Les différentes phases de construction du chateau d'Arques la Bataille
Pont de la porte de secours et les deux tours ©DRAC Normandie, J. Dupart
Le château se caractérise par un plan ovoïdal. Il est entouré d’un fossé sec avec un profil en V de plus de 15 mètres de profondeur. Le donjon à plan carré atteint les 40 mètres de hauteur. Il se compose de deux cours séparées par la porte primitive et délimitées par des murs de courtine. La région est faible en pierre de taille. C’est la raison pour laquelle le silex, le calcaire, le grès et la brique sont les principaux matériaux que l’on retrouve dans les constructions de la région.
Guillaume le Bâtard élève le château au XI e siècle. L’enceinte A est réalisée en rognons de silex noyés dans un mortier de chaux et de sable à gros grain.
Quant à la deuxième phase de travaux, elle est entreprise par le fils de Guillaume le conquérant, Henri Ier Beauclerc roi d‘Angleterre (1100-1135) et duc de Normandie (1106-1135) durant la période des rois Plantagnêts. C’est en 1123 que la tour maîtresse et l’enceinte B primitive sont construites tout comme la tour-porte, la porte du Valemelle et le creusement du fossé. C’est durant cette période que l’on commence à utiliser du tuf calcaire mais aussi du grès. Le mortier est beige-rosé.
La troisième phase de construction correspond à l’adaptation de la défense ordonnée par Jean sans Terre roi d’Angleterre (1199-1216) notamment de l’enceinte A ; et par la construction de souterrains. Les tours sont rattachées à l’enceinte primitive. Entre 1154 et 1204, le flanquement de l’enceinte est mis en place progressivement sous les rois Plantagenêts. À cette même époque, on construit trois tours à archères au sud de l’édifice et une ceinture défensive que l’on réalise à mi-pente du fossé. La création des souterrains est antérieure au flanquement d’enceinte, signalée entre 1205-1212 puisque Philippe Auguste demande leur obstruction.
La quatrième phase de travaux adapte le château aux nouveaux besoins liés à l’artillerie entre 1455-1522. Cette phase s’amorce avec la construction de la tour Boulet et la tour Henri IV. Des canonnières sont ajoutées aux tours.
Ce château est typique de l’époque dans l’espace anglo-normand. Il est un exemple de l’adaptation à l’artillerie du XVe siècle. Le château a évolué en fonction de son usage défensif. Il est un des rares exemples d’une « architecture de transition » du début du XVIe siècle par ses ouvrages de briques. L’ensemble est classé en 1875 au titre des monuments historiques.
Donjon du château ©DRAC Normandie, J. Dupart
Les personnages qui ont marqué l'histoire du chateau d'Arques la Bataille
Guillaume le Conquérant : À la tête du duché de Normandie, Guillaume le Bâtard, futur le conquérant (~1027- ~1087) fait de son oncle Guillaume d’Arques (~1026- après 1054) déjà vicomte d’Arques, vicomte de Talou. Le château est assiégé par Guillaume le bâtard qui fait capituler son oncle rebel grâce à la famine. Celui-ci participe à la révolte des seigneurs normands. Cette révolte trouve son origine dans la jeunesse du duc, élevé à ce rang à l’âge de 8 ans. Les barons normands profitent donc de son jeune âge pour mener leurs propres guerres et se libérer de sa tutelle, menant des complots contre lui. Néanmoins, Guillaume le Bâtard revient à la charge pour remettre de l’ordre dans son duché face aux seigneurs normands mais aussi contre Henri Ier, roi de France (1031 - 1060). Depuis, toute construction de fortification doit passer par l’accord du duc.
Henri Ier Beauclerc : Henri Ier Beauclerc est à l’origine de la deuxième phase de travaux du château. C’est à la suite de la mort d’Henri Ier Beauclerc, le plus jeune des fils de Guillaume le Conquérant, qu’Etienne de Blois s’empare du trône d’Angleterre et donc du duché de Normandie.
Henri IV : Le XVIe siècle est synonyme des guerres de Religion (1562-1598). Les canons d’Henri IV permettent la victoire des Béarnais à la célèbre bataille d’Arques contre les troupes catholiques portées par le duc de Mayenne le 21 septembre 1589.
