Le premier renouvellement des membres de la Commission régionale du patrimoine et de l’architecture d'Île-de-France a eu lieu le lundi 20 juin 2022 à la Médiathèque du patrimoine et de la photographie, à Charenton-le-Pont. L'Île-de-France fut la première région à installer sa CRPA, en 2017. L'occasion de revenir sur le rôle crucial de cette instance, maillon essentiel de la politique patrimoniale de l'Etat en région.

 

La Loi LCAP (Liberté de la création, architecture et patrimoine) promulguée le 7 juillet 2016 a créé la Commission régionale du patrimoine et de l’architecture (CRPA). Le décret relatif au patrimoine mondial, aux monuments historiques et aux sites patrimoniaux remarquables du 29 mars 2017 est venu en préciser les compétences et le mode de fonctionnement.

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Séance de renouvellement d'installation de la Commission régionale du patrimoine et de l'architecture (CRPA), 20 juin 2022 © DRAC Île-de-France

Organisation et compétences de la nouvelle CRPA

La CRPA a fusionné la Commission régionale du patrimoine et des sites (CRPS) placée auprès du préfet de région, et les Commissions départementales des objets mobiliers (CDOM) placées auprès des préfets de département. Ces anciennes commissions n’ont plus d’existence depuis le 1er avril 2017.

La CRPA comprend trois sections :

Section I "protection et valorisation du patrimoine immobilier"

  • Avis sur les dossiers de protection d’immeubles au titre des monuments historiques ;
  • Avis sur les plans de valorisation de l’architecture et du patrimoine (PVAP) ;
  • Avis sur les périmètres délimités des abords (PDA) en cas de désaccord avec l’autorité compétente si le périmètre est inférieur à 500 m (article L.621-31 et R.621-94 du code du patrimoine) ;
  • Attribution du label "architecture contemporaine remarquable" (article L.650-1 du code du patrimoine) ;
  • Avis sur les plans de valorisation de l'architecture et du patrimoine (PVAP) des sites patrimoniaux remarquables (article L.631-4. I du code du patrimoine), la CRPA pouvant en outre être consultée sur les propositions de classement de sites patrimoniaux remarquables (conséquence de l'article L.611-2) ;
  • les documents d’urbanisme institués dans un but de protection, de conservation et de mise en valeur du patrimoine culturel qui lui sont soumis.

En application du décret 2020 -733 du 15 juin 2020 relatif à la déconcentration de décisions administratives individuelles dans le domaine de la culture, la première section donne également des avis sur :

  • Le label Maison des Illustres (MdI) qui signale à l’attention du public des lieux dont la vocation est de transmettre la mémoire des femmes et des hommes qui les ont habités et qui se sont illustrés dans divers domaines.
  • Le label Centre culturel de rencontre (CCR) qui permet de donner une nouvelle lisibilité à des monuments historiques ayant perdu leur vocation d'origine grâce à des manifestations culturelles et une programmation artistique. Le label a été conforté en 2016 par la loi LCAP et il est maintenant attribuée par un service au sein des Drac.
  • Le label Villes et pays d’art et d’histoire (VPAH) qui est attribué à des communes ou à des établissements de coopération intercommunale qui conduisent une politique de valorisation de leurs patrimoines et de l’architecture, qui favorisent la création architecturale et paysagère et qui promeuvent la qualité architecturale dans les espaces bâtis ou aménagés.
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Philippe Laurent, maire de Sceaux pour la séance du renouvellement d'installation de la commission régionale du patrimoine et de l'architecture (CRPA), 20 juin 2022 © Drac Île-de-France

Section II "projets architecturaux et travaux sur immeubles"

La consultation est obligatoire pour :

  • Avis sur les recours contre les avis des architectes des bâtiments de France formés par l’autorité compétente en matière d’urbanisme dans les espaces protégés (article L.632-2-II du code du patrimoine et R.423-68 du code de l’urbanisme) ;
  • Avis sur les demandes de dérogation supplémentaire de 5 % prévue par les articles L.151-29-1 et L.152-6 du code de l’urbanisme dont le décret n° 2017-254 du 27 février 2017 fixe les modalités d'application.

La consultation est facultative pour :

  • Avis sur les projets, études et travaux relevant du Livre VI du code du patrimoine (monuments historiques, sites patrimoniaux remarquables et labels architecture contemporaine remarquable).

