Dans le cadre de la 3e édition de l’Été culturel, "Transplantation" s’implante dans le quartier Saint-Blaise du 20e arrondissement de Paris. Grâce au soutien de la DRAC Île-de-France, la galerie d’art accueille une exposition, une sélection documentaire ainsi qu’un programme socio-culturel intitulé “Club Transplantation” en partenariat avec le Centre Paris Anim’ Wangari Maathai.

"Transplantation", une aventure collective née de la vision d'Amandine Nana

En 2020, Amandine Nana décide de fonder "Transplantation" qui se présente à la fois comme une association, une bibliothèque ainsi qu’une galerie d’art basée à Paris. La jeune femme de 24 ans est attachée au caractère multiple de ce projet qu’elle a initié, et se rend bien compte que “Transplantation dessine les contours d’une institution artistique indépendante originale en France”. Véritable couteau suisse de "Transplantation", elle assure en parallèle de ses études un rôle transversal pour pérenniser les multiples projets portés par l’association : “c’est vrai que le projet part au début d’une vision personnelle donc j’assume plusieurs fonctions. Je suis directrice créative, j’assure le développement du projet dans sa globalité, je suis curatrice des expositions, responsable de la programmation, productrice, chargée de la communication, éditrice. Je supervise la dimension administrative et coordonne la dimension partenariale également.

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Elle peut compter sur une équipe dynamique de jeunes entre 20 et 25 ans issus de milieux sociaux et de formations diverses : “des étudiants en art, en politiques publiques, en management, en sociologie ou encore en géographie m’accompagnent depuis le début dans la concrétisation de cette vision qui est devenue une vision commune. Finalement, cette expérience nous mène aussi collectivement à réfléchir plus largement sur l’état du paysage culturel et social français”. La création de cette structure est née d’une frustration, celle d’une étudiante au parcours pluridisciplinaire en sciences humaines, en histoire de l’art et en urbanisme, qui rencontrait des difficultés à trouver des ressources liées à l’Afrique et à sa diaspora. 

C’est ce sentiment de manque qui est à l’origine de "Transplantation" : “le projet est d’abord né en tant que fonds documentaire dans le souci de progressivement créer des ressources accessibles à tous et participer de ce fait à décloisonner les imaginaires. Ensuite, la galerie d’art est née du constat qu’il y avait encore trop peu de galeries d’art qui valorisent la création artistique française sous le prisme des identités diasporiques”. L'initiative se situe à mi-chemin entre le projet culturel et social. En tant qu’association, elle souhaite qu’un public populaire, parfois éloigné des pratiques artistiques, puisse se retrouver dans les œuvres exposées à la galerie.

Les enjeux d’accès à l’art et d’inclusion ont une place importante dans les actions menées par l’équipe "Transplantation" :

“Nous souhaitions aussi participer à la promotion des valeurs de diversité au sein du monde culturel français” Amandine Nana

Le souci d’ancrer cette vision artistique dans la réalité sociale est au cœur du projet porté par l’équipe "Transplantation" dans le cadre de cette troisième édition de l’Été culturel. Depuis son lancement en 2020, le programme porte une attention particulière aux quartiers populaires et à leurs habitants.

"Transplantation", un engagement pour l’éducation populaire, artistique et culturelle 

Cet été, "Transplantation" s’est installé dans le quartier populaire de Saint-Blaise dans le 20e arrondissement, deux ans après un premier espace éphémère à Montparnasse. Là encore le choix du lieu n’est pas anodin pour Amandine Nana et son équipe : “nous avons pensé nos ateliers en partenariat avec le Centre d’animation Wangari Maathai afin de ne pas être un projet hors-sol mais de s’inscrire dans le paysage socioculturel déjà existant du quartier Saint-Blaise”. Tout au long de la période estivale, "Transplantation" propose des ateliers d’initiation à la photographie et au dessin : “ce sont des ateliers qu’on pense comme des leviers de développement personnel et de valorisation des valeurs d’interculturalité à destination du jeune public” .

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Dana Cavigny, étudiante de 21 ans à l’École nationale supérieure d’art de Paris-Cergy, expose à la galerie éphémère dans le cadre de l’exposition “Sentiments grandissants”. Elle anime certains ateliers et transmet sa passion aux plus jeunes : “on dessine quand on est petit à l’école, mais moi je ne me suis jamais arrêtée en fait… c’est vraiment ma passion”. Les ateliers conduits par Dana Cavigny s’organisent autour de la thématique du souvenir qui est au cœur de ses œuvres et des expositions en cours à la galerie. “Je travaille sur les souvenirs que ce soit quand je fais de la peinture ou du dessin. J’aime beaucoup les souvenirs d'enfance et je me base sur les albums photos qu’on retrouve dans les cartons. Je travaille aussi l’oubli de soi parce que souvent je me rappelle des lieux, mais je ne me souviens pas toujours de la personne que j'étais à ce moment-là”.

