Malgré leur intérêt pour l'histoire de l'architecture, la restauration du patrimoine, l'archéologie du bâti, l'ethnologie et bien d'autres domaines comme la formation professionnelle (menuiserie, serrurerie…), les châssis de fenêtres anciens demeurent aujourd'hui profondément négligés et méconnus. Leur image, sans doute trop familière et trop présente dans notre univers quotidien, les relègue au rang de simples ouvrages fonctionnels. Ils sont alors aisément supprimables pour faire place à de nouveaux éléments plus conformes à nos modes de vie. Il n'est évidemment pas question de remettre en cause cette évolution somme toute naturelle et légitime, nos ancêtres n'ayant guère fait autrement. On peut toutefois affirmer qu'ils avaient le sens de l'économie et qu'à l'inverse de notre société de consommation, les ouvrages avaient souvent plusieurs vies. On réparait, on adaptait, plus qu'on ne changeait.
On mesure mal la diversité des châssis d'autrefois, héritiers de territoires morcelés et de traditions solidement ancrées, tant les disparitions sont nombreuses. Seules quelques vestiges témoignent encore du XVe siècle, période durant laquelle la France a pourtant connu un redressement spectaculaire de sa courbe démographique après les années sombres de la guerre de Cent Ans. Le XVIe siècle est un peu mieux représenté, mais là encore les témoins demeurent exceptionnels. Quant au XVIIe siècle, il est grand temps de l'aborder avant qu'il ne subisse le même sort. En fait, les châssis de ces trois siècles partagent un inconvénient majeur. Hormis leur grand âge, leurs caractéristiques techniques ne leur permettent pas de s'adapter à nos modes de vie modernes. Ils sont donc systématiquement éliminés, même sur les édifices protégés au titre des monuments historiques... Le phénomène s'est amplifié ces dernières années, et les châssis plus récents, des XVIIIe et XIXe siècles, pourtant comparables à leurs homologues d'avant les années 1970, ne répondent plus aux contraintes actuelles particulièrement exigeantes en matière d'étanchéité et d'isolation. Ils sont donc éliminés, eux aussi, pour laisser la place à des ouvrages plus étanches et plus faciles à entretenir. Le renouvellement sans précédent des châssis de fenêtres sur l'ensemble du territoire national depuis une trentaine d'années nous a amené à en rechercher les derniers témoins afin de les enregistrer pour en préserver au mieux la mémoire et constituer une base de données que chacun pourra utiliser suivant ses centres d'intérêt. Le caractère bénévole de cette entreprise nous a toutefois contraint à la réduire à l'ouest de la France et aux XVe, XVIe et XVIIe siècles, les vestiges de ces trois siècles étant les plus menacés.
Commencée en 1996, cette base comprend aujourd'hui plusieurs dizaines de témoins.
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