Franck Riester présidera, mercredi 3 avril, le Comité ministériel pour l’égalité femmes-hommes dans la culture et la communication. A cette occasion, la feuille de route Égalité 2019-2022 sera présentée, avec des objectifs et des chantiers ambitieux afin de lutter contre les stéréotypes et faire progresser la place des femmes dans la culture. Retour sur les principaux chiffres publiés le 7 mars dans le rapport annuel de l’Observatoire de l’égalité entre femmes et hommes dans la culture et la communication.

Où en est l'égalité entre femmes et hommes dans le monde de la culture ? L'édition 2019 de l'Observatoire de l'égalité entre femmes et hommes a dévoilé le 7 mars des données statistiques très attendues, qui font apparaître la persistance de disparités importantes. Si l’on observe une féminisation croissante des professions culturelles à l’œuvre depuis plus de quinze ans, les femmes restent minoritaires aux postes de direction de la sphère culturelle (à l'exception notable de l'audiovisuel public). De même, elles accèdent moins que leurs homologues masculins aux moyens de production, à la programmation artistique et à la réalisation audiovisuelle, où elles  restent moins visibles que les hommes.

Pourtant, l’année 2018 aura été riche en initiatives fortes du ministère de la Culture en matière d’égalité, à commencer par une feuille de route 2018-2022 qui fixe des objectifs ambitieux pour la période 2018-2022. Parmi les événements marquants, citons l’annonce, le 20 septembre, lors des premières assises sur l’égalité dans le cinéma, d’un bonus de 15% sur le soutien financier automatique mobilisé pour la production de films exemplaires en matière de parité, ou la signature, le 23 novembre, par l’ensemble des organisations syndicales, d’un protocole relatif à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au ministère de la Culture, de même que la fixation dans le champ de la création d’objectifs quantitatifs de progression de la part des femmes dans les programmations (métiers artistiques et techniques). Un agenda qui devrait s’accélérer prochainement avec la signature, le 13 avril prochain, de la charte "Les médias s'engagent contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes", et la généralisation des chartes Égalité dans les établissements d’enseignement supérieur culturel et artistique.

L’enrichissement régulier de l’observatoire et sa publication chaque année à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, en font un outil de référence pour que progresse l’égalité dans notre société, une égalité que l’ensemble du monde artistique et culturel doit promouvoir, tant l’art et la culture peuvent influer sur les représentations collectives et s’enrichir, à leur tour, des multiples talents que les femmes doivent, sans entrave, y déployer

Emploi, postes de direction… la féminisation en marche 

C’est l’une des tendances de fond rappelées par l’Observatoire 2019 : un mouvement lent mais continu de féminisation des professions culturelles (43% des professionnels de la culture sont des femmes). En 2017, elles sont 54% à exercer une profession littéraire, 46% une profession artistique ou un métier d’art, 34% le métier d’architecte et 31% une profession dans le secteur du spectacle. Avant d’exercer une profession culturelle, les femmes sont nettement majoritaires dans les effectifs étudiants des établissements d’enseignement supérieur Culture (61%).

La part des femmes aux postes de direction des  établissements culturels sous tutelle du ministère de la Culture ne progresse guère (33%). Dans les établissements labellisés, on compte désormais davantage de femmes directrices d’orchestre et cinq femmes à la tête des pôles nationaux des arts du cirque au 1er janvier 2019. A cette même date, les femmes occupent tous les postes de direction les plus élevés de l’audiovisuel public, à l’exception de l’Institut national de l’audiovisuel (INA). En revanche, 11% de femmes seulement dirigent les 100 plus grandes entreprises culturelles du secteur privé.

Les œuvres des femmes restent moins visibles que celles des hommes

Dans le domaine de l’art contemporain comme dans l’univers cinématographique, la part des femmes est encore  fortement minoritaire. En 2016, les collections des Fonds régionaux d’art contemporain (FRAC) comptaient 31% d’œuvres de femmes ; elles étaient 33% à être exposées dans les Centres d’art. Dans le monde du cinéma, les femmes sont moins présentes encore : en 2017,  on compte  23% de femmes réalisatrices de longs métrages et 32% de courts-métrages.

Le journalisme est en passe de devenir une profession paritaire et les femmes détentrices de carte de presse sont de plus en plus présentes dans les médias : 48% dans la presse écrite, 43% à la télévision et 44% à la radio. En revanche, elles sont beaucoup moins nombreuses dans les postes les plus élevés (38% des rédacteurs en chef et 26% des directeurs de publication ou de rédaction sont des femmes).

Consécration artistique : l'exception littéraire en faveur des femmes

À l'exception notable des prix littéraires, où elles représentent 41% des lauréats de plusieurs grands prix littéraires nationaux entre 2010 et 2018, les femmes accèdent  significativement moins que les hommes à la reconnaissance artistique. Alors qu’un film sur cinq est réalisé par une femme, aucune d'entre elles n'a reçu le César du meilleur film ou du meilleur réalisateur depuis 2010. Au festival de Cannes, la palme d’or n’a été attribuée qu’une unique fois à une femme depuis 1970.

Les récompenses du spectacle vivant ne sont pas plus favorables, puisque l'on ne compte, côté musique, que 24% de femmes parmi les interprètes des 50 plus grands succès de l'année 2016 et seuls 16% des albums chantés par des femmes ont été primés aux Victoires de la musique entre 2010 et 2018. Côté spectacle, la situation est encore moins favorable, puisque aucune femme n'a reçu le Molière de la mise en scène entre 2010 et 2018, malgré un nombre significatif de femmes dramaturges, et que seulement 15% des 1 400 représentations d’opéras de la saison 2018/2019 sont mises en scène par une femme.

Observatoire de l'égalité entre femmes et hommes dans la culture et la communication, édition 2019, département des études, de la prospective et des statistiques, Ministère de la Culture

Franck Riester : "Un changement de mentalité en faveur de l’égalité"

Le 8 mars, Journée internationale des droits des femmes, le ministre de la Culture est revenu sur son "combat" en faveur d'une parité réelle. "Ce combat ne se gagne pas seulement en changeant les textes, en changeant la loi, a-t-il affirmé dans une vidéo. C’est un changement de mentalité que notre société doit adopter".

Pour favoriser cette évolution, Franck Riester a détaillé les différentes actions qu’il entend mener au ministère de la Culture. Postes de direction : "d’ici la fin du quinquennat, nous porterons à 50% la part des femmes à la tête des établissements publics nationaux. Et nous favoriserons l’accompagnement des femmes vers la prise de fonctions de responsabilité dans la sphère culturelle". Égalité salariale : "au sein du ministère de la Culture et de toutes les entités qui en dépendent, nous résorberons les disparités salariales entre femmes et hommes". Combat contre les violences sexistes : "parce que toutes les formes de violence et de harcèlement sexuel et sexiste sont inacceptables, nous appliquerons une tolérance zéro en la matière". Lutte contre les stéréotypes : "nous inciterons les entreprises du champ culturel, et notamment de l’audiovisuel, à déconstruire les stéréotypes, à promouvoir l’égalité dans la représentation qu’elles donnent des femmes".