Section III "protection des objets mobiliers et travaux"

  • Avis sur les dossiers de protection des objets mobiliers au titre des monuments historiques ;
  • Avis sur les dossiers de classement d’ensembles historiques mobiliers ;
  • Avis sur les dossiers de création de servitude de maintien dans les lieux ;
  • Avis sur les mesures conservatoires des objets mobiliers classés propriétés des collectivités territoriales ;
  • Avis sur les projets de travaux visant les objets mobiliers qui lui sont soumis.

En application du décret 2020 -733 du 15 juin 2020 relatif à la déconcentration de décisions administratives individuelles dans le domaine de la culture, la troisième section donne également sur 

  • la nomination des conservateurs des antiquités et objets (CAOA) et des conservateurs délégués des antiquités et objets d’art (CDAOA).

Chaque section de la CRPA est dotée d’une délégation permanente, qui peut émettre au nom de la section un avis défavorable sur les dossiers qui lui sont soumis ou se prononcer pour leur présentation devant la section en formation plénière.

La CRPA comprend par ailleurs un comité des sections qui examine les questions autres que celles qui relèvent de la compétence des sections. Le comité des sections élabore aussi le projet de règlement intérieur de la CRPA.

Composition de la CRPA

Un arrêté préfectoral en date du 10 juin 2022 fixe la composition la CRPA de la région d’Île-de-France.

La CRPA comprend 27 membres titulaires : des représentants de l’État, des personnes titulaires d’un mandat électif national ou local, des représentants d’associations ou de fondations ayant pour objet de favoriser la connaissance, la protection, la conservation et la mise en valeur du patrimoine, et des personnalités qualifiées.

Son président, M. Philippe LAURENT, maire de Sceaux, président de l'union régionale des CAUE d’Île-de-France, a été nommé par le préfet de la région d’Île-de-France, préfet de Paris. En cas d’empêchement, la présidence est assurée par le préfet de région ou son représentant (le directeur régional des affaires culturelles d'Île-de-France).

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Laurent Roturier (DRAC) pour la séance du renouvellement d'installation de la commission régionale du patrimoine et de l'architecture (CRPA), 20 juin 2022 © DRAC Île-de-France

La CRPA comprend des membres nommés par arrêté préfectoral pour une durée de cinq ans et des membres de droit. Un membre suppléant a été désigné pour chaque membre titulaire, excepté pour les personnalités qualifiées nommés intuitu personae. Une même personne a pu être nommée dans plusieurs sections de la CRPA.

Les membres titulaires d’un mandat électif local ont été choisis en fonction de leur intérêt pour le patrimoine et l’architecture, et de la présence sur leur territoire de monuments historiques ou de sites patrimoniaux remarquables. Tous les territoires de la région Île-de-France sont représentés.

Les associations de sauvegarde du patrimoine reconnues d’utilité publique, les fondations et sociétés savantes sont également représentées.

Les personnalités qualifiées sont nommées au regard de leur compétence particulière dans les domaines du patrimoine ou de l’architecture.

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Gilles Désiré dit Gosset pour la séance du renouvellement d'installation de la commission régionale du patrimoine et de l'architecture (CRPA), 20 juin 2022 © Drac Île-de-France

En fonction des sections, la qualité de certaines personnalités qualifiées est précisée :

  • 1ère section : six personnalités qualifiées dont au moins deux architectes et un membre du service régional chargé des opérations d’inventaire du patrimoine culturel ;
  • 2e section : six personnalités qualifiées dont au moins trois architectes ;
  • 3e section : six personnalités qualifiées dont au moins deux conservateurs des antiquités et objets d’art et un membre du service régional chargé des opérations d’inventaire du patrimoine culturel.

Des enseignants-chercheurs, des architectes et des fonctionnaires en poste au sein d’établissements publics de l’État ont été nommés au sein du collège des personnalités qualifiées.

Incidences de la mise en place des CRPA et rappel sur les procédures de protection au titre des monuments historiques

Les avis émis par les anciennes CRPS et par les anciennes CDOM entre le 1er janvier 2006 et le 31 mars 2017 demeurent valides.

Les arrêtés d’inscription au titre des monuments historiques des objets mobiliers relèvent désormais de la compétence du préfet de région, y compris pour les arrêtés pris à la suite d’un avis délivré par une ancienne CDOM.