Louis XIV : Après avoir abrité une garnison mais aussi des villageois cherchant refuge, Louis XIV déclare en 1631 le château inhabitable. Il sert de carrière de pierre le siècle suivant notamment pour Monsieur de Clieu afin qu’il construise son manoir Duchigny.
La famille Reiset : Le château est déclaré impropre vers 1708. Il est vendu comme « bien national » en 1793 comme beaucoup d’autres lieux à cette époque. La famille Reiset rachète le château en 1836 aménageant même un bureau dans une des tours ainsi que le bas-relief de la porte-primitive en 1845 et restaure le château.
Restauration et entretien
Le château d’Arques-la-Bataille appartient à l’État et est affecté au ministère de la Culture. Depuis les années 1990, des travaux d’entretien sont réalisés (débroussaillage, maçonnerie pour consolider les tours et les murs, etc.) et assurés par le service de l’Unité départementale de l’architecture et du patrimoine de la Seine-Maritime et également l’architecte des Bâtiments de France conservateur du site. L’État entreprend des travaux de restauration et de consolidation depuis sa fermeture au public dans les années 2000.
En 2004, des réparations de la courtine Est proche de la tour Reiset sont effectuées. En 2011, les courtines du bayle, les pieds de maçonnerie des tours et de la pile n°1 de la porte de Valmelle sont repris.
C’est en 2013 que débutent des campagnes de restauration de plus grande ampleur. La reprise du mur d’enceinte et des fossés sud-est a lieu de septembre 2015 à janvier 2016 par l’Architecte en chef des Monuments Historiques.
En 2018, une campagne de restauration de la porte primitive et de son bas-relief est réalisée. En effet, les ruines, en général, sont victimes du développement des végétaux favorisé par le climat normand. De plus, le château ayant servi de carrière de pierre à partir de la seconde moitié du XVIII e siècle, certaines parties comme le parement en pierre ont été démontées fragilisant ainsi la structure. Le bas-relief est également victime de fissures et de l’érosion menant jusqu’à la perte de fragments. Il y a une réelle volonté de conserver les caractéristiques des ruines notamment en conservant des mortiers anciens. Cette restauration a permis de mettre à jour des vestiges : vestige de la courtine du XI e siècle, anciennes casemates, le dispositif d’accès à l’étage et une citerne circulaire en béton avec le service régional de l’archéologie.
Entre mars 2022 et 2024, des travaux d’urgence et de sécurisation de la courtine Est entre les tours A7 et A11 ont été engagés. Le parti pris de restauration pour la courtine Est est de traiter la consolidation en arrachements des maçonneries de type silex, briques, moellons de pierres calcaire et coulinage de mortier de chaux pour le remplissage. La question du mélange des matériaux d’origine avec la brique est primordiale afin de garder l’esthétique de la ruine.
The construction phases of the Arques la Bataille castle
Located a few kilometers south of Dieppe on a rocky spur, the feudal castle of Arques-la-Bataille reveals its ruins. It bears witness to the rich Norman medieval period where its history and that of England were closely linked. It was built in the 11th century between 1040 and 1053 by Guillaume de Talou.
Restored original door ©DRAC Normandie, J. Dupart
Construction phases of the castle
The castle is characterized by an ovoid plan. It is surrounded by a dry ditch with a V-shaped profile more than 15 meters deep. The square keep reaches 40 meters in height. It consists of two courtyards separated by the original gate and delimited by curtain walls. The region is low in freestone. This is the reason why flint, limestone, sandstone and brick are the main materials found in construction in the region.
William the Bastard raised the castle in the 11th century. Enclosure A is made of flint kidneys embedded in a mortar of lime and coarse-grained sand.
As for the second phase of work, it was undertaken by the son of William the Conqueror, Henry I Beauclerc, King of England (1100-1135) and Duke of Normandy (1106-1135) during the period of the Plantagnet kings. It was in 1123 that the main tower and the original enclosure B were built, as were the gate tower, the Valemelle gate and the digging of the ditch. It was during this period that we began to use limestone tuff but also sandstone. The mortar is pinkish-beige.
