Käthe Kollwitz (Königsberg, 1867- Moritzburg, 1945)
Figure majeure de l'art allemand, la sculptrice, dessinatrice et graveuse Käthe Kollwitz a incarné un des visages de l'art politique durant la première moitié du 20ème siècle.
Confrontée très tôt à l’indigence et à la misère qui règne dans les quartiers nord du Berlin à la fin de l’Empire, Käthe Kollwitz développe une œuvre oscillant entre expressionnisme et réalisme social. Comme elle l’analyse dans son journal, l'art a pour tâche de représenter la condition sociale des prolétaires. Les représentations des plus démunis, le deuil ou des allégories révolutionnaires constituent les sujets de ses premières gravures, avant que la Grande Guerre, qui lui arrache son fils, n’imprime à son œuvre un fort caractère pacifiste. Ces évènements lui inspirent alors la célèbre pietà exposée au cœur du mémorial dédié aux victimes de la guerre et de la tyrannie, à Berlin.
Fortement influencée par Max Klinger (1857-1920), qui dans son essai Malerei und Zeichnung (Peinture et dessin) publié en 1891, affirme l’indépendance de la gravure vis-à-vis de la peinture, et souligne sa grande efficacité pour s’attaquer aux problèmes sociaux, elle abandonne la peinture et la couleur pour choisir la gravure comme principal moyen d’expression aux côtés de la sculpture.
Pendant l’hiver 1901-1902, elle se lance dans une série de gravures prenant pour sujet «La Guerre des paysans», une révolte écrasée dans le sang au moment de la Réforme en 1525 ; un sujet historique qui trouve un écho dans l’Allemagne du début du 20ème siècle. L’ensemble, achevé en 1908, connaît le succès et, en signe de reconnaissance, la graveuse devient en 1919 la première femme membre de l’Académie de Prusse, où elle obtient une chaire d’enseignement.
Engagée politiquement, elle participe à la tentative de construction d'une unité des travailleurs luttant contre le national-socialisme. En 1933, avec l'arrivée au pouvoir des nazis, elle est contrainte de démissionner de son poste à l'Académie. Il lui est interdit d'exposer son travail, bien qu'une partie de ses toiles ait été utilisée par les nazis à des fins de propagande. Évacuée en 1943 de Berlin, elle se réfugie à Moritzburg où elle décède.
La plupart des œuvres de Käthe Kollwitz sont conservées en Allemagne dans trois musées qui portent son nom, à Moritzburg, Berlin et Cologne. Le Musée d’art moderne et contemporain de Strasbourg conserve aussi un ensemble remarquable de trente gravures.
Pascale Samuel
Bibliographie
Geyer Marie-Jeanne, Utopie et révolte : La gravure allemande du Jugendstil au Bauhaus dans les collections publiques françaises, catalogue d'exposition, Musée d'Art moderne et contemporain de Strasbourg, 22 septembre - 31 décembre 2006, Strasbourg, Éditions des Musées de Strasbourg, 2006
Javault Patrick, Les collections du Musée d'Art moderne et contemporain de la ville de Strasbourg, Strasbourg, Editions des Musées de la ville de Strasbourg, 2008
Maisse Camille, Käthe Kollwitz. La Vérité des sens, catalogue d'exposition, Vic-sur-Seille, Musée départemental Georges de La Tour, 10 juin - 2 septembre 2012, Saint-Etienne, IAC Editions d'Art, 2012
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