Depuis 2005, le groupe Google s’est engagé dans une entreprise massive de numérisation des livres. Le projet Google Books Search s’est constitué initialement grâce à des contrats passés avec des bibliothèques américaines, qui prévoyaient la numérisation gratuite de très larges collections de livres. En 2007, douze bibliothèques universitaires avaient passé de tels contrats avec Google et aujourd’hui, plus de douze millions d’ouvrages, y compris des ouvrages européens, ont pu être numérisés par Google.

Depuis 2005, plusieurs actions judiciaires ont été engagées par les ayants droit. Les représentants des auteurs et des éditeurs reprochent à Google d’avoir réalisé ces copies numériques sans autorisation préalable. Ils se plaignent également de l’affichage, sur l’interface de Google, d’extraits de ces livres correspondant à la recherche de l’internaute.

Aux États-Unis, les sociétés d’ayants droit et Google sont parvenus en octobre 2008 à un projet de règlement à l’amiable pour mettre fin au conflit judiciaire. Cet accord prévoyait, contre le versement de 125 millions de dollars, l’abandon des poursuites judiciaires contre Google et octroyait à la société une licence pour exploiter commercialement toutes les œuvres numérisées par elle, en distinguant les livres commercialisés aux États-Unis, pour lesquels Google devait demander un accord préalable de l’ayant droit, et les autres, dont l’exploitation commerciale aurait été a priori permise pour Google, sauf opposition de l’ayant droit. Ce projet inquiète vivement la communauté internationale parce qu’il concerne des livres du monde entier. Il est contraire aux principes du droit d’auteur, incompatible avec les règles de la concurrence (Google serait le seul acteur à avoir cette licence) et dangereux pour la diversité culturelle.

En octobre 2009, ce premier projet d’accord a été spontanément abandonné par Google et les sociétés d’ayants droit américains après les vives critiques dont il a fait l’objet. Les parties de l’accord initial ont très vite présenté un nouveau projet, amendé, qui réduit le champ des livres concernés à ceux qui ont été publiés dans un pays anglo-saxon ou enregistrés au Bureau américain du droit d’auteur. Cependant, de très nombreux livres du monde entier restent concernés (plus de 200 000 en France) parce que cet enregistrement au Bureau du droit d’auteur était une démarche très fréquente pour les œuvres produites au XXe siècle, qu’elles soient ou non américaines : avant 1989 et la signature de la convention de Berne par les États-Unis, c’était le seul moyen pour les éditeurs de protéger leurs livres sur ce territoire. Le projet amendé modifie également le principe suivant lequel Google aurait pu exploiter sans autorisation préalable les livres indisponibles dans les circuits commerciaux américains : Google devrait maintenant vérifier également qu’il est bien impossible de se procurer le livre neuf, même par l’internet.

Le 18 février 2010, une nouvelle audience a eu lieu devant le juge fédéral Dennis Chin, où étaient entendues les observations contre ce deuxième projet d’accord. Les parties ayant déposé des observations, qui rassemblent de nombreuses sociétés et organisations parmi lesquelles Microsoft, Amazon, les gouvernements américain, allemand et français, le Syndicat national de l’édition et six groupes d’édition français, ne sont pas satisfaites des aménagements apportés à la première version. L’avis de Dennis Chin est encore attendu.