Exposition phare de la saison estivale dédiée par Le Palais de Tokyo à l’enfance, « Encore un jour banane pour le poisson-rêve » met à l’honneur les œuvres d’artisans d’art et d’artistes contemporains ayant pour thème les imaginaires de l’âge tendre, ses mythes fondateurs et ses transformations contemporaines.

Les larges masques de laine de l’artiste Caroline Achaintre accueillent le visiteur, qui les contemple avec un mélange de curiosité et d’inquiétude. L’ambiguïté de ces œuvres murales richement colorées et dotées de traits brouillés, les place à mi-chemin entre le rêve et le cauchemar, le familier et l’étrange. Au centre de cette première salle, exposé aux regards de ces chimères hirsutes, se dresse un délicat corps d’enfant sculpté par Kiki Smith. La jeune fille fait face aux monstres, les bras grands ouverts. Elle évolue, semble-t-il, à leurs côtés.

Cette entrée en matière en dit long sur le parti pris de l’exposition « Encore un jour banane pour le poisson-rêve », proposée par le Palais de Tokyo jusqu’au 9 septembre, dans le cadre d’une programmation estivale placée sous le signe de l’enfance. Destinée à un public sans âge, elle s’adresse tantôt aux enfants, tantôt aux adultes grâce aux différents niveaux de lecture auxquels elle se prête. « Nous tenions beaucoup à cette polysémie des œuvres, à ne pas les circonscrire au domaine restreint de l’enfance », analyse Yoann Gourmel, commissaire de l’exposition aux côtés de Sandra Adam-Couralet et Kodama Kanazawa, dans une interview accordée au magazine Transfuge.

Pour les découvrir, il faut s’acheminer le long d’un circuit fantaisiste qui se déroule sur plus de 3000m2, suivant une mise en scène imaginée par Clément Cogitore. « Au sein de cette exposition un certain nombre d’espaces font office de passages, de portes, et ponctuent le parcours du visiteur à la manière des chapitres d’un livre », explique l’artiste et réalisateur dans l’émission La grande table d’été de France Culture. « Ces derniers sont produits par des artisans d’art qui travaillent le carton, le métal, la mosaïque, la pierre… ».

Dans le cadre de son partenariat avec la Fondation Bettencourt Schueller, qui s’attache à valoriser les professionnels des métiers d’art, le Palais de Tokyo met en effet à l’honneur des savoir-faire inédits. Ainsi, des mains d’un maître plisseur, naît un monstre en écaille dissimulé dans la pénombre, tandis que, sous l’impulsion d’un ébéniste, une chambre toute entière prend vie et enferme le visiteur au rythme de l’étrange respiration de ses murs. Le lourd rideau rouge qui sépare les deux niveaux de l’exposition s’anime lui aussi, comme hanté par un fantôme, invoqué pour l’occasion par la Manufacture royale Bonvallet… « Tout cela relève de trucages très simples, qui continuent à fonctionner car l’œil a envie de croire en la magie. C’est quelque-chose qui remonte à l’enfance… Et puis on passe, on se retourne et on comprend que cette magie a été fabriquée, produite, mise en scène », souligne Clément Cogitore.

Les artistes ne sont pas en reste, et rivalisent, eux aussi, d’audace créatrice. Le visiteur se retrouve plongé dans des jeux d’échelles avec d’un côté des œuvres situées à hauteur d’enfants et de l’autre de saisissantes installations grand formats. Invité à explorer la large zone grise qui sépare l’émerveillement du désenchantement, il redécouvre l’envers de cette enfance si souvent fantasmée et présentée à tort comme une bulle protectrice, imperméable au reste du monde. « On a voulu échapper aux représentations édulcorées, aux schématismes trop binaires qui opposent enfant-roi et enfant victime, qu’on trouve dans les médias », précise Yoann Gourmel. Pari réussi : l'exposition « Encore un jour banane pour le poisson-rêve » rend justice à la complexité de cette période qu’elle ancre dans le monde contemporain, et déconstruit avec adresse les archétypes qui lui sont associés.

Japonismes 2018 : les âmes en résonance

L’année 2018 marque le 160e anniversaire des relations diplomatiques entre le Japon et la France, ainsi que le 150e anniversaire du début de l’ère Meiji lorsque le pays s’ouvrit à l’Occident.

Portée par les gouvernements français et japonais, Japonismes 2018, une riche saison culturelle nippone, est un petit bout de Japon qui prend ses quartiers à Paris, en Île-de-France et dans toute la France de juillet 2018 à février 2019. Expositions, théâtre, concerts, cinéma, gastronomie, art de vivre, danse… Plus de cinquante événements sont, à cette occasion, amenés à investir les plus grandes institutions culturelles.

Conçue avec la commissaire d’exposition Kodama Kanazawa et co-organisée avec la fondation du Japon, l’exposition « Encore un jour banane pour le poisson rêve » fait partie de cette manifestation. L’occasion pour le visiteur d’apprécier les œuvres d’une vingtaine d’artistes internationaux, dont six artistes japonais, et de découvrir une collaboration inédite avec le dessinateur de manga Yûichi Yokoyama.