"Le rire est une chose sérieuse avec laquelle il ne faut pas plaisanter". Parce qu’on ne plaisante pas non plus avec Raymond Devos, Elliot Jenicot se met à nu dans un spectacle très personnel sur le génial humoriste : "Les fous ne sont plus ce qu'ils étaient". Avant-première le 15 mars au ministère de la Culture et de la Communication dans le cadre de la Semaine de la langue française et de la Francophonie.

Il prévient d'emblée. Il ne s'agissait pas de me mesurer à cet immense artiste qu'est Devos, de prendre le style Devos, mais de jouer Devos comme je jouerais Molière, dans sa dimension textuelle et théâtrale. De m'emparer de ses textes comme d'une matière littéraire que je pourrais m'approprier. Pour monter son spectacle-montage, Les fous ne sont plus ce qu'ils étaient, au Studio-Théâtre de la Comédie-Française, entre le 30 mars et le 10 avril, Elliot Jenicot a exploré minutieusement l’œuvre de Raymond Devos – sa folie douce, ses emportements magnifiques, ses monologues hallucinés, son amour de la langue et, bien sûr, ses fameux jeux de mots. Il a aussi déniché des sketches inédits tels que « Mon chien, c'est quelqu'un », « La protection des espaces vides », « Le virus du tueur » ou. « Les fous ne sont plus ce qu'ils étaient », qui donnent son titre au spectacle. Ensuite, il lui a fallu endosser les textes de Devos, les faire entrer dans son univers d’acteur, avec sa propre diction, sa propre musicalité. Il y raconte sa propre histoire, avant et après son entrée à la Comédie-Française : l'histoire du basculement d'un monde dans un autre.

Je me suis pleinement retrouvé, en tant qu'homme et en tant qu'acteur, dans ces textes qui, pour ainsi dire, entraient dans tous mes pores

Avant d'entrer à la Comédie-Française en 2011, Elliot Jenicot a fait du mime, du théâtre de rue, du cirque, du music-hall. Il écrivait et interprétait ses propres textes et numéros. En intégrant la troupe des Comédiens-Français, il apprend à servir les textes des autres : ceux des grands classiques. En 2014, il présente une « carte blanche » à Raymond Devos au Théâtre du Vieux-Colombier. Une lecture qui est devenue, deux ans plus tard, le spectacle en solo présenté en avant-première, le 15 mars, dans le cadre de la Semaine de la langue française et de la Francophonie. Rien de surprenant, dans cette rencontre  : entre Elliot Jenicot et Raymond Devos, il y a comme une filiation. Devos, on le sait, vient du music-hall, il adorait les mimes, les acteurs burlesques. Il a la précision du mot, Jenicot, celle du geste. Les mots de Raymond Devos – le Devos de l'absurde et non plus du seul jeu de mots – trouvent donc facilement leur chemin dans l'esprit et le corps d'Elliot Jenicot. Je me suis pleinement retrouvé, en tant qu'homme et en tant qu'acteur, dans ces textes qui, pour ainsi dire, entraient dans tous mes pores. Le spectacle se termine sur un texte magnifique de Devos, « L'Artiste ». Sur une mer imaginaire, tout artiste en quête d'absolu joue les naufragés volontaires, il est là sur sa planche qui oscille...