, les linoléums qui traduisent la dureté des temps et marquent une rupture stylistique avec les œuvres précédentes et enfin de 1922 à 1931, les pointes sèches et burins gravés uniquement au trait et en noir où l’on retrouve pour un temps les sujets de la vie parisienne, mais aussi et surtout les paysages du Val-d’Oise.
Très intéressé par les multiples potentialités de la gravure, Pierre Gatier est l'auteur de deux traités sur celle-ci : Traité de l’aquatinte en trois couleurs 1910-1920 et Sur la gravure, memento de ce que doivent savoir l’amateur d’estampes et le peintre-graveur (1926), il nous a donc semblé évident que l'exposition devait aussi aborder les recherches de l'artiste sur les techniques. Le traité de l'aquatinte et les planches d'illustrations du memento sont exposés, mais nous avons également choisi de présenter les différents états d'une estampe. Il nous a paru en outre essentiel d'expliciter au public les techniques de gravure complexes utilisées par Pierre Gatier, notamment par le biais de textes explicatifs et en montrant dès le début du parcours les différents outils et matériaux nécessaires à l'élaboration de l'aquatinte, du burin et de la pointe sèche.
U.S. Convoy 1918 Gravure sur linoléum H. 25.5 × L. 33.5 cm Collection Félix Gatier ©Collection Félix Gatier/ Jean-Michel Rousvoa
"une programmation pédagogique et culturelle avec des actions nouvelles"
D’autre part, pour la première fois le musée a mis en place un parcours de visite adapté au jeune public avec des cartels spécialement conçus pour les enfants. Les petits visiteurs sont ainsi guidés à travers l'exposition par une fillette tenant un ballon (un des personnages que l’on retrouve dans une des œuvres de Pierre Gatier). Un livret-jeux leur est également proposé.
L’Avenue du Bois de Boulogne 1911 Eau-forte et aquatinte en couleurs Épreuve d’état avec dessin en remarque H. 37.5 × L. 52.7 cm Paris, Bibliothèque de l’INHA, Collections Jacques Doucet, EM GATIER 44 Crédits photographiques INHA: Bibliothèque de l’INHA, collections Jacques Doucet
De plus, dans le cadre de notre programmation pédagogique et culturelle nous avons essayé de proposer des actions nouvelles. Nous avons notamment monté un partenariat avec l’École supérieure des arts et industries graphiques, École Estienne (Paris) afin de proposer une exposition hors les murs de travaux réalisés par les étudiants de première, deuxième et troisième année des professeurs de gravure de l’école, Caroline Bouyer et Louis Boursier. Dans ce cadre, les élèves ont travaillé sur trois des techniques de gravure abordées par Pierre Gatier : l’aquatinte en couleurs, la linogravure et le burin et les thématiques traitées par l'artiste ont elles aussi été revisitées.
Pour l’École Estienne cette initiative a permis aux élèves d’appréhender différentes techniques de gravure et de construire un projet d’exposition en partenariat avec une institution muséale (les élèves seront notamment les auteurs de l’affiche de cette exposition). Pour le musée d’Art et d’Histoire Louis-Senlecq cette collaboration avec un établissement d’enseignement supérieur à rayonnement national est intéressante à plus d’un titre puisqu'elle permet de faire dialoguer l’œuvre d’un artiste graveur du début du XXe siècle avec les travaux de la jeune création contemporaine et de valoriser, en outre, les métiers d’art. Cette exposition sera présentée du mercredi 2 au vendredi 11 juin au Château Conti à L'Isle-Adam.
Afin de diversifier notre offre auprès du public nous avons également fait appel à l'artiste et professeur de gravure à l’École Estienne, Caroline Bouyer à qui nous avons demandé de nous offrir son regard d'artiste graveur contemporain sur l'œuvre de Pierre Gatier. Ainsi, une visite commentée de l'exposition un peu différente d'une visite "classique" sera organisée en septembre en sa présence.
Nous avons également souhaité proposer une conférence sur le thème de la gravure à la Belle époque (période très représentée dans l'œuvre gravé de Gatier). Intitulée « Chronique de la Belle Époque illustrée par deux graveurs parisiens », elle sera conduite par Charlotte Lacour-Veyranne (attachée de conservation chargée des estampes, billets et cartes postales, Cabinet des Arts graphiques du musée Carnavalet-Histoire de Paris) et mettra en parallèle l'œuvre gravé de deux artistes parisiens présents dans les collections du musée Carnavalet avec celle de Gatier. Le jeune public pourra quant à lui participer à plusieurs ateliers en lien avec l'exposition au sein du musée.
Le Tournebride 1923 Burin H. 10 × L. 13 cm L’Isle-Adam, musée d’Art et d’Histoire Louis-Senlecq, don du docteur Pierre Terver, 1998 Inv. 2011.0.1092 ©Musée d’Art et d’Histoire Louis-Senlecq/Jean-Michel Rousvoal
Par ailleurs, dans le cadre du partenariat avec l'Institut national d'histoire de l'art, une journée d'étude consacré à l'estampe se tiendra à l'INHA le 22 juin ("L’estampe, un médium coopératif - Graveurs, imprimeurs, éditeurs entre 1890 et 1930").
