Avec Patrice Chéreau disparaît l’un des plus grands artistes français, mais aussi une part essentielle de nous mêmes.
Nous nous sommes construits au fil de ses mises en scène, de ses auteurs, de ses films, des musiques et des livrets qui les accompagnaient, des acteurs qu'il a révélés.
Il a été, jusqu'au bout d'une lutte acharnée, un homme magnifique et bouleversant, qui n'a jamais rien concédé, ni sur son talent, ni sur ses convictions.
Il nous laisse orphelins de son immense héritage.
Ce soir est un soir de deuil pour la France mais aussi pour l’art car l'admiration suscitée par l'œuvre de Patrice Chéreau allait bien au-delà de nos frontières.
Acteur, metteur en scène de théâtre et d'opéra, metteur en scène de cinéma, directeur de quelques-unes des plus belles aventures de la décentralisation théâtrale, notamment les Amandiers avec Catherine Tasca, il avait un sens aigu de la transmission et faisait de chaque plateau une véritable école de la vie. Il recherchait l’épure et la sobriété, qui était le plus bel hommage qu’il rendait aux textes et aux interprètes. Cela reposait sur une profonde confiance dans les auteurs et les comédiens. Chacun allant au cœur de lui-même, il se dégageait force et puissance de ses mises en scène. Celle d’Elektra au festival d’Aix en juillet dernier en fut à la fois le symbole, la quintessence et le testament. Elle fut l’ultime preuve, si besoin était, que Patrice Chéreau fait désormais partie des grands classiques du théâtre.
Homme de cœur, de passion, d'engagement, homme lucide face aux errements de notre société comme face à la maladie, il portait ce courage de dire la vérité qu'il creusait toujours, sur les scènes du théâtre comme sur celles du monde.
Je garde aussi le souvenir de sa générosité, de son humilité, de son exigence, et de son infinie bonté.
A ses amis, à ses proches, à tous ceux qui ont eu la chance de croiser son regard, je veux dire mon amitié et mon immense chagrin.