Le 22 juillet dernier, les enfants, enthousiasmés, se relaient autour de la table dans le centre Wangari Maathai pour écouter les conseils de l'artiste. Une consigne à suivre : dessiner un souvenir heureux avec ses amis ou sa famille et se dessiner soi-même au crayon à papier tout en faisant vivre les autres personnages avec des couleurs. “Je suis contente que les jeunes puissent faire des activités créatives et manuelles. C’est bien de faire des choses avec ses mains. Moi j’ai même pas pu partir en vacances, avoir la possibilité d’aller à la galerie, feuilleter les livres, ça fait du bien même quand je ne fais pas la médiation. C’est un lieu de rencontre, on se retrouve ensemble dans cette période où il est facile de se sentir seul quand on ne part pas en vacances”.

L’exposition “Sentiments grandissants” : une célébration des expressions créatives diasporiques

Pour l’exposition “Sentiments grandissants”, Amandine Nana et Mariama Conteh, co-curatrices, ont réuni six artistes dont elles suivaient déjà attentivement le travail pour les intégrer à ce récit collectif autour des souvenirs diasporiques, des émotions et des identités. En lui donnant le titre d’une musique qui a marqué leur enfance, elles ont souhaité faire de cette exposition un espace d’exaltation du lien florissant entre un public de plus en plus diversifié et des artistes émergentes aux pratiques hybrides. Massabielle Brun est l’une des six artistes qui participent à l’exposition.

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Une première pour la jeune femme, récemment diplômée des Beaux-Arts de Saint-Nazaire, qui prend part au projet avec enthousiasme : “Transplantation c’est aussi un endroit où mon travail peut exister en toute légitimité. C’est vrai que quand on travaille sur des sujets comme son histoire familiale, ses origines, la banlieue et le fait d’être une personne noire, on peut rapidement remettre en question notre légitimité à évoluer dans des espaces comme les écoles d’art et les lieux culturels”. Son fort attachement aux archives et à la transmission se ressent dans sa production artistique qui mêle photographie, teinture et sculpture pour mettre en récit son histoire.

"Mon œuvre est le résultat d’un questionnement autour d’une archive familiale qui est une photo de ma grand-mère à la fin des années soixante au Togo ou au  Bénin. C’est surtout une métaphore de toutes ces questions de légitimité que je me suis posées par rapport à mes origines, mon exil, ma famille ou encore ma pratique artistique" Massabielle Brun

En parallèle de l’exposition, Massabielle Brun participe au programme de mentorat organisé par "Transplantation". En tant que diplômée faisant ses premiers pas dans le monde artistique, le soutien de la DRAC Île-de-France est pour elle une belle opportunité : “cette aide est importante pour soutenir les jeunes artistes surtout dans les premières années d’entrée dans la vie professionnelle. Grâce à ces six semaines d’exposition, j’ai beaucoup appris et j’appréhende l’avenir avec beaucoup d'optimisme et de détermination. Cette exposition c’est aussi et avant tout énormément d’amour et de soutien. J’ai l’impression que de belles aventures m’attendent.

L’Été culturel, une reconnaissance de l'action menée depuis 2020 par l'association

Le "Club Transplantation" participe à l’animation du 20e arrondissement parisien et prend place dans la programmation de l’Été culturel avec fierté. “Cette aide du ministère de la Culture dans le cadre de l'Été culturel représente symboliquement un moment important pour nous et une reconnaissance de notre travail et de l’originalité de notre projet. Ce soutien précieux nous a permis d’accompagner la production de l'exposition, d’organiser les ateliers, rémunérer les intervenants et documenter le projet au mieux. C’est un bel appui pour promouvoir notre jeune scène artistique”. Dana Cavigny, qui espère prochainement être diplômée de l'ENSAPC, renchérit : “cette année j’ai beaucoup réfléchi à ce que je ferai une fois mon diplôme obtenu. En tant qu'artiste, l'avenir est assez incertain donc savoir que ce genre de dispositif existe, ça apporte un peu plus de sérénité. Cette possibilité d’avoir des aides publiques comme celle-ci est très rassurant”.

Dans les mois à venir, Amandine Nana souhaiterait voir "Transplantation" s’implanter durablement dans un quartier parisien de la politique de la ville et continuer à toucher un public transgénérationnel, à travers divers ateliers, expositions, résidences artistiques ainsi que des visites de lieux culturels.

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Crédits : photos 1, 2, 4 Ryan Krizoua - Transplantation ; photos 3, 5, 6 Christiane Fagbemi - DRAC Île-de-France

 

Plus d'infos : https://transplantationproject.com/