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Séance du renouvellement d'installation de la commission régionale du patrimoine et de l'architecture (CRPA), 20 juin 2022 © Drac Île-de-France

Il est rappelé que tout dossier de classement d’un immeuble ou d’un objet mobilier au titre des monuments historiques doit avoir fait l’objet d’un examen par la CRPA avant sa présentation devant la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture (CNPA). Cette règle s’applique à toutes les catégories d’objets mobiliers, y compris ceux relevant du patrimoine industriel, scientifique et technique.

Les dossiers déjà présentés en CDOM pour une protection objet par objet doivent être soumis à la CRPA s’il est envisagé un classement comme ensemble historique mobilier ou l’institution d’une servitude de maintien dans les lieux. Cet examen doit être mis en œuvre sur la base d’un récolement récent confirmant la présence des objets protégés.

Par ailleurs, les dossiers de protection d’orgues et d’instruments de musique doivent être soumis à l’avis de la CRPA avant leur présentation devant la CNPA. Cette présentation permettra de sensibiliser l’ensemble des parties prenantes à la protection et à la conservation de ce patrimoine spécifique et de préciser la volonté locale de conservation et de valorisation.

Entrée en vigueur de l’autorisation de détachement des effets mobiliers attachés à perpétuelle demeure (immeubles par destination) à un immeuble protégé

La loi LCAP a créé un nouveau régime d’autorisation pour le détachement d’un effet mobilier attaché à perpétuelle demeure à un immeuble classé au titre des monuments historiques ou à un immeuble inscrit au titre des monuments historiques.

Cette disposition vise le détachement des immeubles par destination, au sens des articles du code civil, à savoir des biens qui sont attachés à l’immeuble avec une trace matérielle de cet attachement (scellement en plâtre, à chaux ou à ciment selon les termes du code civil), ou qui ne peuvent être détachés de l’immeuble sans être fracturés ou détériorés ou sans briser ou détériorer leur support immobilier.

Cette disposition vise à améliorer la préservation de l'intégrité des immeubles classés et inscrits et de leurs éléments de décor lorsqu’ils ne peuvent être considérés comme immeubles par nature. Il appartiendra à la CRPA d’apprécier si le bien concerné par la demande de détachement sollicitée participe de l'intérêt de l'immeuble protégé.

Application des nouvelles dispositions relatives aux biens inscrits sur la Liste du patrimoine mondial

Le décret précise les dispositions que l’État et les collectivités territoriales doivent appliquer afin de préserver la valeur universelle exceptionnelle des biens inscrits sur la Liste du patrimoine mondial.

Le préfet de région (Direction régionale des affaires culturelles et/ou Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement selon le bien concerné) pilote les procédures de délimitation des zones tampon et d’élaboration des plans de gestion des biens inscrits au patrimoine mondial.

Création des périmètres délimités des abords (PDA) de monuments historiques

Le décret précise la procédure de création des périmètres délimités des abords de monuments historiques. Cette servitude d’utilité publique est désormais créée par arrêté du préfet de région.

Cependant, cette nouvelle procédure ne s’applique pas aux projets de périmètre de protection modifiés et adaptés mis à l’étude avant la publication du décret qui doivent être instruits et créés conformément à la réglementation en vigueur avant cette date.

Classement et gestion des sites patrimoniaux remarquables

La loi LCAP du 7 juillet 2016 a créé un nouveau régime de protection du patrimoine appelé "sites patrimoniaux remarquables" qui succède aux trois dispositifs existants (ZPPAUP, AVAP, secteur sauvegardé). Un "plan de sauvegarde et de mise en valeur" (PSMV) peut être établi sur tout ou partie du site patrimonial remarquable. Sur les parties du site non couvertes par un tel plan, un "plan de valorisation de l'architecture et du patrimoine" peut être proposé.

Le décret du 29 mars 2017 précise également la procédure de classement au titre des sites patrimoniaux remarquables (SPR) et la composition de la commission locale des SPR par décision du ministre chargé de la culture, après avis de la commission nationale du patrimoine et de l’architecture et enquête publique conduite par l’autorité administrative (article L.631-2 du code du patrimoine) ainsi que le régime applicable et la composition locale des SPR (articles R. 631-1 à D.631-5 du code du patrimoine).

Il prévoit la procédure d’élaboration, de révision et de modification et le contenu des plans des SPR : les plans de valorisation de l'architecture et du patrimoine – PVAP (articles R.631-6 à D.631-14 du code du patrimoine) et les plans de sauvegarde et de mise en valeur – PSMV (articles R.313-1 à R.313-18 du code de l'urbanisme).