Si je suis particulièrement heureux d’être avec vous aujourd’hui, c’est qu’en
trente-trois ans, le « Livre sur la place » est à l’évidence devenu en France
un événement de référence. Le modeste salon des origines a pris une
ampleur remarquable, portée par la Ville de Nancy et ses libraires
regroupés dans l’association « Lire à Nancy » : véritable fête populaire,
avec ses 140 000 visiteurs en 2010, elle est aussi un rendez-vous littéraire
très attendu de ce mois de septembre marqué par la rentrée littéraire, le
moment fort du monde de l’édition française. Le soutien fidèle de
l’Académie Goncourt est un gage d’excellence pour cette manifestation de
grande envergure, avec le parrainage de Jean d’Ormesson pour ses
programmes destinés aux écoliers comme la Nouvelle de la Classe, dont
nous allons procéder au tirage au sort. Le Livre sur la place, c’est aussi le
prix « Livre et droits de l’homme », qui fête ses dix ans, avec Simone Veil
comme présidente ; la remise du prix Goncourt de la biographie ; la
présence de deux grandes figures des lettres antillaises, Suzanne Dracius
et Ernest Pépin, à l’occasion de l’Année des Outre-mer ; le centenaire de la
Maison Gallimard ; un hommage à Jacqueline de Romilly par Marie-
Christine Barrault… Une programmation donc foisonnante, de haut niveau,
qui place le salon de Nancy parmi les principales manifestations en France
qui font honneur au livre, à ses métiers, et à tous ses lecteurs – et qui doit
tant à l’engagement personnel de Madame Françoise Rossinot, conseillère
littéraire de la ville de Nancy.
Nancy a su développer dans le domaine du livre une politique
particulièrement active : outre les programmes destinés aux écoliers du
primaire qui s’éveillent au monde de l’écrit, je pense notamment à la qualité
des actions menées en matière de démocratisation culturelle. Je tiens à
saluer aussi tout particulièrement les quatre librairies qui ont reçu le label
des Librairies indépendantes de référence (LiR) : la Parenthèse, l’une des
plus anciennes en France à s’être dédiée au neuvième art, et cela depuis
1974 ; L’Autre Rive ; la Librairie Didier, bien sûr, à vocation universitaire,
l’une des plus anciennes de Nancy ; la Librairie Stanislas / À la Sorbonne,
que tous les Nancéiens connaissent bien, et qui a joué un rôle important
lors de la création de « Livre sur la Place ».
Quand le ministère de la Culture et de la Communication a lancé ses 14
propositions pour le développement la lecture, la Ville de Nancy a été une
des premières à y adhérer – notamment par votre ambitieux projet de créer
une bibliothèque numérique de référence, un projet que je souhaite
soutenir d’autant plus activement qu’il s’appuie sur une perspective
régionale et intercommunale, avec la communauté urbaine du Grand
Nancy, en s’ouvrant aux partenariats avec les entreprises privées. Le
Comité des Sages, le groupe de réflexion de haut niveau sur la
numérisation du patrimoine culturel européen, en remettant son rapport
aux commissaires Neelie Kroes et Androulla Vassiliou, nous a rappelé la
chance que nous offre aujourd’hui le tournant du numérique, en matière de
partage du patrimoine écrit - cette « nouvelle Renaissance » par laquelle
nos bibliothèques, nos archives, nos musées vont changer de dimension,
par la démultiplication des possibilités d’accès, par la mise en réseau des
ressources que nous offre notamment Europeana. Je suis profondément
convaincu par cette lecture de notre présent technologique : les Etats et les
collectivités locales, dans toute l’Europe, ont une opportunité formidable à
saisir.
À condition de s’en donner les moyens, notamment par les partenariats
public-privé, et en tenant le cap de la vigilance pour le respect du droit
d’auteur dans un secteur économique en pleine mutation. Cette
transformation majeure du monde de l’écrit, qui est en train de modifier en
profondeur les règles du jeu pour les écrivains, les éditeurs et les libraires,
mon ministère veut pouvoir l’accompagner au mieux. C’est le sens,
notamment, de la loi sur le prix unique du livre numérique. Cette régulation
nécessaire d’une de nos principales industries culturelles, celle du livre, il
va nous falloir la défendre auprès des institutions communautaires, en
convainquant nos partenaires de l’Union Européenne de sa pertinence
fondamentale pour l’avenir de l’Europe de la Culture. La magnifique place
de la Carrière qui accueille ce salon - l’une des trois places nancéiennes
classées patrimoine mondial par l’UNESCO - porte la marque d’un siècle
qui aura fait du livre et de l’écrit l’une des conditions fondamentales de la
liberté d’expression et de la liberté de pensée. À nous de la protéger.