1.Vence - Maison Arman
références documentaires : Pré-inventaire des Trente Glorieuses - Alpes-Maritimes, 2005-2008
dénomination : Architecture domestique, villas
rédacteurs : Jean-Lucien Bonillo, Eve Roy / Laboratoire INAMA / ENSA Marseille
auteur, date : Guy Rottier ingénieur, architecte, 1968
protection, label : édifice non protégé
Historique :
Né en 1922, Guy Rottier obtient son diplôme d'ingénieur à La Haye en 1946 et son diplôme d'architecte DPLG en 1952 à Paris. Parallèlement à ces années de formation, il collabore avec Le Corbusier pour la réalisation de l'Unité d'Habitation à Marseille. Dans les années 1950, il travaille également et successivement avec Jean Prouvé, Vladimir Bodiansky, André Sive et Marcel Lods. Fort de ces multiples expériences, Guy Rottier ouvre de 1955 à 1957 un bureau d'étude d'urbanisme à Paris, puis de 1958 à 1969 un bureau d'architecture à Nice, avec son frère François. Il sympathise alors avec les artistes de la Nouvelle Ecole de Nice et en devient le seul membre architecte.
Dans le courant des années 1960, son ami le peintre Arman (Armand Pierre Fernandez, 1928-2005) lui commande une maison à Vence. Arman souhaite une villa inspirée du projet de "Maison Evolutive Escargot" développé en 1965 par l'architecte et promet de lui laisser toute liberté dans la conception et la réalisation de la maison. Le terrain, orienté au Sud, est en forte pente (30%). Il est situé en contrebas de la parcelle et de la maison du père d'Arman. Le peintre souhaite une construction suffisamment basse et intégrée au paysage pour ne pas gêner la vue sur la mer dont son père disposait.
Description :
Guy Rottier, aidé par l'ingénieur structure Marc Strazzieri, aménage le site en creusant une sorte d'amphithéâtre au Nord de la pente, formant une cour par laquelle on entre dans la maison. Le plan est disposé d'Est en Ouest, afin de dégager, au Sud, une façade vitrée largement ouverte sur le paysage et la mer. La maison comporte un seul niveau, elle est semi-enterrée et les deux seules façades (Nord et Sud) sont entièrement vitrées. Sur une surface longitudinale de 115 m2, l'architecte dispose le salon-salle à manger au centre, la chambre et le cellier aux extrémités, la cuisine et la salle de bains dans les zones intermédiaires.
Les séparations d'espace sont matérialisées par des voiles de béton obliques, excepté pour la salle de bains qui constitue un volume autonome de forme circulaire, véritable sculpture en inox séparant l'espace du salon de celui de la chambre. Ce cloisonnement reste cependant suffisamment minimal pour que la vue sur le paysage soit préservée en tous lieux, y compris depuis l'entrée. La maison semble transparente, un jeu visuel accentué par l'adjonction de miroirs sur les poteaux porteurs. Cette particularité, seule intervention d'Arman dans l'évolution du chantier, conduit à une dilatation de l'espace, mais aussi à une confusion perceptive certaine (et sans doute voulue) : les limites entre intérieur et extérieur s'en trouvent atténuées.
Avec cet artifice, Arman semble retrouver et réaliser l'idéal d'une "maison sans murs".
La maison est dotée d'équipements originaux et ludiques inventés par l'architecte. Ainsi, à l'intérieur, la table du salon est escamotable dans le sol, sur simple pression d'un bouton. A l'extérieur, un "lumiduc" assure l'éclairage, durant 3 heures par jour, de la chambre semi-enterrée d'Arman. Un hamac en forme de toile d'araignée anime le Nord de la construction et des gargouilles surdimensionnées ornent de part et d'autre la toiture en son centre.
A ces équipements s'ajoute une réflexion paysagère ayant conduit à une toiture végétalisée améliorant l'intégration de la réalisation dans le site et à l'implantation de "pas japonais" (des plots cylindriques) matérialisant une promenade au Nord de la maison.
Mais l'invention la plus originale et la plus ambitieuse de Guy Rottier pour ce site était la présence de plusieurs capsules mobiles autour de la maison, déplaçables à volonté à l'aide d'un treuil et destinées à accueillir les chambres d'amis. Ces capsules triangulaires de 20 m2 devaient être réalisées en polycarbonate, un plastique très résistant, et étaient prévues pour proposer une chambre et une petite salle d'eau aux invités. Ces capsules ne furent pas réalisées à l'époque, non pas en raison d'un refus de permis de construire – la notoriété du peintre Arman ayant permis l'obtention des autorisations nécessaires – mais en raison de difficultés financières et du départ de Guy Rottier en tant que Professeur d'architecture pour l'Université de Damas en 1970.
Dès les premières années d'occupation, Arman mit en scène sa maison lors d'installations artistiques éphémères, telles Piano Garden en 1969 ou Maison Bidonville en 1984. Il ne reste de ces "accumulations" que des clichés photographiques, et quelques rebuts sur le site, mais l'importance de la maison dans la présentation des oeuvres est à retenir : bien qu'il n'en soit pas l'auteur, Arman a su s'approprier cette maison pour l'intégrer à sa pratique créative. Mais l'oeuvre de Guy Rottier s'en trouve, au total, dénaturée.
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