Votre Musée organise à chaque fois des expositions ambitieuses. L''œuvre Pierre Gatier, à la fois artiste et artisan, est riche à plus d'un titre. Sont-ce les potentialités expressives des différents procédés de gravure qu’il aborda qui ont joué en sa faveur ?
Ses qualités de graveurs et les différents procédés techniques abordés par Pierre Gatier nous ont effectivement donné envie de lui consacrer une exposition et ont probablement aussi eu leur importance pour l'obtention du label. L'estampe est un médium encore méconnu du grand public et depuis plusieurs années le musée d'Art et d'Histoire Louis-Senlecq - qui possède un fonds d'estampes important dans ses collections (plus de 600 pièces) - le met à l'honneur notamment dans les accrochages renouvelés de ses collections, il s'agit cependant ici de la première exposition que l'institution consacre exclusivement à l'œuvre gravé d'un artiste.
Cette labellisation intervient-elle au bon moment dans le contexte actuel lié à la crise sanitaire ?
Cette labellisation est une réelle chance pour notre musée indépendamment du contexte actuel. Bien sûr, nous espérons qu'elle donnera envie au public de venir découvrir l'exposition et l'œuvre de Pierre Gatier dès que le musée rouvrira ses portes.
Et pour les publics, que peut représenter cette labellisation ?
Ce label distingue l'exposition Pierre Gatier (1878-1944). De l'élégance parisienne aux rives de l'Oise en soulignant son intérêt scientifique et son caractère original. Le public peut sûrement voir dans cette distinction du ministère de la Culture un gage de qualité. Nous n'avons pour le moment pas de retour du public sur cette labellisation, le musée étant actuellement fermé. Nous pourrons probablement en mesurer les effets quelques semaines après l'ouverture de l'exposition que nous espérons prochaine.
Le Super-film Metropolis 1927 Burin et pointe sèche État définitif. Épreuve 15/30 H. 14.5 × L. 20 cm Collection Félix Gatier © Collection Félix Gatier/ Jean-Michel Rousvoal
Le public qui fréquente le MAHLS, est-il composé majoritairement d'un public de proximité, d'habitués, de "fidèles" comme l'on dit ? Ou au contraire, un large public francilien qui s'étend bien au-delà de notre région ?
Le public du musée d'Art et d'Histoire Louis-Senlecq est majoritairement un public de proximité et d'habitués, néanmoins on constate que chaque exposition temporaire est différente, selon le sujet le public change quelque peu. Sur des expositions d'envergure comme par exemple l'exposition que nous avions consacrée à Jacques Henri Lartigue en 2019 (Fantaisies. Jacques Henri Lartigue, décors et haute couture), le public francilien était venu en nombre et nous avions également reçu plusieurs visiteurs étrangers.
Comment au quotidien avez-vous géré - depuis le début de la crise sanitaire - l'organisation du musée ? Comment vous êtes-vous adaptée ?
C'est avant tout le service des publics et les médiatrices du musée qui ont été le plus impactés par la crise sanitaire, puisque le cœur de leur métier, à savoir la médiation, ne pouvait plus se faire de la même façon. Il a donc fallu repenser notre manière d'entretenir un lien avec notre public.
Le service des publics du musée a ainsi réfléchi à différentes actions qu'il a pu proposer sur notre site Internet et sur la page Facebook du musée : ateliers à faire chez soi en lien avec les expositions et nos collections ; jeux ; posts sur des thématiques, des concepts, des techniques, etc. ; posts montrant la préparation de l'exposition consacrée à Pierre Gatier...
En direction des scolaires (écoles maternelles et primaires), nous avons créé des mallettes pédagogiques à emprunter afin que les enseignants puissent faire découvrir à leurs élèves le travail de Yang Ermin, artiste chinois contemporain spécialiste de la technique du lavis d'encre dont le travail a été présenté au musée du 19 septembre 2020 (exposition Yang Ermin. La réapparition de la couleur). Les thématiques du paysage et de la nature morte y étaient également abordées. Une mallette pédagogique en rapport avec l’exposition dédiée à Pierre Gatier est également en cours d’élaboration.
Enfin, depuis quelques semaines le musée propose une visite virtuelle en ligne de ses collections permanentes et dès à présent une visite virtuelle de l'exposition Pierre Gatier (1878-1944). De l'élégance parisienne aux rives de l'Oise est également mise en ligne sur notre site internet.
Sentez-vous un désir encore plus impatient de la part des visiteurs de voir à nouveau le MAHLS rouvrir ses portes par rapport aux deux précédents confinements ?
Nous avons effectivement beaucoup de retour du public en ce sens sur la page Facebook du musée notamment. Le public salue nos actions sur les réseaux sociaux et sur notre site Internet et semble impatient de retourner au musée et de découvrir la nouvelle exposition.
