Seul le prononcé fait foi
Monsieur le Préfet de Région, cher Fabrice RIGOULET-ROZE,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Monsieur le Conseiller régional, cher Julien BAINVEL,
Monsieur le Vice-Président du Conseil départemental, cher Pascal BOLO,
Madame la Maire, chère Johanna ROLLAND,
Monseigneur, cher Laurent PERCEROU,
Monsieur le Procureur de la République, cher Antoine LEROY,
Monsieur le Directeur général des Patrimoines et de l’Architecture, cher Jean-François HEBERT,
Madame la Directrice générale des Affaires culturelles, chère Anne GERARD,
Mesdames et Messieurs en vos grades et qualités,
Chers amis,
Il y a tout juste cinq ans, la cathédrale de Nantes était frappée par un drame qui nous a tous bouleversés. En quelques heures, l’histoire a semblé se répéter dramatiquement. Après Notre-Dame de Paris, c’était Saint-Pierre et Saint-Paul de Nantes qui était gravement endommagé par les flammes.
L’incendie du 18 juillet 2020 a détruit des trésors irremplaçables. L’orgue de tribune, chef-d’œuvre multiséculaire, s’est effondré. La grande verrière occidentale, commandée par Anne de Bretagne, a été anéantie. Les maçonneries du massif occidental ont été fragilisées.
Un tableau d’Hippolyte Flandrin, élève d’Ingres, a été perdu. La console de l’orgue de chœur, un rang de stalles, des luminaires, la cathèdre ont été partiellement ou totalement détruits. Les pertes, estimées à plus de quinze millions d’euros, ne sauraient se résumer à un chiffre : elles représentent une atteinte profonde à notre histoire, à notre culture, à un pan entier de notre patrimoine. Rien ne pourra jamais remplacer ces témoignages artistiques et religieux.
Mais chacun le sait ici, ce fut vrai, pour Notre-Dame comme ce fut le cas ici, notre pays n’abandonne pas son patrimoine. Grâce à l’engagement de tous ceux qui ont refusé de céder à la fatalité des flammes et qui ont fait de cette renaissance un combat quotidien, la Cathédrale de Nantes rouvre aujourd’hui ses portes.
Dès le premier jour, les services de l’État se sont mobilisés. Aux côtés des pompiers héroïques, les agents de la DRAC des Pays de la Loire ont accompagné la lutte contre le feu, puis la mise en œuvre du Plan de sauvegarde des biens culturels.
L’architecte en chef des monuments historiques, Pascal Prunet, était présent dès les premières heures. Des équipes pluridisciplinaires se sont constituées, associant conservateurs, ingénieurs, restaurateurs, archéologues, scientifiques. Le Laboratoire de recherche des monuments historiques a apporté son expertise décisive. Pendant cinq ans, un service renforcé, avec une équipe dévouée de la conservation régionale des monuments historiques, a porté la maîtrise d’ouvrage des travaux, dans des conditions exceptionnelles.
Pour rebâtir, il a fallu inventer des méthodes nouvelles, à la hauteur du drame qui venait de se jouer. Déblayer, sécuriser, dépolluer, protéger, tout en projetant la cathédrale vers l’avenir. Chaque étape a représenté un défi. Le risque de pollution au plomb, la présence d’amiante, la fragilité des structures ont exigé des expertises complexes et minutieuses.
Mais la stratégie était claire : rouvrir au plus vite les espaces essentiels à la vie de l’édifice, au culte, à l’accueil, à la mémoire.
Ce chantier hors normes a connu une organisation inédite. Plusieurs interventions ont été menées de front : restauration du tombeau des ducs de Bretagne, travaux archéologiques, remise en service des cloches, reconstruction des réseaux électriques et de sécurité, restauration et remontage de l’orgue de chœur, repose des tableaux, installation d’échafaudages sur la façade occidentale. Le calendrier a été bouleversé, mais la volonté n’a jamais faibli.