The third phase of construction corresponds to the adaptation of the defense ordered by John Lackland, King of England (1199-1216), in particular of enclosure A; and by the construction of underground passages. The towers are attached to the original enclosure. Between 1154 and 1204, the flanking of the enclosure was gradually put in place under the Plantagenet kings. At the same time, three arch towers were built to the south of the building and a defensive belt was built halfway up the ditch. The creation of the underground passages predates the flanking of the enclosure, reported between 1205-1212 since Philippe Auguste requested their obstruction.
The fourth phase of work adapted the castle to the new needs linked to artillery between 1455-1522. This phase begins with the construction of the Boulet tower and the Henri IV tower. Gunboats are added to towers.
This castle is typical of the period in the Anglo-Norman area. It is an example of adaptation to 15th century artillery. The castle evolved according to its defensive use. It is one of the rare examples of “transitional architecture” from the beginning of the 16th century with its brick works. The whole complex was classified in 1875 as a historic monument.
The main characters who marked the history of the château
William the Conqueror: At the head of the Duchy of Normandy, William the Bastard, future conqueror (~1027- ~1087) made his uncle William of Arques (~1026- after 1054) already Viscount of Arques, Viscount of Talou. The castle is besieged by William the bastard who makes his rebel uncle capitulate thanks to famine. He participated in the revolt of the Norman lords. This revolt finds its origins in the youth of the duke, raised to this rank at the age of 8. The Norman barons therefore took advantage of his young age to wage their own wars and free themselves from his tutelage, leading plots against him. Nevertheless, William the Bastard returned to the charge to restore order in his duchy against the Norman lords but also against Henry I, king of France (1031 - 1060). Since then, any fortification construction must go through the agreement of the Duke.
Henri I Beauclerc: Henri I Beauclerc is at the origin of the second phase of work on the castle. It was following the death of Henry I Beauclerc, the youngest son of William the Conqueror, that Stephen of Blois seized the throne of England and therefore the Duchy of Normandy.
Henri IV: The 16th century is synonymous with the Wars of Religion (1562-1598). The cannons of Henry IV enabled the victory of the Béarnais at the famous battle of Arques against the Catholic troops led by the Duke of Mayenne on September 21, 1589.
Louis XIV: After having sheltered a garrison but also villagers seeking refuge, Louis XIV declared the castle uninhabitable in 1631. It served as a stone quarry the following century, notably for Monsieur de Clieu to build his Duchigny manor.
The Reiset family: The castle was declared unfit around 1708. It was sold as “national property” in 1793 like many other places at that time. The Reiset family bought the castle in 1836, even setting up an office in one of the towers as well as the bas-relief of the original door in 1845 and restored the castle.
Restoration and maintenance
The castle of Arques-la-Bataille belongs to the State and is assigned to the Ministry of Culture. Since the 1990s, maintenance work has been carried out (clearing brush, masonry to consolidate the towers and walls, etc.) and carried out by the service of the Departmental Unit of Architecture and Heritage of Seine-Maritime and also the architect of Bâtiments de France, curator of the site. The State has undertaken restoration and consolidation work since its closure to the public in the 2000s.
In 2004, repairs to the eastern curtain wall near the Reiset tower were carried out. In 2011, the bayle curtain walls, the masonry feet of the towers and pile no. 1 of the Porte de Valmelle were taken over.
It was in 2013 that larger-scale restoration campaigns began. The resumption of the surrounding wall and the southeast ditches took place from September 2015 to January 2016 by the Chief Architect of Historic Monuments.
In 2018, a campaign to restore the original door and its bas-relief was carried out. In fact, the ruins, in general, are victims of the development of plants favored by the Norman climate. In addition, the castle having served as a stone quarry from the second half of the 18th century, certain parts such as the stone facing were dismantled, thus weakening the structure. The bas-relief is also the victim of cracks and erosion leading to the loss of fragments. There is a real desire to preserve the characteristics of the ruins, particularly by retaining old mortars. This restoration made it possible to uncover remains: vestige of the 11th century curtain wall, old casemates, the access system to the upper floor and a circular concrete cistern with the regional archeology service.
Between March 2022 and 2024, emergency and security work on the eastern curtain wall between the A7 and A11 towers was undertaken. The restoration approach for the eastern curtain wall is to deal with the consolidation by removal of masonry such as flint, bricks, limestone rubble and pouring of lime mortar for filling. The question of mixing the original materials with the brick is essential in order to maintain the aesthetics of the ruin.
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