Est-ce d'abord la passion qui vous guide dans votre mission ?
La passion me guide nécessairement dans chacun des projets que je mets en place pour le musée d'Art et d'Histoire Louis-Senlecq de L'Isle-Adam. Redécouvrir les artistes de nos collections ou découvrir de nouveaux artistes constitue un des privilèges de mon métier et faire connaître leur travail et leurs œuvres au public est véritablement mon aspiration première. De plus, nous avons la chance d'avoir une collection riche de près de 4000 œuvres (peintures, sculptures, dessins, estampes, etc.) qui s'inscrit dans un territoire doté d'une histoire artistique forte, ce qui nous permet d'élaborer des projets ambitieux.
La Garenne (au-dessus de Parmain, Val-d’Oise) 1928 Burin État définitif. Épreuve 6/25 H. 14 × L. 21.3 cm L’Isle-Adam, musée d’Art et d’Histoire Louis-Senlecq, inv. 2011.0.862 ©Musée d’Art et d’Histoire Louis-Senlecq /Jean-Michel Rousvoal
Les projets que vous portez pour votre musée ?
Nous travaillons pour la fin de l'année sur un projet en partenariat avec l’École Nationale Supérieure d'Arts de Paris-Cergy (ENSAPC). Les étudiants de l’École ont été invités à proposer des œuvres picturales, sculpturales, sonores, installations ou projections en résonance avec une sélection d'œuvres issues des collections permanentes du musée. Trois projets, sur six présentés, ont été sélectionnés à l’issue d'un jury qui s'est réuni mi-avril. Cette initiative vise à promouvoir la jeune création contemporaine au sein d'une institution muséale du Val-d'Oise et à faire s'interroger de jeunes artistes sur une collection patrimoniale et sur la notion de musée. L'exposition "Regards croisés" aura lieu au musée d'Art et d'Histoire Louis-Senlecq du 7 novembre 2021 au 20 mars 2022.
En 2022, une exposition consacrée au travail de Claire Illouz, artiste valdoisienne peintre, dessinatrice et graveuse contemporaine sera présentée au musée et dans les années à venir nous avons de multiples projets, dont une exposition sur le peintre Emile Boggio (1857-1920) qui vécut à Auvers-sur-Oise et une autre sur l'affichiste Leonetto Cappiello (1875-1942) qui s'installa quelques temps à L'Isle-Adam.
Le musée d’Art et d’Histoire Louis-Senlecqde L’Isle-Adam
Façade avant du musée d’Art et d’Histoire Louis-Senlecq © musée d’Art et d’Histoire Louis-Senlecq
Le musée d’Art et d’Histoire Louis-Senlecq, riche de près de 4000 œuvres (peintures, sculptures, dessins, estampes, etc.), propose chaque année deux accrochages de ses collections permanentes et une exposition temporaire en lien avec l’histoire et le patrimoine locaux mais aussi tournée vers la création contemporaine.
La majorité des œuvres conservées par le Musée datent du XIXe et du XXe siècle, et le fonds s’articule autour de quatre axes principaux :
- les paysages des peintres des bords de l’Oise autour de la figure de Jules Dupré (1811-1889). Le musée conserve un des plus beaux ensembles d’œuvres de Jules Dupré (après ceux du musée du Louvre et du musée d’Orsay), l’un des plus célèbres paysagistes du XIXe siècle, qui, à l’instar de Corot (1796-1875), participe à l’évolution de l’art du paysage. Le nom de Jules Dupré est lié à celui de L’Isle-Adam ; la ville, sa campagne environnante et sa forêt domaniale sont en effet des éléments constitutifs de son œuvre.
- les dessins de paysages du peintre vedutiste Jules-Romain Joyant (1803-1854),
Joseph Le Guluche, Vase à la ronde de sirènes et de tritons, entre 1890 et 1908, terre cuite patinée bronze, L. 20 cm ; H. 50 cm ; P. 30 cm, Musée d’Art et d’Histoire Louis-Senlecq, L’Isle-Adam © musée d’Art et d’Histoire Louis-Senlecq
- les terres cuites issues des manufactures de terres cuites de L’Isle-Adam, avec l’important fonds de sculptures de Joseph Le Guluche (1849 -1915),
- les peintures et dessins du photographe et peintre Jacques Henri Lartigue (issus de la donation de l’artiste et sa femme en 1985 et 1986 et d’une mise en dépôt de la Fondation de France en 2001).
Un fonds important d’œuvres et de documents est également consacré à la présence des princes de Conti à L’Isle-Adam au XVIIIe siècle et au château qu’ils y édifièrent.
Informations pratiques
Musée d’Art et d’Histoire Louis-Senlecq 31, Grande Rue–95290 L’Isle-Adam Tel : 01 74 56 11 23 – 01 34 08 02 72
Jours et horaires d’ouverture : ouvert du mercredi au dimanche de 14 h à 18 h. Fermé le 1er mai et le 14 juillet.
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