Aujourd’hui, cette volonté collective prend tout son sens. Pour autant, cette réouverture, si elle est une étape symbolique et cruciale, ne constitue pas la fin du chemin. Les travaux se poursuivront jusqu’en 2028. Le chantier du massif occidental, le plus long et le plus ambitieux, est encore devant nous. Une nouvelle verrière occidentale verra le jour, fruit d’un concours qui associera les artistes de notre temps et laissera une large place à la création contemporaine. Un nouvel orgue de tribune sera créé. Les voûtes seront consolidées, les baies hautes et les bas-côtés de la nef restaurés, les cryptes réaménagées pour mieux transmettre l’histoire de cet édifice. La cathédrale vivra au rythme d’un chantier ouvert, où patrimoine ancien et création contemporaine dialogueront.
Plus de 21 millions d’euros ont déjà été investis par l’État, propriétaire de la cathédrale. À terme, ce sont plus de 35 millions d’euros qui seront mobilisés. Cet effort financier exceptionnel est à la hauteur de l’attachement de la Nation à son patrimoine. La ville de Nantes elle-même, que je remercie, a contribué à hauteur de 100 000 euros pour favoriser la création d’une œuvre contemporaine à l’échelle de ce monument.
Mais cette renaissance constitue bien plus qu’un investissement matériel. Elle a permis de faire progresser la connaissance scientifique.
Les bois du buffet d’orgue détruit ont été étudiés comme jamais auparavant, révélant les pratiques des artisans des XVIIe et XVIIIe siècles. Une recherche inédite sur les vitraux de la cathédrale a mis en lumière l’importance des maîtres verriers de l’abstraction française du XXe siècle. Des fouilles archéologiques majeures ont mis au jour les vestiges de la cathédrale romane, son portail, ses caveaux funéraires. Ces découvertes renouvellent en profondeur l’histoire de l’édifice.
Je veux aussi souligner que cette restauration s’est faite dans le respect de l’art. Partout où cela était possible, le choix a été fait de restaurer à l’identique. Mais comme dans les décennies passées, où de grands artistes ont su inscrire leur modernité dans l’histoire séculaire de l’édifice, notre époque trouvera ici son expression. L’art contemporain ne s’oppose pas à l’héritage : il en est, d’une certaine façon, la continuité.
Enfin, ce chantier a permis de renforcer la sécurité de nos cathédrales. L’incendie de Nantes a rappelé, après celui de Notre-Dame de Paris, la nécessité absolue de protéger ces monuments.
Les services de l’État, avec les pompiers et le diocèse, ont tiré toutes les leçons de ce drame. Le plan de sauvegarde des biens culturels, mis en œuvre ici de manière exemplaire, sera généralisé. Les dispositifs de sûreté ont été repensés. Désormais, l’avenir de la cathédrale se conjugue avec vigilance et responsabilité.
Chers amis, une cathédrale est bien plus qu’un édifice. Elle est un lieu de foi, de mémoire et de culture. Elle est un repère dans le paysage, un repère dans les vies des fidèles qui la fréquentent. Elle est à la fois un héritage du passé autant que sa préservation est une promesse pour l’avenir. La cathédrale de Nantes est tout cela : le signe de la résilience, le témoignage de notre capacité à relever les épreuves et à faire renaître la beauté.
En la réouvrant aujourd’hui, nous rendons hommage à tous ceux qui se sont mobilisés : les sapeurs-pompiers, les agents de la DRAC, les architectes, les restaurateurs, les chercheurs, les compagnons, les artisans, les ouvriers, les élus locaux, le diocèse. Tous, chacun à sa place, ont permis que ce moment advienne.
La cathédrale de Nantes renaît. Elle retrouve sa place dans la vie des Nantais, dans la vie des Français et dans notre culture. Et avec elle, c’est notre patrimoine tout entier qui se trouve renforcé.
Je vous remercie.